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A non-government information service on Turkey
Un service d'information non-gouvernemental sur la Turquie


145

13e année - N°145
Novembre  1988
38 rue des Eburons - 1000 Bruxelles
Tél: (32-2) 215 35 76 - Fax: (32-2) 215 58 60
 Rédacteur en chef: Dogan Özgüden - Editrice responsable: Inci Tugsavul
 
Grèves de la faim dans les prisons

    Près de 2.000 prisonniers politiques, détenus dans des prisons civiles et militaires se sont livrés à une grève de la faim en guise de protestation contre les nouvelles instructions du ministre de la justice qui ont pour effet de rétablir les conditions carcérales mises en place par l'administration militaire qui avait suivi le coup d'Etat de 1980.
    Les grévistes demandent: l'abolition de l'obligation de porter l'uniforme carcéral bleu foncé, qu'on cesse de les enchaîner par groupe lors des déplacements, le bannissement de tout traitement inhumain ainsi que du passage à tabac et de la torture, l'abandon du contrôle de leur courrier et de leurs lectures, l'alignement des prix pratiqués dans les cantines sur ceux du marché et la permission de disposer de machines à écrire, de radios, de lecteurs de cassettes et de récepteurs de télévision dans leurs cellules.
    Le 16 novembre, l'Association des Droits de l'Homme de Turquie (IHD) a annoncé la grève de la faim de 270 prisonniers politiques à Diyarbak∑r, 311 à Eskiªehir, 23 à Ceyhan, 28 à Adana, 199 à Gaziantep, 126 à Malatya, 27 à Amasya, 271 à †anakkale, 300 à Bayrampaªa (∂stanbul), 200 à Nazilli, 30 à Buca (∂zmir), 43 à Erzincan, 65 à Mamak (Ankara) et 74 à la Prison Centrale (Ankara).
    A la prison de Bursa, 214 prisonniers ont lancé une grève de la faim le 30 septembre, suite à cela les gardes ont battu et blessé 30 détenus lors d'une opération disciplinaire. Le ministre de la Justice a fait transférer 60 grévistes à la prison de †anakkale dans le but de faire cesser l'action.
    L'IHD a déclaré que la seule fa•on de solutionner ces problèmes, c'est d'élever les standards pratiqués dans les prisons turques au niveau de ceux des pays du Conseil de l'Europe.
    Beaucoup de grévistes étaient décidés à poursuivre leur action jusqu'à la mort et certains d'entres eux avaient déjà été transportés à l'hôpital en raison de leur état de santé alarmant.
    Les prisonniers et leurs familles se sont élevés contre le refus du ministre de la justice de fournir de l'eau salée et du sucre aux grévistes. Le secrétaire général de l'ordre des médecins d'Ankara a déclaré, que cette décision du ministre équivalait à commettre un crime.
    En 1984, une action similaire avait coûté la vie à 4 grévistes.
    Le ministre de la justice, Mehmet Topa• a déclaré devant le Parlement que les anarchistes et les terroristes qui ont été emprisonnés essayent de causer des troubles en faisant une grève de la faim. Il a ajouté que l'uniforme carcéral continue d'être obligatoire en dépit de la demande des prisonnier de le supprimer.
    Lors d'une autre action disciplinaire en octobre, des prisonniers politiques ont été disséminés dans différents prisons en Turquie après la découverte dans la prison militaire de Diyarbak∑r d'un tunnel de 60 mètres de long. Les officiels de la prison ont déclaré qu'il avait été creuse de l'extérieur vers le pénitencier. La Police a réagi en installant des spots dans les rues avoisinant de la prison et en fouillant les maisons des environs. Plus de 30 personnes ont été mises en état d'arrestation et 10 ouvriers du bâtiment, qui travaillaient dans un chantier voisin, ont été interrogés.
    Pendant les recherches, un second tunnel, de 40 mètres de long à été découvert à l'intérieur de la prison.
    A la suite de ces événements, un groupe de 130 prisonniers a été transféré de la prison militaire de Diyarbak∑r à la prison d'Eskiªehir.
    A ∂stanbul, 257 prisonniers politiques ont été transférés de la prison militaire de Metris à la prison de Bayrampaªa et 50 autres de la prison de Eskiªehir à celle de Bursa.
    Selon un rapport publié par NACRO en GB, la Turquie occupe la première place  parmi les pays membres du Conseil de l'Europe en ce qui concerne le taux de prisonniers et de détenus. En Turquie, 51.897 personnes sont en prison, c'est-à-dire 99,4 personnes sur 10.000.
    Amnesty International a adressé une lettre à ∏zal et au ministre de la Justice Mehmet Topa•, les pressant d'effectuer une étude impartiale des plaintes des prisonniers. Le nombre de celles qui proviennent des familles des prisonniers en Turquie a considérablement augmenté ces dernières semaines.

AUTRES ACTIONS DE PROTESTATION

    Pour marquer leur solidarité avec les grévistes, leurs familles ont entamé différents actions de protestation comme des grèves de la faim, des grèves sur le tas, des manifestations, etc…
    Le 9 novembre dernier à ∂stanbul, la mère d'un prisonnier de Diyarbak∑r s'est immolée par le feu dans la rue TΩrkocaµ∑ à Istanbul. Madame Han∑m Sπnmez âgée de 50 ans, avait pris part à une conférence de presse convoquée par les familles des grévistes. Elle a mis le feu à ses vêtements après s'être aspergée d'essence. Les personnes qui étaient présentes lui ont arraché ses vêtements et l'ont conduit à l'hôpital où elle a été soignée et sauvée. Elle a déclaré qu'elle n'a aucune nouvelle de son fils depuis qu'il a été transféré de la prison de Diyarbak∑r à celle d'Eskiªehir.
    Une semaine avant, le 31 octobre à Ankara, des parents de prisonniers politiques ont mené une grève sur le tas de 5 heures, à l'intérieur du Parlement. Ils exigeaient l'abolition des règlements en vigueur dans les prisons. Alors qu'ils quittaient le Parlement, leur action finie, la Police a arrêté 22 d'entre eux dans la rue. Plus tard, le 10 novembre, la Cour de Sûreté de l'Etat d'Ankara a inculpé sept d'entre eux  pour manifestation illégale.

UNE NOUVELLE FORCE PARA-MILITAIRE

    Les militaires turcs ont proposé la création d'une force territoriale de défense para-militaire similaire à la "National Guard" américaine, proposition critiquée par les partis de l'opposition.
    Le projet qui est actuellement parachevé au ministère de la défense, avait d'abord été discuté lors d'un meeting du Conseil de Sûreté National, composé des chefs de l'armée ainsi que des ministres membres du cabinet chargés des questions de défense et de sécurité.
    C'est ce conseil qui, en dépit du retour à un régime civil, détermine les lignes d'action en ce qui concerne la sûreté nationale et ce, en vertu de la constitution de 1982.
    Selon le plan élaboré, la force territoriale de défense sera composée de civils qui suivront des entraînements militaires de courte durée. Elle sera chargée de services derrière le front tels que la défense de points stratégiques importants, le fait de faciliter les communications, la protection contre les sabotages de l'ennemi et le contrôle des réfugiés et des prisonniers de guerre.
    Tous les hommes de 40 à à 60 ans et les femmes de 20 à 40 ans seront susceptibles d'être appelés tous les ans pour une durée de 7 à 10 jours pour leur service au sein de la force territoriale de défense.
    La loi prévoit également des peines de prison allant de 6 mois à 2 ans, ainsi que des amendes d'au moins 50.000 LT pour ceux qui refuseraient de remplir leurs obligations au sein de cette force.
    Lorsque tous les détails de la proposition seront arrêtés, le plan sera soumis au vote du Parlement.
    L'ancien Premier ministre Demirel a réagi violemment à l'idée d'une nouvelle force para-militaire. Il a déclaré: "Une armée de 800.000 hommes ne suffit-elle pas? Les gens sont forcés de faire face à des responsabilités supplémentaires. Il n'y a pas de raisons d'imposer de telles responsabilités aux civils, alors que l'armée turque est la 5ème plus importante au monde".
    Le rédacteur de Cumhuriyet  Uµur Mumcu, a exprimé l'opinion de beaucoup de gens lorsqu'il a écrit au sujet du département contre-guérilla qui fonctionnait sous la direction du Quartier général de l'état major dans les années '70. A cette époque, on a repproché aux membres de ce département d'avoir torturé des intellectuels sympathisants de gauche.
    Le Département contre-guérilla a joué un rôle sinistre dans la préparation au coup d'Etat de 1980 en se livrant à la violence politique et en protégeant les gens d'extrême-droite, les Loups Gris, il a mené le pays à l'instabilité, qui a servi de prétexte au coup d'Etat militaire. (Voir: Black Book on the miliatry "Democracy" in Turkey, Info-TΩrk, 1986, Bruxelles).
    Mumcu a écrit les lignes suivantes: "Les unités para-militaires pourraient-elles envisager aujourd'hui d'être utilisées comme force politique lorsque les tensions augmenteront? Ou bien, un jour, les civiles de ces unités para-militaires s'éloigneront de leur tâche originelle pour des motifs politiques et deviendront l'aile armée d'un certain parti politique ou d'une organisation? Nous avons eu de mauvaises expériences dans le passé. C'est pour cela qu'aujourd'hui nous sommes aussi prudents".

La gendarmerie sous les ordres de l'armée
    Le 12 octobre 1988, à la frontière méridionale turco-irako-syrienne, les forces terrestres ont commencé à prendre le relais des unités de gendarmerie.
    Le Quartier général de l'état-major turc avait décidé de confier la sécurité dans la zone frontière à l'armée à la place de la gendarmerie nationale qui est principalement responsable de la sécurité interne dans les zones rurales.
    La Brigade Frontalière stationnée à Gaziantep est la première unité de gendarmerie à avoir été transférée sous le commandement de la Force terrestre.
    Des  officiers des quartiers généraux militaires d'Ankara ont déclaré que les unités de Van et de Mardin allaient être prochainement transférées dans la force terrestres.

Le Gouvernement s'incline devant les militaires
    Pour la première fois dans l'histoire turque récente, le gouvernement a annoncé des restrictions dans le budget de la défense, mais quelques jours après il a dû céder suite aux pressions des chefs de l'Armée.
    Le quartier général de l'état major turc avait demandé au gouvernement de lui allouer une somme totale de 4.258 milliards de LT, soit 2,1 milliards de dollars, pour le prochain budget de la défense. Durant l'année fiscale en cours, 2.399 milliards de LT, soit 1,23 milliards de dollars, ont été alloués à la défense nationale.
    Le Gouvernement a annoncé que, dans le but de réduire sévèrement les dépenses pour obtenir une inflation de seulement 20% en 1992, il n'allouera que 3.500 milliards LT, soit 1,8% milliards de dollars à la défense.
    Après l'annonce de la diminution du budget de la défense, le Général Necip Torumtay, chef de l'Etat major turc a rencontré ∏zal et a expliqué au premier ministre que le plan du gouvernement pourrait entraîner certains risques pour la  sécurité nationale.
    Sous la pression de l'Armée, le premier ministre a accepté d'allouer 3.883 milliards de LT soit 2,04 milliards de dollars au prochain budget de la défense.

Etat d'urgence étendu
    L'assemblé Nationale a voté l'extension de l'état d'urgence dans 8 provinces orientales pour une durée de 4 mois à partir du 19 novembre. L'Assemblée a également décidé de lever l'état d'urgence dans la province d'∂stanbul.

Les Putschistes accusés au Parlement
    La controverse autour du coup d'état militaire du 12 septembre 1980 a été ranimée par une motion déposé, au du Parlement, demandant l'introduction d'une résolution qui aurait pour but d'ouvrir un débat à ce sujet.
    Les députés sociaux-démocrates qui sont à l'origine de la proposition, ont critiqué sévèrement le Général Kenan Evren ainsi que l'armée, en qualifiant le régime qu'ils ont mis en place de "régime fasciste".
    Mahmut Aln∑ak, auteur de la motion et député SHP de la province orientale de Kars, a déclaré lors d'un meeting du groupe parlementaire SHP que le coup d'état fasciste du 12 septembre 1980 a eu lieu pour permettre aux cercles dirigeants turcs d'exploiter plus vite la population. Il a estimé que la question devrait faire l'objet d'un débat de l'Assemblée nationale.
    Hasan Fehmi GΩneª, ancien ministre de l'intérieur a déclaré que ceux qui sont à l'origine du coup d'état voulaient une escalade de la terreur en Turquie.
    Un autre député de gauche, Ekin Dikmen a dit que le 12 septembre est le résultat de l'action des USA et de leurs sympathisans en Turquie. "Ils ont provoqué la terreur et l'ont utilisée comme prétexte pour la prise de pouvoir des militaires. Le 12 septembre n'a pas été provoqué par la violence, cette dernière a été organisée pour justifier le coup d'Etat.
    Les attaques contre le Général Evren, "Président de la République" et contre la prise de pouvoir des militaires ont provoqué une réaction violente du premier ministre ∏zal qui a déclaré que les gens se cachent derrière leur immunité parlementaire pour insulter le président.
    Aln∑ak a lancé un défi à ∏zal en déclarant qu'il n'était pas effrayé par la levée éventuelle de son immunité par le Parlement.
    Un autre député de gauche Mehmet Ali Eren, s'est alors demandé pourquoi le Général Evren a évité une enquête judiciaire grâce à l'article 15 de la constitution s'il est tellement certain de la justesse de ses actes et tous ses déclarations.
    L'article  15 de la constitution interdit toute poursuite contre l'administration militaire en raison des accès qu'elle a commis entre 1980 et 1983.
    Cependant, le leader du SHP, Erdal InπnΩ a estimé qu'une discussion à l'Assemblée nationale sur le coup d'état du  12 septembre n'était pas appropriée. Il a également déclaré que ceux qui ont commis des crimes ou des injustices en Turquie devront tôt ou tard rendre des comptes et qu'en provoquant ce genre de discussion (sur le coup d'état) il faut faire attention de ne pas nuire aux institutions sociales de base du pays. Après son intervention, il est probable que la motion va être abandonnée momentanément.

Nouvel Appel d'Amnesty International
    Amnesty international a publié en novembre 1988 un nouveau rapport détaillé sur les droit de l'homme en Turquie et sur la fa•on dont ils y sont systématiquement et brutalement violés.
    Après avoir fourni de nombreux exemples de cette violation, Amnesty International conclut son rapport de la fa•on suivante:
    "Huit ans après le coup d'état militaire et 5 ans après que le gouvernement civil soit arrivé au pouvoir, il semble encore, peu disposé à prendre les mesures élémentaires nécessaires au respect des droits de l'homme.
    "La Constitution, le Code Pénal et un certain nombre de lois continuent à prévoir de lourdes peines de prison pour les prisonniers de conscience.
    "Un amendement a été proposé qui pourrait réduire le nombre des prévenus et la durée des peines. Cependant il ne mettra pas fin à l'emprisonnement des activistes politiques et religieux ni ne leur permettra d'exprimer librement leurs opinions.
    "La Loi Martiale a été levée en 1987 mais les cours militaires fonctionnent toujours. Les cours de Sûreté de l'Etat appliquent les règlements légaux institués par les cours militaires qui violent les standards internationaux par un procès équitable.
    "Des milliers d'allégations de torture n'ont pas encore été vérifiées. Des accusations récentes et fréquentes ont été niées de fa•on peu convaincante.
    "Des gens continuent à être condamnés à mort sur base de preuves et d'aveux obtenus sous la torture. Depuis octobre 1984, il n'y a plus eu d'exécutions et on a déposé des amendements au Code Pénal susceptible de réduire le nombre de délits punis par la peine capitale. Cependant seule l'abolition totale pourra garantir qu'il n'y aura plus de nouvelles exécutions.
    "Amnesty International a lancé un appel au Gouvernement turc pour qu'il prenne les mesures suivantes dans le but de protéger les droits de l'homme.
    "1. L'amendement de la constitution, du Code Pénal, ainsi que des lois qui autorisent l'emprisonnement de prisonniers de conscience;
    "2. L'arrêt des procès de civils par des cours militaires. Ainsi que le remplacement des Cours de Sûreté de l'Etat ou l'assurance qu'elles respecteront à l'avenir les standards internationaux pour un procès équitable;
    "- L'assurance que les prévenus ont suffisamment de temps et de facilités pour préparer leur défense;
    "- Accorder le droit aux détenus de consulter leurs avocats en privé;
    "- Juger les détenus dans un délai raisonnable ou les relâcher;
    "3. Prendre des mesures effectives pour empêcher les tortures. Les plus urgentes sont:
    "- accorder aux détenus un accès immédiat à leurs avocats, docteurs et parents;
    "- prendre des mesures effectives pour prévenir l'emploi de dépositions obtenues sous la torture;
    "- signaler clairement aux forces de sécurité qu'en aucun cas la torture ne sera tolérée;
    "- créer un corps indépendant chargé de la supervision des interrogatoires menés par les forces de sécurité, ainsi que de la vérification des allégations de torture.
    "4. Abolir la peine de mort en pratique ainsi que dans la législation.
    "- commuer toute les peines capitales déjà prononcées;
    "- amender la législation turque concernée;
    "- ratifier le sixième Protocole de la Convention Européenne de Protection des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, qui abolit la peine de mort en temps de paix."

Un bourreau militaire abattu
    Le 22 octobre dernier, l'ancien commandant de la sécurité de la prison de Diyarbak∑r, qui lorsqu'il y était, était décrite par les groupes de défense des droits de l'homme comme la plus inhumaine au monde, a été abattu par des inconnus qui ont clamé qu'ils exécutaient son châtiment.
    Le major Esat Oktay Y∑ld∑ran a été abattu à ∂stanbul par deux hommes sous les yeux de sa femme et de son plus jeune fils. Les tireurs se sont échappés dans deux voitures différentes.
    Des inconnus ont appelé les bureaux locaux des journaux et ont déclaré que Y∑ld∑ran "a été puni par le Parti Ouvrier du Kurdistan (PKK) pour les crimes qu'il a commis à Diyarbak∑r".
    Lorsqu'il était en poste à la prison, Y∑ld∑ran a été accusé de torturer des prisonniers et un grand nombre d'avocats s'en étaient plaints auprès des procureurs militaires locaux. Mais aucune enquête n'avait été effectuée.
    Le Gouvernement reconnait que 32 détenus sont morts à la prison de Diyarbak∑r entre 1981 et 1984, mais des sources non officielles estiment ce nombre à 67, il s'agit du chiffre le plus important de toutes les prisons turques. Selon le rapport d'Helsinki Watch,  plusieurs personnes se sont immolées par le feu pour éviter d'autres tortures. D'autres dénoncent les pratiques inhumaines dont les prisonniers font l'objet ainsi le cas d'un prisonnier qu'on a obligé à manger un rat vivant ou un autre qu'on a mis dans une fosse septique et qui a dû ingurgiter des excréments et boire de l'urine. La  plupart des prisonniers, jusqu'en 1984 étaient des Kurdes accusés d'activités séparatistes.
Nurettin Y∑lmaz, député du parti au pouvoir: Parti de la Mère Patrie (ANAP), qui purgeait une peine de prison en 1981 pour activité séparatiste kurde a déclaré: "Je connais cet homme. Qui parmi les détenus de Diyarbak∑r ne le connait pas? Il était le principal responsable des tortures à la prison de Diyarbak∑r."
    Ahmet TΩrk député du SHP, parti d'opposition le plus important, a été relâché de cette prison seulement deux semaines avant les élections nationales de novembre 1987, et a déclaré qu'il a été torturé par Y∑ld∑ran. Il a raconté qu'un jour "lorsque nous revenions du Tribunal, Y∑ld∑ran m'a accusé de saluer un autre prisonnier qu'il avait isolé. Il a ordonné aux soldats de me battre avec des matraques. Après cela, je n'ai pas pu coucher sur mon lit pendant deux semaines".
    Le quartier général de l'état major turc a fait une déclaration au sujet de cette exécution dans laquelle il présente Y∑ld∑ran comme un "officier loyal et fidèle aux principes d'AtatΩrk".
    Quelques jours après, le 6 novembre, la police a annoncé qu'elle avait découvert par hasard, lors d'une enquête sur un cambriolage, un autre complot ayant pour but l'assassinat du Général Recep  ErgΩn.
    ErgΩn qui est actuellement le vice-président du parti au pouvoir ANAP, était le commandant de la Loi Martiale à Ankara sous le régime militaire.

Arrestation d'observateurs étrangers
    L'arrestation de quatre Grecs qui se livraient à une manifestation à l'intérieur de la salle d'audience du tribunal militaire d'Ankara le 4 novembre dernier, constitue un nouveau point de friction entre la Grèce et la Turquie.
    Les quatres Grecs faisaient partie d'un groupe de 24 personnes, comprenant également huit citoyens ouest-allemandes. Ils ont commencé à crier des slogans et à brandir des pancartes s'élevant contre les procès politiques en Turquie pendant la suspension de l'audience lors d'un procès à la Prison militaire de Mamak. La cour militaire traitait du cas de 714 membres de l'organisation de gauche Dev-Yol.
    Les manifestants avaient écrit des slogans tels que : "Liberté pour les prisonniers Politiques", "Amnistie Générale, "Dev-Yol", en turc et en grec sur des banderoles qu'ils déployaient. Des soldats les ont tenus à l'écart ainsi que des reporters étrangers qui étaient à proximité, puis ils les ont expulsé de la salle d'audience.
    Le lendemain, douze Grecs et huit Allemands de l'Ouest ont été envoyés en trois groupes à ∂stanbul. De là, il ont été expulsés vers la Grèce et la RFA, tandis que quatre autres Grecs étaient détenus au quartier général de la police.
    L'événement a pris une dimension internationale quand les citoyens grecs de retour à Athènes ont déclaré qu'ils avaient été maltraités par la police turque et que cet incident prouve que la Turque n'est pas une démocratie.
    Des manifestations d'étudiants ont lieu devant les missions diplomatiques turques à Athènes ainsi que dans les ville de Komotini et de Khanra.
    La Turquie a également violé l'article 36 de la Convention de Vienne de 1963 quand la police a refusé de laisser le représentant de l'Ambassade de Grèce visiter les quatre hommes mis en état d'arrestation. En effet, il stipule que les membres des missions diplomatiques doivent immédiatement avoir accès à leurs compatriotes détenus en prison.
    Le 7 novembre, les représentants de l'OCDE à Ankara ont été convoqué par le ministre des affaires étrangères qui leur a signifié que la manifestation était un complot contre la Turquie.
    Le lendemain, les quatre Grecs ont été transférés sous bonne garde du quartier général de la police à l'immeuble de la Cour de Sûreté de l'Etat où un groupe de 4O personnes de nationalité grecque et en grande partie composé de parents et d'amis des détenus les attendaient en criant "Eleftheria" ce qui signifie "liberté" en grec. Après leur interrogatoire, les quatre Grecs ont été arrêtés et envoyés au Pénitencier d'Etat d'Ankara.
    D'autre part, après l'audience du 14 octobre 1988, lors du procès de Yaµc∑ et Sarg∑n, deux dirigeants du Parti Communiste unifié de Turquie (TBKP), la police a agressé un groupe de sympathisants qui manifestaient ainsi que des journalistes qui suivaient le procès. Ainsi, 23 personnes ont été mises en état d'arrestation et ont été relâchées après une semaine. A leur sortie, elles ont tenu une conférence de presse et ont déclaré avoir été torturées au poste de police.

Quatre innocents assassinés par la police
    Le 7 octobre dernier, la police d'∂stanbul, outre-passant ses droits, a ouvert le feu sur une voiture à Tuzla, et a tué ses quatre occupants.
    Le 5 octobre, la police avait été avertie par un correspondant anonyme que des évadés de la prison de K∑rªehir allait se rendre à ∂stanbul à bord d'une voiture immatriculée à RFA. Metin GΩney, chef du département politique de la police d'∂stanbul a donné par radio l'ordre d'arrêter la voiture. Sur ce, la police a tendu une embuscade à la voiture et un nombre indéterminé de coup de feu a été tiré.
    Les policiers ont déclaré que les quatre hommes appartenaient à l'organisation d'extrême-gauche TKP/ML (Parti communiste de Turquie/Marxiste-léniniste) et à sa branche armée TIKKO (Armée de libération des Travailleurs et des Paysans) et que les premiers coups sont partis de la voiture.
    Lorsque la presse a examiné la question, il est apparu que seulement une des victimes avait un casier judiciaire alors qu'il y avait très peu d'informations sur les trois autres.
    Neufs avocats, représentants les familles des victimes ont déposé une plainte au bureau du Procureur, qui dit en substance: "Il était possible de les capturer vivants. La police aurait pu tirer sur les pneus pour arrêter la voiture. Il y a tout lieu de croire que la Police avait pour but de les supprimer".
    Des parents et des amis des victimes ont manifesté silencieusement en portant leurs portraits devant la morgue de la ville où les corps avaient été déposés.
    Suite aux attaques de la presse, les 16 policiers qui ont pris part à l'opération de Tuzla, ont été mis en accusation le 17 octobre. Le procureur a requis 56 ans de prison pour chacun après les avoir accusé d'avoir commis un massacre.
    D'autre part, le 24 octobre, la police a annoncé l'arrestation de 9 membres présumés de l'Armée de Libération du Kurdistan Septentional en Turquie (TKKKO) à ∂stanbul, mais 3 des détenus ont été relâchés quatre jours après, sur ordre du procureur.

Un maire kurde condamné à 22 ans
    Le 12 octobre, le procès du groupe kurde, ∏zgΩrlΩk Yolu (la voie de la liberté) s'est terminé par la condamnation de 27 prévenus à des peines de prison de plus de 15 ans. Lors du même procès, la Cour de la Martiale de Diyarbak∑r a condamné l'ancien maire de Diyarbak∑r Mehdi Zana, à 2 peines différentes: la 1ère, de 15 ans pour être membre de ce groupe, la 2ème de 7 ans et 6 mois pour être en possession d'une arme à feu sans port d'arme.
    Le 25 octobre, la même Cour a jugé Mehdi Zana dans un autre procès où il était accusé d'avoir fait une déclaration en faveur du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK).
    Pour l'instant, Mehdi Zana est à la prison d'Eskiªehir.
    Le 14 octobre, la Cour de Sûreté de l'Etat d'∂stanbul a condamné 7 membres du PKK à des peines de prison de plus de 12 ans pour avoir approvisionné des unités de guérillas.
    Le 6 octobre, un nouveau procès s'est ouvert contre 11 membres présumés du PKK à la Cour de Sûreté de l'Etat de Diyarbak∑r.

Les autres procès politiques
    Le 2 octobre, le Procureur civil a entamé des poursuites judiciaires contre l'Association des Droits de l'Homme de Turquie (IHD) et contre ses dirigeants. Le Procureur a requis 3 ans d'emprisonnement pour Nevzat Helvac∑ et 10 autres membres de l'administration de l'Association, ainsi que l'interdiction de l'organisation. Il se sont accusés d'activités politiques car, ils ont demandé l'amnistie générale et abolition de la peine de mort.
    Le 6 octobre, la Cour de Sûreté de l'Etat d'∂zmir a condamné 3 journalistes du mensuel Yeni †πzΩm,  MΩjdat Yant, Leyla BΩyΩkdaµ et Recep GΩler, à 18 mois de prison chacun pour avoir dirigé une manifestation le premier Mai.
    A Ankara, le 11 octobre la la Cour de Sûreté de l'Etat a condamné 3 membres présumés du Dev-Yol à 10 mois de prison chacun.

Des intellectuels arrêtés au milieu de la nuit
    Le 25 octobre à minuit, Halit †elenk, juriste connu pour ses défenses de prisonniers politiques et Muzaffer Erdost, éditeur de gauche ont été arrêtés à leur domicile par la police.
    Le frère d'Erdost, qui était aussi l'éditeur a été battu à mort à la prison de Mamak en 1982.
    L'arrestation de ces deux intellectuels très influents a provoqué une certaine agitation du côté de l'opposition.
    Nusret Demiral, Procureur à la Cour de Sûreté de l'Etat d'Ankara a déclaré que les deux hommes faisaient de la propagande communiste en publiant des articles dans un magazine mensuel d'Ankara.
    †elenk et Erdost ont été relâchés 18 heures après leur arrestation après que le juge qui les a interrogé ait jugé qu'il ne s'agissait que de critique légitime.
    Onur Kumbarac∑baª∑, président du group SHP au Parlement a déclaré que la fa•on d'agir de la police et du procureur était "une honte pour un pays où la justice et la loi devraient prévaloir".

27 éditeurs et journalistes en prison
    Le quotidien Cumhuriyet  du 10 octobre 1988 a publié une liste remise à jour des éditeurs en prison au 8 mai 1988. Les éditeurs suivants totalisent à eux tous une peine de prison de 2.242 ans
    Veli Y∑lmaz (Halk∑n Kurtuluªu):  748 ans et 6 mois.
    Alaaddin ∫ahin (Halk∑n Yolu):  130 ans.
    Candemir ∏zler (Savaª Yolu):  23 ans et 10 mois.
    Erhan Tuskan (∂lerici Yurtsever Gen•lik):  123 ans.
    Bektaª Erdoµan (Kitle):  36 ans.
    ∂rfan Aª∑k (Partizan): 17 ans.
    Feyzullah ∏zer (Kitle):  17 ans et 6 mois.
    HΩseyin Ulgen (Gen• Sosyalist):  12 ans et 3mois.
    Mehmet ºzgen (Baµ∑ms∑z TΩrkiye et Devrimci Militan):  41 ans.
    Nevzat Acan (Halk∑n Kurtuluªu):  21 ans et 7 mois.
    Ali Rabus (Birlik Yolu):  18 ans.
    Fuat AkyΩrek (Saµl∑k•∑n∑n Sesi):  10 ans et 8 mois.
    Mustafa †olak (∏zgΩrlΩk):  9 ans et 3 mois.
    Galip Demircan (Halk∑n Kurtuluªu):  15 ans.
    Ersan Sar∑kaya (GΩney):  7 ans et 6 mois.
    Osman Taª (Halk∑n Kurtuluªu):  661 ans et 2  mois.
    Fikret Ulusoydan (Halk∑n Sesi):  66 ans.
    Metre Dalg∑n (Halk∑n Birliµi):  30 ans.
    Muhittin Gπktaª (K∑v∑lc∑m):  7 ans et 6 mois.
    Remzi KΩ•Ωkertan (Devrimci Proletarya):  7 ans et 6  mois.
    Mustafa TΩtΩncΩbaª∑ ( Halk∑n Sesi):  42 ans.
    Hac∑ Ali ∏zer (Emeµin Birliµi):  peine de prison non déterminé.
   
    Le périodique du Comité de Protection des Journalistes aux USA, le CPJ Update, a mentionné dans son numéro d'octobre, le nom de 5 autres éditeurs détenus dans les prisons turques. Leur peine de prison s'élève, au total, à 244 ans et 4 mois.
    Mehmet †oban (Iktibas):  7 ans et 6 mois.
    GΩzel Aslaner (Halk∑n Birliµi):  146 ans.
    Resat GΩvenilir (Emeµin Birliµi):   29  ans et 9 mois.
    Ayhan Erkan (K∑v∑lc∑m):  25 ans.
    ∂lker Demir (Kitle):  36 ans.

∂nculpations d'intellectuels
    Madame Fatma Yaz∑c∑, éditeur responsable du mensuel 2000'e Doµru,  a été condamnée à 2 reprises en Octobre.
    Le 5 octobre, la Cour de Sûreté de l'Etat d'∂stanbul l'a condamnée à 3 ans de prison pour "avoir fait de la propagande qui nuit aux sentiments nationaux". Le tribunal a mis le magazine en cause pour avoir publié une annonce commémorant la mort d'un membre présumé du PKK. La Cour a également décidé de la saisie des numéros du magazine dans lesquels cette annonce apparaît.
    Le 27 octobre, madame Yaz∑c∑ a été condamnée à nouveau par la même cour à une peine de prison de 7 ans pour avoir publié un article sur les droits culturels du Peuple Kurde.
    Le 20 octobre, deux journalistes de l'hebdomadaire Tempo,  Engin Ardi• et Yetkin ∂scen ont été condamnés à 21 mois de prison chacun par une cour criminelle d'∂stanbul pour avoir écrit un article critiquant le Premier Ministre ∏zal.
    Le 26 octobre, une cour criminelle d'∂stanbul a condamné deux journalistes du quotidien Cumhuriyet,  CΩneyt ArcayΩrek et Okay Gπnensin, à 5 mois et 25 jours de prison. ∂ls sont accusés d'avoir insulté le Premier Ministre. Plus tard, la Cour a commué les peines de prison en amendes d'un montant de 81.066 LT ou 46 dollars.
    Le 27 octobre, la Cour de la Loi Martiale de Diyarbak∑r a condamné le poète Y∑lmaz Odabaª∑ à 8 ans de prison pour son appartenance au groupe illégal kurde ∏zgΩrlΩk Yolu (la voie de la liberté).
    Le 30 octobre, le Procureur de la Cour de Sûreté de l'Etat d'Ankara a ouvert une procédure judiciaire contre le journaliste Erbil Tuªalp. ∂l est accusé d'avoir dévoilé la déposition de l'auteur présumé de l'attentat perpétré contre ∏zal. ∂l risque une peine de prison de 13 ans.

Le professeur KΩ•Ωk torturé
    Le numéro du 17 octobre du quotidien Cumhuriyet  rapporte que le professeur Yal•∑n KΩ•Ωk a été torturé à Gaziantep les 18 et 19 septembre derniers après avoir été mis en état d'arrestation.
    Le Professeur, âgé de 50 ans, est un des chercheurs les plus éminents de Turquie. ∂l a été licencié de son poste à l'université au lendemain du coup d'Etat en raison de ses opinion de gauche. Jusqu'à maintenant, il a déjà écrit 18 livres dont un a été confisqué. ∂l est également l'auteur en chef du mensuel Toplumsal Kurtuluª.  Il a été arrêté à plusieurs reprises en raison de ses livres et ses articles.
    Récemment, il s'est rendu à Gaziantep pour participer à une conférence, organisée par le mensuel Emek DΩnyas∑.  Après la conférence, il a été emmené au poste de police pour y être interrogé. KΩ•Ωk a déclaré que durant son interrogatoire les policiers l'ont battu et insulté jusqu'à l'aube.

Une chorégraphe inquiétée
    L'ancienne chorégraphe d'origine bulgare de l'Opéra d'Etat d'∂stanbul, Sonia Aslan, a eu des problèmes lorsqu'elle s'est plainte il y a 3 ans de danseurs turcs au directeur de ballet ouest allemand, Peter Von Dyk.
    Lorsque deux danseurs ne se sont pas présentés à la répétition, Aslan a dit au metteur en scène, qui s'énervait, que les chose vont comme •a en Turquie.
    Lorsqu'une ballerine s'est plainte de ses commentaires une procédure a été ouverte contre elle pour insulte à la Nation turque. La procédure est toujours en cours.
    A l'audience du 8 novembre, Aslan a déclaré que le metteur en scène voulait renvoyer les danseurs. Elle a donc voulu éviter cela en disant que les règles dans son pays étaient différentes.

Des publications confisquées
    En octobre 1988, la Cour de Sûreté de l'Etat d'∂stanbul a ordonné la confiscation de 5 revues mensuelles, Yeni †πzΩm, GΩneªe †aµr∑, DΩnyaya Bak∑ª, GπrΩª  et Yeni Demokrasi.
    A Ankara, la Cour de Sûreté de l'Etat a ordonné la confiscation du mensuel Toplumsal Kurtuluª  du livre de Losovsky au sujet " des Syndicats".
    Le 3 octobre, 4 cassettes produites par trois chanteurs connus, Ahmet Kaya, Selda et ZΩlfΩ Livaneli ont été interdites par le gouverneur de la province de Bilecik.
    D'autre part, le ministre de la culture et du tourisme a édité, le 11 octobre, de nouveaux règlements régissant la sélection des chansons folkloriques à enregistrer. Selon les nouvelles règles, les paroles d'une chanson folklorique ne doivent pas être contraires à la constitution, aux lois et à la moralité. De plus, un comité consultatif sera chargé de vérifier les paroles et la musique des chansons folkloriques et d'opérer les modifications nécessaires avant leur enregistrement et leur impression.

Manifestation des médecins
    Près de 2.500 médecins ont entamé une marche de protestation à Ankara, le 23 octobre dernier. ∂ls brandissaient des pancartes avec des slogans comme "Vous ne pouvez pas faire des économies au détriment de la santé" et "La santé publique ne peut pas être protégée que par les sacrifices des médecins".
    La manifestation a été organisée à la suite d'une accusation portée contre les docteurs par le Ministre ∂mren Aykut, qui leur a reproché leur cupidité.
    Les médecins qui sont employés dans les hôpitaux d'Etat se plaignent des salaires trop bas, des horaires trop lourds et de la politique d'économie du gouvernement dans le domaine de la santé publique.

Pas de rétablissement de nationalité
    Le 31 octobre dernier, le Premier Ministre a déclaré dans une note adressée à une Comission Parlementaire qu'il est impossible de rétablir les droits politiques inhérents à la nationalité turque dans le chef des 14.000 Turcs qui vivent en exil volontaire à l'extérieur du pays.
    Le projet de loi visant à abroger l'autorité du gouvernement en matière de suppression des droits politiques de citoyens turcs, déposé par Erdal Kalkan, député du parti Social Démocrate Populiste (SHP), a été rejeté par la majorité gouvernementale au Parlement.

Pas de citoyenneté pour Naz∑m Hikmet
    Le 24 octobre, la Cour Administrative Suprême a déclaré irrecevable la procédure entamée par les avocats de la famille du poète Naz∑m Hikmet visant à obtenir le rétablissement de ses droits de citoyen, abrogés par un décret gouvernementale de 1951.
    Le poète est mort il y a 25 ans à Moscou. Après avoir purgé une peine de 13 ans de prison "pour avoir incité l'armée à la rébellion", Naz∑m Hikmet a été  relâché en 1950 suite à une amnistie générale dûe à un changement de gouvernement.
    Après sa mise en liberté, il a re•u une convocation des autorités militaires lui demandant de se présenter pour accomplir le service obligatoire. A l'époque, Hikmet souffrait d'une maladie cardiaque, il a décidé de quitter la Turquie car il craignait de ne pas survivre à cet ordre.
    Naz∑m Hikmet est le poète turc le plus connu, ses œuvres ont été traduites dans plusieurs langues.
    Les avocats de sa famille ont déclaré que s'ils n'ont toujours pas eu gain decause après avoir épuisé tous les recours possible en Turquie, ils saisiront la Commission Européenne des Droits de l'Homme de  Strasbourg.

Victime de l''interdiction de voyager
    Un journaliste de 46 ans a été victime de l'interdiction de voyager à l'extérieur du pays.
    Ismail Hakk∑ ∂nan•, qui souffrait d'une maladie cardiaque, avait été invité à suivre un traitement en RFA par Amnesty International et le Sénat Ouest-allemand. Mais tous ses efforts pour obtenir un passeport ont échoué car son nom se trouvait sur la liste des suspects.
    Avant le coup d'Etat militaire de 1980, ∂nan• était l'éditeur du quotidien Politika.  Malgré que les procureurs aient ouvert deux procédures contre lui pour motifs politiques, les tribunaux l'avaient acquitté.

Les conditions de vie des réfugiés kurdes
    Les conditions climatiques de plus en plus mauvaises qui sévissent dans les provinces orientales et méridionales ont obligé les autorités turques à déplacer les réfugiés kurdes irakiens de leurs camps de toile temporaires vers des endroits plus protégés. Selon des sources officielles, 91 kurdes sont morts dans 5 camps.
    Des 54.000 réfugiés qui avaient quitté l'Irak en août, 3.000 ont déjà quitté la Turquie pour l'Irak ou l'Iran. L'Iran devrait encore en accepter 3 à 4.000 autres.
    D'autre part, les autorités turques les ont interrogé au sujet de leurs projets. Près de 27.000 ont déclaré vouloir rester en Turquie et 25.000 autres voudraient émigré vers 12 pays différents tels que la France, la Suède, les Pays-Bas et l'Iran. Mais aucun de ces pays, à l'exception de l'Iran, ne semble disposé à les accueillir.
    On pourrait éventuellement enseigner les bases du turc aux Kurdes irakiens afin qu'ils puissent travailler et passer ainsi de l'état de consommateur à celui de producteur.
    En plus des problèmes d'emploi et de logement, des milliers d'enfants kurdes vivant dans les camps doivent faire face à des problèmes scolaires très importants. Aucun d'eux ne parle turc donc ne peut étudier dans les écoles turques.
    Le Gouvernement a déclaré qu'il allait prendre des mesures dans le but d'assimiler ces enfants à la culture turque puisque l'éducation en kurde est contraire à sa politique qui nie son existence.
    Le 14 octobre dernier, le député social-démocrate, Cumhur Keskin a annoncé que 13 réfugiés kurdes qui avaient été arrêté le 17 septembre après un incident au camp de YΩksekova, ont été torturés lors de leur interrogatoire au poste de police.

Visite étrange dans l'Est de l'ambassadeur des USA
    Robert Strausz-Hupé, ambassadeur des E.U. à Ankara, a visité récemment le Kurdistan Turc. Son déplacement a suscité une controverse en Turquie. Le 6 novembre, il s'est rendu à Van, accompagné desa femme et de 4 autres diplomates américains. Le gouverneur de cette province a déclaré que l'ambassadeur et sa femme désiraient visiter les sites historiques et naturels de la région.
    La déplacement de l'ambassadeurs des E.U. a alimenté la polémique au sujet d'un projet de construction d'un village de vacance pour des retraités américains dans la région de Van.
    Les jours suivants, le groupe d'Américains s'est rendu à Hakkari, Diyarbak∑r et Mardin pour visiter les camps de toile où les réfugiés kurdes irakiens ont été placés depuis qu'ils sont entrés en Turquie en août dernier. A Mardin, ils ont visité une Eglise Assyrienne: Day Zul Zafaran.
   
Action de protestation des étudiants
    Le 24 octobre s'est ouvert à Ankara la 1ère conférence national de la jeunesse qui avait pour but de trouver une solution aux problèmes affrontés par les jeunes Turcs. Cela a provoqué des manifestations estudiantines et des violences policières.
    Parmi les 473 délégués qui avaient été invités à la conférence, seuls 99 d'entre eux représentaient réellement les jeunes. Les autres étaient des ministres, des professeurs d'université, des inspecteurs de l'éducation nationale et des bureaucrates.
    Il n'y avait que 6 représentants élus par les étudiants des universités. Les 30 autres avaient été choisis par les recteurs.
    Lors de l'élection présidium du conseil, les délégués étudiants ont quitté la salle de conférence en criant de slogans de protestation, après avoir reconnu parmi le public des policiers en civil.
    A l'extérieur de la Salle de Conférence, des équipes de police anti-émeute, des policiers en civil et des détectives les ont attaqué. Les étudiants qui ont essayé de commencer une grève sur le tas ont été matraqués, ont re•u des coup de pied et des coups de poing avant d'être embarqués.

Le drame des immigrés de retour
    On estime le nombre de Turcs vivant en Allemagne à 1,5 million. Beaucoup d'entre eux s'y sont rendus dans les années '60 alors que l'Allemagne offrait des emplois.
    Fatigués des discriminations dont ils ont fait l'objet dès la hausse du chômage et atteints du mal du pays, ils retournent en Turquie, souvent accompagnés de leurs enfants qui jouissent d'une scolarité secondaire.
    Mais souvent, en plus des capitaux et des acquis linguistiques , ils ramènent avec eux un ensemble d'attitudes sociales et intellectuelles qui entrent en conflit avec la société musulmane conservatrice turque.
    Le conflit apparaît surtout chez les jeunes qui sont souvent nés en Allemagne et qui y ont étudié. Leurs séjours en Turquie étaient courts et rares, et s'ils parlaient turc à la maison, cela ne suffit pas à les préparer pour remplir une fonction au sein de la société turque.
    Paradoxalement, beaucoup de gens reviennent en Turquie car ils craignent que leurs enfants ne soient victimes de discriminations, par rapport aux Allemands, quand ils postulent pour entrer à l'université ou pour un emploi.
    Mais ce qu'ils ont retrouvé, c'est-à-dire une culture nationaliste rigoureuse leur est impossible à assimiler.
    Lorsqu'en 1984, le gouvernement allemand a commencé à encourager activement le "retour au pays", les écoles turques ont été submergées par des milliers d'étudiants qui ne maîtrisaient pas suffisamment la langue et qui n'avaient que des notions très vagues de l'Histoire de Turquie.
    Le ministère de l'Education Nationale a mis en pratique par un programme d'orientation d'une durée d'un mois dans le but de les aider. Le programme était centré sur l'enseignement de l'hymne national sur la connaissance du drapeau truc et sur l'explication des bases de l'histoire nationale comme par exemple qui était Mustafa Kemal AtatΩrk, fondateur de la République.
    Ce programme d'orientation a été un échec total, en 1986, il a été abandonné et à sa place, le ministère de l'Education a commencé à envoyer ces enfants dans des écoles séparées où l'enseignement se fait principalement en allemand.
    Bien que cela leur ait permis de faire de meilleurs études secondaires, cela ne les a pas aidé sur le plan de l'intégration sociale ni lors des examens d'entrée à l'université où la compétition est très importante: il n'y a que 150.000 places pour 600.000 candidats.
    Le numéro du 29 octobre 1988 du Dateline Turkey  a rapporté les paroles de Mlle Nuran ∏zbemar: "Nous sommes venus en Turquie il y a 3 ans parce que c'est notre patrie, mais nous avons compris que ce n'est pas vrai. Je ne peux pas dire que je suis allemande, mais je sais maintenant que je suis non plus pas turque".
    Ses parents sont déjà retourné en Allemagne car ils ne trouvaient pas de travail en Turquie. Elle compte y retourner dès qu'elle aura fini ses études universitaires.