SITUATION DES DROITS DE L'HOMME EN 1993
La situation des droits de l'homme s'est encore
aggravée avec l'augmentation du nombre des décès et des abus en 1993,
d'après l'Association des Droits de l'Homme (IHD).
D'après un rapport détaillé publié par le IHD en
1993, les attaques perpétrées par les forces de sécurité contre des
groupes et des individus, ainsi que les exécutions extrajudiciaires
(assassinats par les forces de sécurité sans un procès légal), se sont
intensifiées, surtout à Istanbul.
Le rapport souligne que 1993 a été une année
négative du point de vue de la démocratisation et du respect des droits
de l'homme et que "jour après jour, la Turquie sombre dans les
ténèbres."
Voici les principaux points du rapport de l'IHD sur
l'année 1993:
° Dans le Sud-est 3.750 civils ont été tués et 1.490
blessés au cours des affrontements, qui se poursuivent encore
aujourd'hui, entre les forces de sécurité et la guérilla kurde.
° Au cours des opérations de sécurité menées dans le
sud-est de la Turquie, les forces de sécurité ont évacué un total de
874 villages et hameaux. Certains ont été incendiés pour empêcher le
retour des villageois.
° 510 personnes ont été victimes de "meurtres
mystérieux", référence généralement utilisée pour expliquer les
assassinats politiques dans lesquels le tueur a pris la fuite.
° 21 personnes auraient été torturées jusqu'à la
mort par la police et 29 autres ont disparu pendant leur détention.
° Six journalistes, dont trois travaillaient pour
Özgür Gündem, ont été assassinés. Huit distributeurs de journaux ont
subi le même sort.
° Un total de 51 journalistes a été emprisonné en
1993, tandis qu'en 1992-93, 260 journaux et périodiques ont été saisis.
° La publication de quelque 33 livres a été
interdite et toutes les copies ont été confisquées.
° Les journalistes et écrivains ont été condamnés à
un total et 231 ans de prison et ont reçu des amendes pour un total de
21.000 milliards de TL.
° Quatre partis politiques ont été fermés et des
actions sont préparées pour en fermer deux autres. Les partis disparus
étaient identifiés comme le Parti Socialiste (SP), le Parti
Travailliste du Peuple (HEP), le Parti de la Turquie Socialiste (STP)
et le Parti de la Liberté et la Démocratie (ÖZDEP). Le Parti d'Unité
Socialiste (SBP) et le Parti de la Démocratie (DEP) risquent maintenant
la fermeture. Un total de 48 associations ont été fermées en 1993.
° Un total de 323 personnes se sont adressées à la
Fondation des Droits de l'Homme de Turquie (TIHV) pour recevoir un
traitement médical et prendre part à des programmes de réhabilitation
pour les victimes de la torture. 115 l'on fait Ankara, 107 à Izmir et
101 à Istanbul.
° Le débat sur la peine capitale a été abordé en
1993 et la peine de mort a été ratifiée par l'Assemblée Nationale.
Le Secrétaire Général de l'IHD, Hüsnü Öndül, a émis
l'appréciation suivante sur l'actuelle position du gouvernement à
propos de la violation des droits de l'homme:
"L'actuelle coalition gouvernementale a promis
qu'elle modifierait tous les articles de la Constitution promulgués
depuis le 12 septembre. Bien que ces partis soient toujours au
gouvernement, ils n'ont encore modifié aucun des articles fondamentaux.
Le gouvernement a non seulement négligé le thème des droits de l'homme,
il les a violés et a ignoré les principes démocratiques. La Turquie se
transforme progressivement en une prison pour les penseurs: les
écrivains, les artistes et tous ceux qui expriment leurs opinions. Une
nation qui réprime ses auteurs, ses journalistes et ses hommes de
science en raison de leurs croyances ou opinions ne peut être
considérée démocratique.
"Ceux qui détiennent le pouvoir veulent imposer au
pays une démocratie militariste. Ils veulent que le gouvernement et la
bureaucratie militaire donne les ordres et que le public y obéisse. Les
étudiants qui veulent former des associations, les travailleurs et
fonctionnaires publics qui veulent établir des syndicats, et les hommes
politiques qui veulent créer leurs propres partis politiques doivent
faire face à la torture, la détention et la fermeture de leurs
institutions."
54 JOURNALISTES EN PRISON
L'Association des Droits de l'Homme de Turquie (IHD)
a annoncé le 25 janvier 1994 que 54 journalistes et écrivains étaient
en prison dans ce pays pour avoir violé la loi dans leurs reportages et
leurs livres.
Le Secrétaire Général de l'IHD, Hüsnü Öndül, a
souligné dans une déclaration sur ce thème que tous les détenus étaient
emprisonnés pour avoir violé la Loi Anti-Terrorisme, et que le "délit
d'opinion ne pouvait être accepté en tant que tel."
Öndül a ajouté que son association serait solidaire
avec les écrivains en prison, et que si un écrivain était emprisonné
dans un pays, on ne peut pas dire que ce dernier soit libre.
Selon un récent rapport publié par l'IHD, les
écrivains et journalistes repris ci¬après sont actuellement dans les
prisons turques:
Osman Günes (Emek Dünyasi), Hidir Ates, (Odak), Zana
Sezen (Azadi), Omer Agin (writer), Tuncay Atmaca (Emek), Hacay Yilmaz
(Emek), Hidir Batusal (Özgür Gelecek), Naile Tuncer (Devrimci
Proleterya), Erdogan Yasar Kopan (Devrimci Mucadele), Kemal Bilget
(Nevroz), Edip Polat (writer), Ismail Besikci (writer), Günay Aslan
(writer), Ergun Gümgüm (Hevdam), Fethiye Peksen (Devrimci Cözüm),
Hikmet Cetin (Deng ), Mustafa Cubuk (Emek magazine), Kenan Kalyon
(Toplumsal Dayanisma), Nabi Barut (Zagros) Süleyman Bakirman (Tavir),
Ahmet Zeki Okcuoglu (writer), Gülperi Türüz (Alinteri ), Hidir Guyildar
(Gercek), Deniz Gezen (Mücadele), Cemal Uc (Mücadele ), Hüseyin Solak
(Mücadele ), Veysel Sahin (Mücadele), Ahmet Ibili (Mücadele), Necati
Önder (Mücadele), Murat Kirsoy (Mücadele ), Ozcan Yildiz (Mücadele),
Gurbetelli Ersöz (Özgür Gündem), Ali Riza Halis (Özgür Gündem), Serdar
Karakoc (Özgür Gündem), Riza Zingal (Özgür Gündem), Serdar Caycioglu
(Özgür Gündem), Namik Alkan (Özgür Gündem), Oguzhan Ogruk (Özgür
Gündem), Sadi Salik (Özgür Gündem), Nizamettin Karaciger (Özgür
Gündem), Mehmet Sah Yildiz (Özgür Gündem), Hasan Özgün (Özgür Gündem),
M. Sirin Koc, (Özgür Gündem), Cengiz Tas (Özgür Gündem), Manaf Avci
(Özgür Gündem), Bulent Derik (Özgür Gündem), Özgür Aslan (Özgür
Gündem), Gulay Celik (Özgür Gündem), Ahmet Caldiran (Özgür Gündem),
Ercan Aslan (Özgür Gündem), Mustafa Yildiz, Kemal Sahin (Özgür Gündem),
Erkan Aydin (Özgür Gündem) and Sabri Bölek (Özgür Gündem).
Ces écrivains et journalistes sont emprisonnés à
Elazig, Istanbul, Adiyaman, Igdir, Ankara, Izmir, Tunceli, Malatya,
Bursa, Izmir, Diyarbakir, Erzurum, Urla et Mugla.
31 JOURNALISTES ASSASSINES DEPUIS 1992
Helsinki Watch est consterné par les continuels
assassinats de journalistes et de marchands de journaux dans le sud-est
de la Turquie. En l'espace de deux ans dix-sept journalistes et
quatorze distributeurs ont été tuées, portant l'horrible chiffre des
assassinats a trente-et-un. La plupart des victimes écrivaient pour des
journaux de gauche et/ou pro-kurdes ou simplement les distribuaient.
Helsinki Watch a commencé à contrôler le respect des
droits de l'homme en Turquie en 1982. Depuis novembre 1991, date à
laquelle l'actuel gouvernement est arrivé au pouvoir, le nombre de
journalistes tués est plus de trois fois supérieur à celui enregistré
au cours des 10 années précédentes.
(Cinq journalistes ont été tués entre 1988 et 1990:
Mevlut Isik, Türkiye, 1988; Sami Basaran, Gazete, 1989; Kamil Basaran,
Gazete, 1989; Cetin Emec, Hürriyet, 1990; Turan Dursun, 2000e Dogru,
1990).
La plupart des journalistes et des distributeurs ont
été tués dans le sud-est de la Turquie, théâtre d'une vicieuse guerre
de guérilla de plus en plus intense entre les forces de sécurité et le
PKK.
On retrouve le même schéma dans de nombreux
assassinats: un journaliste ou un distributeur est abattu d'une balle
dans la nuque, méthode utilisée par les escadrons de la mort et par les
assaillants inconnus. Bon nombre de ces victimes auraient été tuées par
une force contre-guérilla associée avec les forces de sécurité turques.
D'autres auraient été tuées par le PKK ou par le Hizbullah, un groupe
fondamentaliste islamique.
Helsinki Watch est choqué de constater que personne
n'a été inculpé pour ces assassinats. A quelques exceptions près, le
gouvernement turc n'a même pas ouvert une enquête.
En décembre 1992, Helsinki Watch publiait une lettre
d'information intitulée: "Turquie: Censure par l'assassinat - Onze
journalistes et un distributeur de journaux assassinés depuis février."
Depuis ce temps-là, nous avons eu écho de
l'assassinat de trois autres distributeurs en 1992. Le nombre total de
journalistes et distributeurs assassinés au cours de cette année
s'élève donc à 15. En 1993 il était également de 15 - cinq journalistes
et dix distributeurs. Un autre journaliste a déjà été tué en janvier
1994.
Mort en 1994. Le dernier journaliste assassiné est:
° RUHICAN TUL, un jeune journaliste qui écrivait
pour un journal de langue anglaise, The Turkish Daily News. La mort de
Tul ne suit pas le schéma traditionnel. Apparemment il n'était pas
visé, mais fut l'une des trois personnes assassinées dans les attentats
subis par les bus qui quittaient Ankara le 14 janvier 1994. Le PKK a
exigé des responsabilités pour ces attaques.
Morts de journalistes en 1993. Cinq journalistes ont
été tués en 1993:
UGUR MUMCU. Le 24 janvier, Ugur Mumcu, responsable
d'une section dans le quotidien Cumhuriyet, un important journal, est
tué dans sa voiture par une bombe qui explose quelques secondes après
le démarrage. Mumcu était un célèbre reporter qui avait publié des
articles critiques sur le fondamentalisme islamique, la corruption du
gouvernement, le trafic de drogue et la violence terroriste. Le Djihad
islamique, ainsi que deux organisations inconnues auparavant, ont exigé
des responsabilités pour cet attentat.
° KEMAL KILIC. Le 18 février 1993, Kemal Kilic est
abattu alors qu'il rentrait chez lui après son travail. Kilic marchait
vers le village de Kulunce lorsque quatre personnes lui ont tendu une
embuscade. Un gardien de nuit a vu l'assassinat. Kilic était le
représentant à Urfa d'Özgür Gündem et un membre fondateur de la branche
de l'IHD d'Urfa. Le 18 janvier Kilic avait été arrêté pour avoir fait
des déclarations dans lesquelles il accusait le gouverneur d'Urfa et la
police d'ignorer les obstacles qui s'opposaient à la distribution
d'Özgür Gündem.
° IHSAN KARAKUS. Le 13 mars 1993, Ihsan Karakus,
propriétaire du journal local Silvan, est assassiné. Karakus fut
attaqué par deux inconnus lorsqu'il rentrait chez lui.
° FERHAT TEPE. Le 28 juillet 1993, le correspondant
d'Özgür Gündem à Bitlis, Ferhat Tepe, de 19 ans, est kidnappé par des
inconnus. Un appel anonyme au nom des Brigades de Vengeance Ottomane
Turque aurait demandé des responsabilités à sa famille. Le corps
contusionné de Tepe a été retrouvé à Elazig le 3 août 1993.
° MUZAFFER AKKUS. Le 20 septembre 1993, un
correspondant à temps partiel du journal Milliyet, Muzaffer Akkus de 34
ans, est assassiné. Il aurait été tué par des membres du PKK dans un
barrage routier près de Bingöl.
Morts de marchands de journaux en 1993. Dix
marchands ou distributeurs de journaux ont été tués dans le sud-est de
la Turquie en 1993. La plupart d'entre eux avaient été menacés pour
qu'ils ne vendent ou distribuent les journaux Yeni Ülke et Özgür
Gündem:
° ORHAN KARAGAAR, de 30 ans, le 19 janvier à Van.
° TEGMEN DEMIR, le 5 juin à Batman.
° YUSUF KARAÜZÜM, de 27 ans, le 28 août à Diyarbakir.
° ZÜLKÜF AKKAYA, le 28 septembre à Diyarbakir.
° YALCIN YASA, de 12 ans, le 10 octobre à Diyarbakir.
° KADIR IPEKSÜMER, en novembre à Urfa.
° ADNAN ISIK, de 30 ans, le 27 novembre à Van.
° MUSU DURU, le 3 décembre à Batman.
° YAHYA CILLIGÖZ, le 3 décembre à Batman.
° ZUHAT TEPE, de 27 ans le 14 décembre à Iskenderun.
Morts de vendeurs en 1992 qui n'avaient pas été
rapportées. Helsinki Watch a appris la mort de trois autres vendeurs en
1992:
° KEMAL EKINCI, de 35 ans, le 16 décembre 1992 à
Diyarbakir.
° LOKMAN GÜNDÜZ, de 30 ans, le 16 décembre 1992 à
Nusaybin.
° MEHMET PENCE, de 14 ans, en décembre 1992 à Ergani.
Un journaliste disparu. AYSEL MALKAC, un reporter
d'Özgür Gündem, a été enlevé en plein jour le 7 août 1993, et n'a
jamais été revu.
Un journaliste paralysé. BURHAN KARADENIZ, un
reporter d'Özgür Gündem, est toujours paralysé après avoir subi une
attaque en août 1992.
Le gouvernement turc n'a fait aucun effort sérieux
pour éclaircir ces assassinats et inculper les responsables. Il s'est
montré extrêmement insolidaire avec la situation critique que vivent
les reporters. Le 11 août 1992, le Premier Ministre Demirel affirmait
que les personnes assassinées n'étaient pas de véritables journalistes
mais des militants déguisés qui s'entre-tuent." Le 4 janvier 1993, le
ministre d'État, Mehmet Battal, déclarait que qu'Izzet Kezer était le
seul journaliste assassiné dans le Sud-est.
Helsinki Watch reste très préoccupé par ce qui
semble être une campagne destinée à réduire la presse au silence devant
les événements qui se produisent dans le sud-est de la Turquie. Nous
exigeons du gouvernement qu'il prenne immédiatement des mesures pour
inculper les responsables dans le respect total de la loi. Helsinki
Watch a demandé au gouvernement des États-Unis et à la communauté
internationale d'examiner ces cas et de presser la Turquie pour qu'elle
éclaircisse ces assassinats et poursuive les coupables.
1.000 VICTIMES DE LA LOI ANTI-TERREUR
Selon le Turkish Daily News du 26 janvier 1994,
quelque 1.000 personnes ont déjà été condamnées en vertu de la loi
Anti-Terreur, No. 3.713.
Cette loi fut approuvée par le Parlement le 12 avril
1991 et fut très vite appliquée à de nombreux rédacteurs et écrivains
accusés de diffuser de la propagande à travers les médias.
L'Article 8 de cette loi, traitant de la propagande
contre la souveraineté de l'Etat, est celui qui préoccupe les
écrivains, les éditeurs et les journalistes. L'Article dit ceci:
"Quel que soit l'idée, la méthode ou le but, il ne
sera toléré aucune propagande écrite ou orale, aucun meeting,
manifestation ou marche mettant en danger la souveraineté de la
République Turque. `Ceux qui violent cette règle écoperont d'une peine
allant de deux à cinq ans de prison et d'une amende de 50 à 100
millions de TL."
La moitié de l'amende sera imposée aux rédacteurs
responsables et ceux-ci peuvent recevoir des peines de prison allant de
six mois à deux ans.
Il a été révélé que 54 journalistes et écrivains
sont jugés ou se trouvent en prison en vertu de cet article.
MEDIA
LA GUERRE SALE COUTE 8,2 MILLIARDS DE DOLLARS
Le Ministre d'État, Ali Sevki Erek, a annoncé le 20
janvier que la Turquie dépenserait cette année 164 billions de lires
(8,2 milliards de $) "pour combattre les rebelles kurdes. Le montant
prévu équivaut à un cinquième du budget turc pour 1994, soit 820
billions de lires (41 milliards de dollars).
Selon les responsables, la Turquie a dépensé quelque
7 milliards de dollars l'année dernière dans la lutte contre le PKK.
Les activités de la guérilla du PKK auraient infligé l'année dernière
des pertes d'un montant d'un milliard et demi de dollars à l'industrie
du tourisme turc.
D'autre part, le Ministre de la Justice, Seyfi
Oktay, déclarait le 13 février que le nombre de "terroristes" arrêtés
et emprisonnés était déjà de 6.500 et que très bientôt il serait de
10.000.
Oktay a ajouté que, avant la formation de l'actuelle
coalition gouvernementale, ce chiffre se situait entre 800 et 900, et
que maintenant, selon le rapport du Bureau de l'État-major, chaque jour
étaient arrêtés 22 "terroristes."
PROLONGATION DU SERVICE MILITAIRE
Le Conseil des Ministres a révélé le 6 janvier un
nouveau décret qui prolonge de cinq mois le service militaire
obligatoire. Celui-ci avait déjà été adopté le 20 décembre 1993 sous la
pression de l'Armée.
Suite à cette décision, pas moins de 40.000 soldats
dans le Sud-est qui auraient terminé leur service en mars devront
rester encore cinq mois dans les unités militaires qui combattent la
guérilla kurde. Des sources militaires affirment que les trois
prochains mois seront cruciaux pour la Turquie et que l'Armée a besoin
de tous les commandos formés dont elle dispose pour combattre les
séparatistes.
Le Turkish Daily News du 8 janvier cite certaines
sources militaires:
"La Turquie, en conditions normales, avait neuf divisions dans région
du sud-est, ce qui suppose entre 90.000 et 95.000 soldats. Actuellement
nous disposons de 160.000 soldats dans cette zone. Nous avions besoin
d'effectifs et nous avons porté le nombre de divisions à 52. Si la
décision de prolonger le service militaire n'avait pas été prise,
quelque 40.000 soldats formés auraient quitté l'armée. Il n'est pas
facile d'instruire des commandos de combattants."
Le ministre de la Défense, Mehmet Gölhan, avait
annoncé précédemment qu'il y avait 250.000 tire-au-flanc en Turquie
-presque la moitié de tous les effectifs de l'Armée.
Soumis aux critiques de son propre parti pour avoir
pris une mesure qui pourrait lui faire perdre le soutien électoral, le
Premier Ministre Ciller a manifesté que la décision avait été prise
suite à une requête du Chef d'Etat-major. "L'affaire nous a été soumise
lors du Conseil de Sécurité Nationale comme une demande expresse",
a-t-elle déclaré.
Le quotidien Aydinlik du 8 janvier rapportait que
les ministres avaient signé la décision sans même la lire. "Les soldats
et leurs familles montrent leur mécontentement envers cette décision.
Un groupe de soldats à Istanbul a déclaré a un reporter qu'ils allaient
déserter. Des soldats stationnés au Commandement de la Division
Cartographique d'Ankara ont fracassé leurs chaises. De nombreuses
familles ont téléphoné aux sièges du DYP et du SHP pour protester
contre cette décision", rapporte le journal.
Le même jour, Özgür Gündem expliquait que la
réaction du public à cette décision était dictée par la colère et
citait les déclarations du vice-président du DEP, Remzi Kartal, où il
disait que la décision mettait en évidence l'option militaire prise par
l'État.
LE PKK DEMANDE DES ZONES LIBEREES
Le leader du PKK, Abdullah Öcalan, dans une
déclaration publiée par le mensuel du parti Serxwebun en novembre,
annonçait que l'organisation tenterait bientôt de créer au moins deux
zones libérées dans le Sud-est.
Selon Öcalan, dans certaines zones le PKK est
capable de mener une simple attaque avec pas moins de 1.000 combattants.
Faisant un parallèle entre la nouvelle stratégie de
guérilla et les expériences vécues en Chine et au Vietnam, Öcalan a
précisé que la région de Botan, composée de quatre parties séparées,
était arrivée à un point où elle pouvait devenir une Zone Rouge, en
d'autres mots une zone libérée.
Le PKK, après le 4e Congrès célébré en 1990, a
divisé ses zones d'action dans le Sud-est en neuf régions séparées
auxquelles il fait également allusion comme eyalet (province). Ces
régions sont les provinces de Botan (Nord) et Behdinan (sud et nord de
l'Irak), Garzan, Amed, Mardin, Dersim, Middle (Orta) et de Serhad
(région du nord).
Dans ses ordres, Öcalan soutient que selon la nature
de la zone de combat, qu'elle soit forte (Rouge), ne devienne forte que
maintenant (Mélangé) ou soit faible (Blanc), différentes tactiques
devraient être appliquées.
GREVES DE LA FAIM DANS LES PRISONS
La vague de grèves de la faim lancée par les
prisonniers politiques de diverses prisons turques arrivait le 12
janvier dernier à son 40e jour.
Les grèves de la faim convoquées dans les prisons de
Sagmalcilar (Istanbul), Kayseri, Yozgat, Cankiri, Nevsehir, Erzurum et
Ankara sont suivies par les prisonniers du PKK et d'autres
organisations illégales comme la Gauche Révolutionnaire (Dev-Sol), le
Parti Communiste Révolutionnaire de Turquie (TDKP) et L'Armée de
Libération des Travailleurs-Paysans de Turquie (TIKKO).
Les détenus auraient demandé l'abolition des mesures
disciplinaires contre les grèves de la faim et le droit de suivre des
diètes médicales avec approvisionnement d'aliments provenant de
l'extérieur. Ils demandent également que les prisonniers masculins et
féminins, qui se retrouvent en prison pour les mêmes délits, puissent
se rencontrer une fois par semaine.
Quelque 40 membres des familles des détenus
séjournent dans les locaux de l'IHD à Ankara où ils resteront pendant
toute la durée de la grève de la faim en solidarité avec les détenus.
MAUVAIS TRAITEMENTS AUX ETRANGERS
Amnesty International affirmait à la fin du mois de
janvier de 1994 que les étrangers arrêtés en Turquie subissaient de
mauvais traitements et demandait au gouvernement de Ciller de prendre
des mesures urgentes pour éviter la répétition d'incidents similaires à
l'avenir.
La police turque avait rapporté récemment que des
étrangers entrés illégalement en Turquie avaient été appréhendés à
Istanbul et envoyés vers des centres de détention de Sivas, capitale
provinciale de l'Anatolie Centrale.
AI affirme avoir reçu des centaines de rapports
concernant des étrangers, la plupart en provenance de l'Afrique et les
Indes Occidentales, arrêtés pour violation à la loi sur l'immigration.
Ceux-ci ont été tenus au secret pendant de longues périodes dans des
conditions inhumaines et dégradantes dans plusieurs postes de police à
Istanbul. Une personne détenue dans la Deuxième Branche du quartier
général de la police d'Istanbul en octobre 1993 aurait rapporté à AI
qu'il avait vu des dizaines de prisonniers dans des conditions
abominables, privés d'aliments adéquats et d'installations sanitaires.
Certains d'entre eux étaient malades et n'avaient pas reçu d'assistance
médicale.
Des personnes détenues au poste de police d'Akasaray
en novembre ont rapporté qu'ils avaient parlé à six Africains dans une
cellule adjacente, où ils se trouvaient depuis 15 jours, dans un espace
d'une surface estimée de 2,4 mètres. Selon eux, les conditions
sanitaires étaient extrêmement pauvres et il n'y avait pas de toilettes.
Amnesty souligne qu'aucun des détenus sur lesquels
elle a reçu des informations n'était accusé d'un délit quelconque et
n'avait eu accès à aucun avocat. Elle ajoute que le principal facteur
considéré pour la détention des étrangers était la couleur de leur peau.
Le 3 octobre, Amnesty révélait qu'un groupe
d'environ 150 de ces prisonniers avaient été emmenés dans un camp de
réfugiés des NU dans la province de Sivas et ensuite dans un ancien
camp de réfugiés à Silopi, à proximité de la frontière avec le nord de
l'Irak, province de Sirnak. Un certain nombre de prisonniers se sont
évadés et actuellement quelque 80 autres sont toujours dans le camp de
Silopi, vivant dans des tentes sans chauffage ou aliments adéquats (si
ce n'est ce que les prisonniers peuvent acheter par eux-mêmes).
Selon les rapports, Francos Marcos, un citoyen
kenyan, a été écrasé par un véhicule blindé intervenant dans une
dispute animée mais non-violente entre les forces de sécurité et les
détenus.
Amnesty a demandé aux autorités turques d'ouvrir une
enquête urgente sur la situation de ces détenus étrangers et de
s'assurer qu'ils ne sont pas victimes d'un traitement cruel, inhumain
ou dégradant, ou de conditions qui pourraient mettre leur santé en
danger.
LE HOLDING FINANCIER DE L'ARMEE
Alors que les soldats mobilisés sont poussés vers la
mort en échange d'un salaire dérisoire, les officiers de l'Armée
s'enrichissent grâce à leur participation dans des affaires au travers
d'un gigantesque holding financier.
Le salaire mensuel des soldats turcs de deuxième
classe est de 37.000 TL. Autrement dit, ils reçoivent moins de 2
dollars par mois pour "protéger leur pays, risquant constamment leur
vie. Le salaire mensuel d'un caporal est de 57.000 TL et celui d'un
sergent de 75.000 TL.
Les officiers de l'Armée, eux, ont les plus hauts
salaires des services publics. Par ailleurs ils sont tous actionnaires
du Fonds d'Assistance Mutuelle de l'Armée (OYAK).
Fondé le 3 janvier 1961, sept mois seulement après
l'intervention militaire de 1960, l'OYAK s'est développé d'une manière
incroyablement rapide au cours des trois dernières décennies,
s'étendant de plus en plus après chacun des deux coups-d'Etat: 1971 et
1980. Les officiers, qui versent 10% de leur salaire à cette
institution, bénéficient de nombreux avantages économiques et sociaux
assurés par l'OYAK. Au moment de leur pension les officiers reçoivent
une part importante des profits accumulés par le fonds.
Actuellement, l'OYAK emploie une main-d'oeuvre de
près de 25.000 personnes et figure parmi les 500 plus grandes
entreprises de Turquie. Elle est également actionnaire de huit grandes
compagnies.
L'actuel chiffre d'affaires d'OYAK serait de 75
billions de TL (5 milliards de dollars). Ce chiffre d'affaires est
exempté de taxes. En d'autres termes, l'OYAK ne paie pas d'impôts sur
ses activités commerciales. Il est actif dans le secteur automoteur,
dans l'industrie du ciment, dans l'industrie pétrochimique, dans le
secteur de l'alimentation, de l'électronique, de la chimie agricole,
des industries des services et dans le secteur bancaire.
Ce géant financier est dirigé par un conseil composé
de hauts fonctionnaires.
Dans les derniers jours de 1993, l'OYAK, en
compagnie de ses plus petits porteurs turcs, a acheté une énorme part
de la Türk-Boston Bank.
Certains affirment qu'avec cette opération, l'armée
turque est la deuxième armée du monde, avec celle du Guatemala, à
posséder une banque.
Bien que des sous-officiers paient chaque mois une
contribution à l'OYAK, ils ne sont pas autorisés à en être membres et
ne peuvent bénéficier des avantages économiques et sociaux de leurs
supérieurs.
E.U. : PERSISTANCE DE LA TORTURE EN TURQUIE
Malgré les promesses de réforme du gouvernement
turc, la torture et l'utilisation abusive de la force se sont
poursuivies en 1993, ainsi le rapportait le Département d'Etat
Américain le 31 janvier 1994.
"Le principal problème que connaît la Turquie dans
le domaine des droits de l'homme en 1993 reste la torture de personnes
en détention pendant les périodes où elles sont maintenues au secret et
les interrogatoires", précise le rapport sur les droits de l'homme dans
le monde.
D'après ce rapport "les forces de sécurité ont abusé
de la force contre les civils dans les provinces du Sud-est "où le
gouvernement continue de faire face à la violence terroriste des
séparatistes du PKK. Le soulèvement kurde a amené les autorités à
limiter la liberté d'expression et d'association. Il se produit
également des disparitions et des assassinats mystérieux qui semblent
avoir des mobiles politiques."
TERREUR D'ETAT
UN MILLION DE BILLETS DE BANQUE EN PERSPECTIVE
Le 20 décembre, Hürriyet rapportait que quatre
chargements de billets de banque imprimés clandestinement en Allemagne
étaient en route vers la Turquie. Les camions contiennent le premier
million de billets de TL. Actuellement, la plus grande coupure en
circulation en Turquie est de 500.000 TL.
Comme les camions voyagent à travers les Balkans,
des mesures de sécurité spéciales ont été prises. Les billets
transportés ne sont pas tout à fait achevés au cas où se produirait un
hold-up pendant le voyage. L'impression est quasiment terminée mais la
coloration se fera en Turquie.
LES IMMIGRANTS TURCS N'ENVOIENT PLUS LEUR ARGENT
Les travailleurs étrangers en Allemagne envoient
moins d'argent dans leurs pays que précédemment, c'est ce que révèle un
communiqué de presse du 29 novembre 1993 de l'Ambassade Allemande.
Alors qu'en 1984, les "travailleurs étrangers" en
Allemagne avaient transféré le chiffre record de 9 milliards de DM, le
montant actuel a diminué de 2 milliards.
Les responsables pensent qu'il y a deux raisons à
cela. Les familles de nombreux travailleurs ont également émigré vers
l'Allemagne, rendant inutile le transfert d'argent. Deuxièmement, bon
nombre de ces travailleurs sont installés en Allemagne et ne veulent
pas retourner dans leurs pays d'origine. Ils dépensent donc l'argent
pour construire leurs vies en Allemagne. Les Turcs, la plus grande
collectivité de travailleurs étrangers dans ce pays ont des revenus
nets de 18 milliards de DM. Par rapport aux années précédentes, une
plus grande proportion de ces salaires est dépensée en Allemagne. Bien
que le nombre de Turcs soit passé de 498.000 en 1984 à 654.000 en 1992,
le transfert d'argent est passé de 3,6 milliards de DM en 1984 à 2,3
milliards en 1992.
Par rapport aux maisons des Allemands avec des
revenus similaires, les logis des Turcs sont mieux équipés, surtout du
point de vue des appareils électroniques. Alors que 82% des Turcs
possèdent un magnétoscope, uniquement 46% des Allemands disent en avoir
un. De même, 72% des Turcs ont un système hi-fi chez eux alors que dans
le cas des Allemands la proportion est de 68%. Pour ce qui est des
ordinateurs, 15% des Turcs et 11% des Allemands en ont un chez eux.
La plupart des Turcs veulent vivre dans leur propre
maison. Un tiers des Turcs qui vivent en Allemagne ont signé des
contrats d'épargne immobilière (contre 19% des Allemands) et quelque
45.000 ont acheté des maisons ou des appartements en Allemagne.
NOUVELLE COALITION DANS LA TRNC
Le 12 décembre 1993, les élections célébrées dans la
République Turque du Nord de Chypre ont donné lieu à la formation d'une
nouvelle coalition gouvernementale. Le Parti Démocratique (DP) soutenu
par Rauf Denktash et le Parti Turc Républicain (CTP) se partagent à
parts égales les 10 ministères du nouveau gouvernement.
Dans les élections, le DP a obtenu 15 sièges et le
CTP en a obtenu 13, mettant fin à la domination du Parti d'Unité
Nationale (UBP), qui reste le premier parti individuel avec 17 sièges.
Un quatrième parti, le Parti Social de Libération (TKP), a obtenu cinq
sièges.
Dans sa campagne, le UBP avait promis aux Chypriotes
turcs que "pas un centimètre de terre ne serait concédé au Sud et que
les Chypriotes grecs seraient autorisés à retourner dans le Nord.
La nouvelle coalition favorise un accord négocié,
comprenant de concessions territoriales, avec le Sud gréco-chypriote,
mais précise que tout accord doit comporter d'importantes garanties de
sécurité pour le Nord.
Bien que la position du Président Denktash se
rapproche plus de celle du UBP qu'il a fondé, suite à des divergences
internes avec les leaders de son parti, il a soutenu le DP aux
dernières élections.
TERRORISME D'ETAT EN JANVIER
Le 2.1, une équipe des forces de sécurité fait une
descente dans une maison du village d'Evci, à Igdir, et brise les bras
d'Ece Kuas (45 ans), mère d'un jeune recherché.
Le 2.1, à Midyat, Zekeriya Akgün est abattu par des
inconnus.
Le 3.1, trois personnes, Abdülkerim Ergun (38) à
Midyat, Resat Kilic (58) à Batman et Sinan Karga (51) à Viransehir,
sont victimes de meurtriers politiques.
Le 5.1, à Ankara, la Maison Populaire de Keciören
est fermée par ordre du gouverneur pour activités non autorisées. La
police a arrêté 18 membres de l'association.
Le 5.1, la police annonce l'arrestation de 12
militants présumés du PKK à Manisa et 12 militants présumés du Dev-Sol
à Istanbul. A Izmir, la CSE met en détention huit personnes arrêtées
auparavant par la police.
Le 5.1, à Antalya, deux jeunes femmes, Huriye Öztun
et Mülkiye Bilik, sont emprisonnées pour purger une peine de 20 mois
dont elles avaient écopé pour activités en faveur du PKK.
Le 5.1, à Cinar (Diyarbakir), le travailleur Hamza
Duran est abattu par des tireurs inconnus.
Le 8.1, après deux jours d'opérations, la police
arrête neuf membres du Syndicat des Travailleurs Publics (Genel Is) et
un membre de l'Union des Travailleurs Sanitaires (Tüm Saglik Sen).
Le 9.1, à Cizre, les forces de sécurité tirent au
hasard et assassinent trois personnes.
Le 6.1, des assaillants inconnus abattent Hisar
Demir à Adana et une personne inconnue à Mus.
Le 7.1, à Adana, Haydar Bektas et Ismail Altunbas
sont retrouvés assassinés par des tireurs inconnus. Le même jour, Metin
Demir est victime d'un assassinat politique à Batman.
Le 9.1, à Cizre, les forces de sécurité tirent au
hasard et tuent six personnes et blessent cinq autres.
Le 10.1, les forces de sécurité annoncent
l'arrestation d'un total de 30 militants présumés du PKK aux cours des
dernières opérations menées à Adana et Mersin.
Le 10.1, le représentant du DEP, Bisar Sener, et ses
fils, Vedat Sener et Zafer Sener, sont arrêtés par la police.
Le 10.1, un prêtre syriaque de 60 ans, Melki Tok,
aurait été kidnappé par des forces pro-gouvernementales dans le
district d'Idil (Sirnak).
Le 10.1, les forces de sécurité font un raid dans le
village du député du DEP à Siirt, Zübay Aydar, arrêtent 26 villageois
et incendient leurs maisons.
Le 11.1, des tireurs inconnus abattent le
syndicaliste Isa Özer et le détaillant Feyrusah Sacan à Batman. Firat
Caglar subit le même sort à Diyarbakir. Cevdet Günes, blessé deux jours
avant, meurt à l'hôpital.
Le 11.1, la branche d'Istanbul de l'Association Pir
Sultan Abdal est fermée par le gouverneur et trois de ses membres sont
arrêtés par la police.
Le 12.1, à Batman, des tireurs inconnus abattent
trois étudiants, Abdurrahman Ata, Firat Soyvural et Serif Cogöz. A
Diyarbakir, Selahattin Bicin est victime d'un crime politique.
Le 12.1, à Nusaybin, le travailleur Ekrem est abattu
par des personnes inconnues.
Le 12.1, douze paysans du village de Fistikli,
Mardin, sont torturés après qu'une équipe des forces de sécurité
attaque le village et mette le feu à plusieurs maisons.
Le 13.1, à Ankara, une manifestations de 5.000
fonctionnaires publics protestant contre une augmentation salariale
insuffisante est empêchée par la police. Pendant l'assaut des forces de
l'ordre, 30 manifestants sont blessés et 67 autres sont arrêtés.
Le 13.1, s'ouvre à la CSE d'Ankara le procès de cinq
intellectuels pour des discours prononcés pendant les Célébrations des
Droits de l'Homme en 1992. Le président de l'IHD, Akin Birdal, le
représentant de l'IHD à Izmir, Alparslan Berktay, l'ancien membre du
Parlement, Hüsnü Okcuoglu, l'avocat Ali Yildrim et le journaliste
Yalcin Kücük risquent des peines de prison allant jusqu'à cinq ans.
Le 13.1, l'ancien vice-président de l'IHD, Yaruz
Binbay, est arrêté à Van.
Le 13.1, à Diyarbakir, l'étudiant Azad Önen est
abattu et l'étudiant Serdar Kaya est tué à la hache par des inconnus.
Le 14.1, Mahmut Aslan est victime d'un meurtre
politique à Diyarbakir.
Le 15.1, à Diyarbakir, des tireurs inconnus abattent
Mehmet Metin Kaplan et Sedat Cagatay. Le même jour, Ramazan Akbulut et
Mehmet Tasan sont victimes d'un meurtre politique à Batman.
Le 15.1, à Izmir, l'avocat Ahmet Aksüt affirme que
son client, Mahmut Sahindogan, a été torturé par la police pendant son
interrogatoire.
Le 15.1, à Ankara, Oguz Aksac prétend avoir été
torturé par la police après sa détention lors d'une descente dans le
centre Ekin Arts.
Le 15.1, le maire de la ville de Tatvan, Mehmet
Özalp, est arrêté. Un commandant militaire local l'avait accusé
quelques jours auparavant de maintenir des relations avec le PKK.
Le 15.1, l'homme d'affaires Behcet Cantürk et son
chauffeur, Recep Kuzucu, sont retrouvés assassinés à Sapanca.
Le 16.1, à Izmir, l'Association des Droits et des
Libertés (Özgür-Der) est fermée par le gouverneur.
Le 16.1, à Bitlis, Kerem Gencer est kidnappé par
trois individus non identifiés. Son corps aurait été retrouvé sans vie
dans un village près de Tatvan.
Le 17.1, la police annonce l'arrestation de huit
membres présumés de l'Armée des Travailleurs et Paysans de Turquie
(TIKKO) pendant les opérations menées au cours des dix derniers jours.
Le 17.1, des tireurs non identifiés abattent Ahmet
Anis à Diyarbakir et Semsettin Ural à Nusaybin.
Le 18.1, la CSE d'Istanbul inculpe trois maires pour
leurs déclarations publiées dans le quotidien Özgür Gündem. Sükrü Calli
(maire d'Hakkari), Nazmi Balkas (Lice) et Abdullah Kaya (Kozluk)
risquent une peine de prison allant jusqu'à cinq ans pour propagande
séparatiste.
Le 18.1, à Diyarbakir, Süleyman Dün est victime d'un
meurtre politique.
Le 18.1, les forces politiques font une descente
dans une maison et abattent trois personnes.
Le 18.1, le président de l'IHD de Siirt, est arrêté
en compagnie de sa femme, sa fille et sa soeur.
Le 19.1, la police fait une descente dans un café
d'Izmir et arrête le membre de l'IHD Ahmet Gerertil.
Le 20.1, la CSE d'Istanbul condamne deux membres du
TIKKO à la peine capitale et deux autres à 36 ans de prison.
Le 20.1, à Istanbul, trois représentants
syndicalistes, Munzur Pekgülec, Faruk Beskisiz et Cem Tiryaki, ainsi
que neuf autres personnes arrêtées au cours d'une opération le 8
janvier, sont placés en détention par un tribunal.
Le 20.1, un bureau local du DEP à Ankara est détruit
par l'explosion d'une bombe et un employé, Fahrettin Aydogan, est
gravement blessé.
Le 21.1, la CSE d'Izmir condamne un défendeur du PKK
à la peine capitale, trois à la prison à vie et sept autres à trois ans
et neuf mois de prison.
Le 21.1, des tireurs inconnus abattent le libraire
Giyasettin Ugur à Batman, Abdülbaki Türk à Nusaybin et Mehmet Celik à
Diyarbakir.
Le 23.1, à Istanbul, Mme Lamia Aygün affirme que son
fils Ahmet Aygün a été torturé après son arrestation le 19 janvier.
Le 23.1, l'étudiant Cengiz Altun est victime d'un
meurtre politique à Diyarbakir.
Le 24.1, à Ankara, deux représentants locaux du
Parti des Travailleurs (IP), Mahsuni Akgus et Ali Temelci, sont arrêtés
par la police.
Le 24.1, des tireurs inconnus abattent Hüsnü Türk et
Sitki Fidan à Silvan et Fuat Tunc à Nusaybin.
Le 25.1, le procureur public introduit une action en
justice contre le président de l'IHD à Bursa, Muhammed Aydin, et six
autres personnes de l'association pour avoir violé la loi sur les
associations. Chacun d'eux risque une peine de prison d'au moins trois
mois.
Le 26.1, le président d'Izmir du Parti des
Travailleurs (IP), Ali Karsilayan, est arrêté par un tribunal pour
avoir collé des posters du parti sur les murs.
Le 26.1, il se produit de nouvelles victimes des
meurtres politiques: Eyüp Aslan et Firat Alayli à Diyarbakir, Veysi
Kirtay à Silvan et Zeynel Gülgen à Midyat.
Le 27.1, des assaillants inconnus assassinent
Abdulselam Kizmaz, Ridvan Yabanci, Arif Cicikiz et Mahmut Dogan à
Diyarbakir, et Mehmet Barlin à Urfa.
Le 28.1, le bureau de l'IHD à Izmir est
perquisitionné par la police et plusieurs publications y sont
confisquées.
Le 28.1, le bureau d'Adiyaman de Maisons du Peuple
est fermé par le gouverneur.
Le 28.1, Musa Kaya et Hatip Gundogan est victime
d'un assassinat politique à Diyarbakir.
Le 29.1, à Ankara, le bureau du DEP à Mamak est
détruit par une explosion. Le président du parti, Hatip Dicle, accuse
l'Organisation Contre-Guérilla de sabotage.
Le 30.1, l'ingénieur Mehmet Altuntas est assassiné
par des assaillants inconnus à Diyarbakir.
Le 31.1, à Diyarbakir, le Dr. Seyhmus Akin, Sevket
Demircan et Halit Pinar sont victimes d'assassinats politiques.
Le 31.1, l'étudiant universitaire G.K. affirme avoir
subi des tortures après avoir été arrêté par la police le 29 décembre
en compagnie de trois autres étudiants.
Le 31.1, la police annonce l'arrestation de 17
membres présumés de l'organisation kurde KAWA.
PRESSIONS SUR LES MÉDIAS EN JANVIER
Le 2.1, les deux dernières éditions du quotidien
Özgür Gündem ainsi que les numéros 19 et 86 des périodiques Özgür
Gelecek et Azadi sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande
séparatiste.
Le 3.1, la Cour de Cassation ratifie une sentence
contre Münir Ceylan, président du Syndicat des Travailleurs
pétrochimiques (Petrol-Is). Il avait été condamné par la CSE à 20 mois
de prison et à payer une amende de 83 millions de TL (5.187 $) pour un
article écrit pour l'hebdomadaire Yeni Ülke.
Le 3.1, deux correspondants d'Özgür Gündem, Metin
Dag à Diyarbakir et Rezzan Günes à Batman, sont arrêtés par la police.
Le 3.1, le correspondant à Antakya d'Alinteri,
Gülperi Türüz, et le lecteur Nursel Ünlüer sont arrêtés par la police
au cours d'une descente dans les locaux du magazine.
Le 4.1, la Cour de Cassation ratifie la sentence
contre le sociologue Ismail Besikci. Celle-ci était de deux ans de
prison et de 50 millions de TL (3.125 $) pour un article qu'il avait
écrit pour le magazine Yurtsever Genclik. Avec cette condamnation,
l'ensemble des sentences prononcées contre Besikci s'élève à six ans et
six mois de prison et 134 millions de TL (8.375 $) d'amende. Il est en
prison depuis novembre 1993.
Le 5.1, cinq correspondants d'Özgür Gündem arrêtés
par la police, Serap Aksu (Izmir), Ahmet Birgül (Adana), Metin Dag
(Diyarbakir), Halil Ceviz et Vehbiye Tüzün (Batman) sont remis en
liberté. Ils affirment avoir été torturés pendant leur détention.
Le 5.1, la CSE d'Istanbul condamne le rédacteur
responsable de la revue Yeni Dünya, Züleyha Sahinkaya, à douze mois de
prison et à payer une amende de 500 millions de TL (31.250 $) pour
propagande séparatiste. Dans ce même procès, l'éditeur de la revue,
Nazim Düzenli, écope d'une amende d'un million de TL (6.500 $).
Le 5.1, le correspondant à Antalya du quotidien
Aydinlik, Bayram Atasoy est poignardé par des assaillants inconnus.
Le 5.1, Burhan Coroglu, correspondant à Zonguldak du
magazine Devrim, est arrêté par la police.
Le 6.1, le Haut Collège Électoral interdit les
émissions de la télévision privée Interstar pendant cinq jours pour
avoir enfreint la Loi sur les Élections.
Le 6.1, le bureau de Van du quotidien Özgür Gündem
est perquisitionné par la police et un employé, Mesut Batur, est
arrêté. Après sa libération, Batur s'est plaint d'avoir été torturé au
poste de police.
Le 7.1, le procureur de la CSE d'Ankara introduit
une action en justice contre le célèbre auteur allemand Günter Walraff
pour avoir critiqué le tribunal qui jugeait l'affaire sur le massacre
de Sivas.
Le 7.1, deux correspondants d'Özgür Gündem, Mehmet
Sah et Sirac Koc, détenus par la police depuis un mois, sont placés en
détention par la CSE de Diyarbakir.
Le 8.1, le rédacteur du magazine Toplumsal
Dayanisma, Ese Yilmaz, est condamné par la CSE d'Istanbul à huit mois
de prison et à payer une amende de 208 millions de TL (13.000 $) pour
propagande séparatiste.
Le 8.1, à Van, neuf vendeurs du quotidien Özgür
Gündem sont arrêtés par la police.
Le 8.1, la police arrête deux journalistes du
magazine Devrim, Haluk Yurtsever et Sabri Ipekci, à Istanbul.
Le 10.1, le sociologue Ismail Besikci est condamné
par la CSE d'Istanbul à deux ans de prison et à payer une amende de 50
millions de TL (3.125 $) pour avoir fait de la propagande séparatiste
dans un article publié par l'hebdomadaire Yeni Ülke. Dans le même
procès, le tribunal condamne l'éditeur de Yeni Ülke, Serhat Bucak, à
payer une amende de 200 millions de TL (12.500 $) et le rédacteur
responsable Özkan Kilic à un an de prison et à 100 millions de TL
d'amende (6.250 $) pour avoir publié l'article de Besikci.
Le 10.1, la CSE d'Istanbul confisque le N° 253 du
quotidien Aydinlik pour propagande antimilitariste et le N° 79 du
périodique Mücadele pour apologie d'une organisation illégale.
Le 11.1, le rédacteur en chef d'Aydinlik, Ferit
Ilsever, est condamné par une cour pénale d'Istanbul à dix mois de
prison et le rédacteur responsable, Hale Soysü, à payer une amende de
1,5 millions de TL (93 $) pour insulte des Forces Armées dans un
article. Le même jour, le Correspondant à Tunceli de ce même journal,
Hidir Gülyildar, est arrêté par la police à Tunceli.
Le 11.1, la dernière édition d'Aydinlik, le N° 87 du
périodique Azadi et le N° 35 de Taraf sont confisqués par la CSE
d'Istanbul.
le 11.1, à Izmir, cinq distributeurs de la revue
Alinteri sont arrêtés par la police.
Le 12.1, le rédacteur responsable d'Özgür Gündem,
Kemal Sahin est arrêté pour propagande séparatiste. Le nombre de
rédacteurs d'Özgür Gündem arrêtés s'élève donc à quatre. Özgül Arslan,
Bülent Balta et Erkan Aydin avaient été arrêtés précédemment.
Le 12.1, le bureau de Diyarbakir d'Özgür Gündem est
perquisitionné par la police. Le correspondant en chef, Salih Tekin, et
onze autres personnes y sont arrêtés.
Le 13.1, le bureau d'Ankara du périodique Mücadele
est perquisitionné par la police et le représentant du magazine, Burhan
Kardas, est arrêté par la police.
Le 13.1, deux journalistes, Evin Güvendik de
l'Agence Ulusal Basin et Günes Gürson de Cumhuriyet, sont battus par la
police alors qu'ils couvraient une manifestation de fonctionnaires
publics à Ankara.
Le 13.1, l'avocat Ahmet Zeki Okcuoglu et l'écrivain
Ömer Agin sont emprisonnés pour purger une peine de 20 mois de prison à
laquelle ils avaient été condamnés pour divers articles publiés par le
mensuel Demokrat en 1991.
Le 13.1, le bureau principal du quotidien Sabah à
Istanbul est endommagé par l'explosion d'une grenade jetée par une
personne non identifiée.
Le 14.1, le directeur de la Maison d'Edition
Dönüsüm, Fikret Öntas, est condamné par la CSE d'Istanbul à payer une
amende de 41.666.000 TL (2.451 $) pour un livre intitulé Le
développement dans le monde et dans notre pays.
le 18.1, la CSE d'Istanbul confisque le N° 88 de
l'hebdomadaire Azadi et le N° 12 du périodique Yeni Dünya pour
propagande séparatiste.
Le 19.1, trois périodiques, le N° 27 d'Hedef, le N°
26 de Deng, et le N° 8 de Gencligin Sesi, sont confisqués par la CSE
d'Istanbul pour avoir adressé des louanges à plusieurs organisations
illégales.
Le 20.1, le sociologue Ismail Besikci est condamné
par la CSE d'Istanbul à deux ans de prison et à payer une amende de 250
millions de TL (14.705 $) pour son livre intitulé Une nation qui se
découvre: les Kurdes. Le directeur de la Maison d'Édition Yurt, Ünsal
Öztürk, est également condamné à six mois de prison et à payer 50
millions de TL (.941 $) d'amende. Besikci a été condamné pour ses
livres et articles à un total de 16 ans de prison et à payer 784
millions de TL (46.117 $) d'amende.
Le 20.1, le rédacteur en chef du quotidien Aydinlik,
Ferit Ilsever, est condamné par la Haute Cour Pénale N° 2 d'Istanbul à
dix mois de prison pour la publication de deux articles différents.
Cette même cour a également imposé au rédacteur responsable d'Aydinlik,
Hale Soysü, une peine de prison de dix mois et une amende de 1,5
millions de TL.
Le 20.1, le correspondant à Tunceli de
l'hebdomadaire Gercek, Hidir Güyildar, arrêté le 11 janvier, est placé
en détention par un tribunal.
Le 23.1, le rédacteur en chef du périodique
Alternatif, Fahrettin Dülcek, et le rédacteur responsable, Ahmet
Köksal, se plaignent d'avoir été torturés au centre de police. Ils
avaient été libérés le 18 janvier.
Le 24.1, le procureur militaire du 4e corps d'armée
introduit une action en justice contre deux journalistes, Mehmet Ali
Birand et Halim Abanoz, pour avoir interviewé plusieurs soldats dans le
cadre d'un programme de télévision. Ils sont accusés de propagande
contre le service militaire.
Le 24.1, le N° 20 du périodique Özgür Gelecek est
confisqué par la CSE d'Istanbul pour avoir publié un article sur les
déserteurs.
le 25.1, à Van, un distributeur d'Özgür Gündem,
Ismail Erörs, affirme avoir été torturé et harcelé sexuellement suite à
son arrestation le 19 janvier.
Le 25.1, la Cour de Cassation ratifie la sentence
contre trois journalistes du périodique Medya Günesi. Le rédacteur en
chef, Osman Aytar a été condamné par la CSE d'Istanbul à deux ans de
prison et à payer une amende de 100 millions de TL (5.882 $). Le
rédacteur Salih Bal a écopé de cinq mois de prison et de 50 millions de
TL (2.941 $) d'amende et l'éditeur Cemal Özcelik a reçu une amende de
100 millions de TL (5.882 $).
Le 25.1, le N° 89 de l'hebdomadaire Azadi, le N° 16
du périodique Yeni Demokrat et le N° 6 de Liseli Arkadas sont
confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste et avoir
fait l'apologie des organisations illégales.
Le 26.1, un caricaturiste d'Özgür Gündem, Halil
Incesu, est condamné par la Haute Cour Pénale N° 2 d'Istanbul à dix
mois de prison pour une caricature sur l'assassinat du député du DEP,
Mehmet Sincar. Le rédacteur du quotidien, Besim Döner, a reçu la même
peine mais celle-ci a été commuée en amende.
Le 6.1, les directeurs des maisons d'édition Sorun
et Melsa, respectivement Sirri Öztürk et Ilyas Burak, sont condamnés
par la CSE d'Istanbul à cinq mois de prison et à payer une amende de
41.666.000 (2.451 $) chacun pour une publication commune: Une
anthologie de poèmes des prisons 1989-1990.
Le 26.1, la correspondante à Igdir d'Özgür Gündem,
Meral Tikiz, est arrêtée en compagnie de cinq enfants alors qu'elle
préparait un reportage. Les enfants, relâchés ultérieurement, ont
déclaré que Meral Tikiz avait été torturé pendant son interrogatoire au
poste de gendarmerie.
Le 26.1, les dernières éditions des périodiques
Genclik Yildiz, Dogru Secenek et Direnis sont confisqués par la CSE
d'Istanbul pour propagande séparatiste et antimilitariste.
Le 26.1, deux journalistes de télévision, Kutlu
Esendemir et Levent Öztürk, sont kidnappés par les guérillas du PKK
alors qu'ils se dirigeaient vers Sirnak pour y faire un reportage.
Le 27.1, le bureau d'Ankara d'Özgür Gündem est
détruit par l'explosion d'une bombe que des inconnus avaient placée.
Le 27.1, l'éditeur et le rédacteur du périodique
Berhem, Asli Yalcinoglu, se voit imposer par la CSE d'Ankara une amende
de 208 millions de TL (12.235 $) pour propagande séparatiste.
Le 28.1, le rédacteur responsable d'Özgür Gündem,
Ömer Özdemir, est mis en détention par la CSE d'Istanbul.
Le 30.1, la CSE d'Istanbul confisque le N° 4 du
périodique Hewdem, le N° 26 de Genclik et le N° 107 d'Emegin Bayragi
pour propagande séparatiste.
Le 31.1, la CSE d'Istanbul entame le procès de
Mazhar Günbat, rédacteur de l'hebdomadaire Welat. Comme Günbat refuse
de répondre aux questions dans une autre langue que le kurde, le procès
à été reporté en attendant de trouver un interprète kurde. Le
journaliste risque une peine de prison de cinq ans pour propagande
séparatiste.
Le 31.1, le N° 23 du périodique Devrimci est
confisqué par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.