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A non-government information service on Turkey
Un service d'information non-gouvernemental sur la Turquie


215

18e année - N°215
Septembre 1994
38 rue des Eburons - 1000 Bruxelles
Tél: (32-2) 215 35 76 - Fax: (32-2) 215 58 60
 Rédacteur en chef: Dogan Özgüden - Editrice responsable: Inci Tugsavul
 

LES FEMMES DE TURQUIE

Au pouvoir                              En détention

Une de ces deux femmes est née en 1961 à Diyarbakir, ville plongée dans la pauvreté. L'autre a vu le jour en 1946 à Istanbul, capitale de la bourgeoisie et du monde des affaires. L'une est kurde, l'autre est turque. Aussi bien l'une que l'autre sont citoyennes de la République turque. Toutes deux ont été à l'école primaire, mais celle de Diyarbakir a dû abandonner comme la plupart des autres femmes kurdes. Celle d'Istanbul a poursuivi ses études. Elle a terminé l'école primaire, l'école secondaire et a obtenu un diplôme universitaire au Robert Collège. Celle de Diyarbakir a passé ses examens par elle-même. A l'âge de 15 ans elle s'est mariée et de ce mariage sont nés deux enfants. Celle d'Istanbul a étudié l'anglais, ainsi que la littérature turque. La citoyenne de Diyarbakir n'a appris que le kurde. Ce n'est qu'à l'âge de 20 ans, lorsque son mari a écopé d'une peine de prison de 14 ans, qu'elle a éprouvé le besoin d'apprendre le turc. Celle d'Istanbul s'est inscrite à la faculté de sciences économiques de l'Université de Bogaziçi et a obtenu un diplôme en économie à l'université de New Hampshire; elle a terminé son doctorat à l'université du Connecticut et a présenté sa thèse post-doctorale à l'université de Yale. En 1987, la femme de Diyarbakir était arrêtée au cours d'une manifestation contre la torture des prisonniers. Elle est restée deux mois en prison. Un an plus tard la femme d'Istanbul obtenait son diplôme de professeur adjoint. Celle de Diyarbakir essayait toujours d'apprendre le turc. Toutes deux ont fait irruption sur la scène politique en 1990. Celle d'Istanbul a été élue au Parlement en 1991 sur la liste du Parti de la Juste Voie (DYP), celle de Diyarbakir l'était également mais par le biais du Parti du Peuple social-démocrate (SHP) en tant que membre du Parti Travailliste du Peuple domicilié au Kurdistan. La femme d'Istanbul a d'abord été ministre d'Etat chargé des affaires économiques lors de la première coalition DYP-SHP, présidée par le Premier Ministre Süleyman Demirel. Elle fut élue présidente du DYP lors de la convention à caractère urgent de juin 1993. La femme de Diyarbakir est entrée au Parlement en tant que simple député représentant son peuple mais dès le premier jour, elle fut traitée de "traître" par la majorité. Alors que de hauts fonctionnaires adressaient des louanges à la femme d'Istanbul et affirmaient qu'elle valait 30 généraux, à Diyarbakir d'autres fonctionnaires menaçaient de mort l'autre femme et l'accusaient de soutenir les terroristes. Toutes deux ont des problèmes avec les militaires. L'une est dirigée par eux, l'autre les a défiés.  Aujourd'hui, la femme de Diyarbakir -celle qui défie- est détenue. Celle d'Istanbul est au pouvoir et dirige un gouvernement. La femme de Diyarbakir a parlé librement, sans réserves, et risque de sérieux problèmes pour avoir menacé "l'intégrité indivisible de la Turquie" en faisant usage de sa liberté d'expression. La femme d'Istanbul a plongé la Turquie dans le chaos. Elle est responsable de l'effondrement de l'économie et applique une politique portant atteinte à la crédibilité et à la respectabilité de la Turquie à l'étranger. La femme de Diyarbakir risque la peine capitale. (Cette composition avait été publiée par The Turkish Daily News le 9 mars 1994, à l'occasion de la Journée Internationale des Femmes. Depuis lors rien n'a changé en Turquie.)

ELECTIONS PARTIELLES DESTINEES A TROMPER L'OPINION MONDIALE

    Le gouvernement Ciller-Karayalcin, après avoir perdu sa crédibilité aussi bien en Turquie qu'à l'étranger, a recours à une nouvelle manoeuvre politique destinée à tromper une fois de plus l'opinion mondiale et a convoqué des élections partielles pour le 4 décembre prochain.
    Suite à l'incarcération de six députés du DEP et d'un député indépendant, et à la fuite de six députés du DEP vers l'Europe, 22 sièges parlementaires sont vides. Malgré les pressions de l'opposition pour que des élections générales anticipées soient convoquées, le Premier Ministre Ciller a opté pour des élections partielles, considérant que des élections générales pourraient nuire à l'économie. En fait, elle est parfaitement consciente que des élections générales pourraient être catastrophiques pour son gouvernement.
    Pour calmer les institutions internationales comme le CSCE, le Conseil de l'Europe et le Parlement Européen, qui condamnent la persécution des députés du DEP, Ciller a affirmé que les députés du DEP en prison pourraient se présenter comme candidats.
    Actuellement, 14 des 22 sièges sont libres en raison de la fermeture du DEP et un autre est resté vacant suite à l'assassinat d'un député de ce même parti. Dans des conditions normales, les candidats d'un parti pro-kurde peuvent remporter facilement ces 15 sièges vacants. Cependant, le climat dans les régions kurdes n'est pas propice à une élection démocratique.
    Le Parti du Bien-être (RP), vainqueur aux dernières élections locales du 27 mars, a annoncé le 23 mars dernier que les listes électorales dans les provinces de Diyarbakir, Sirnak, Mardin, Batman, Siirt, Van, Mus et Adiyaman sont obsolètes en raison des migrations qui se sont produites dans ces régions. Selon le vice-président du RP, Sevket Kazan, la population de la ville de Diyarbakir à elle seule, qui était de 450.000 personnes, est passée à 1,5 millions de personnes en raison des migrations tandis que celle de Lice, un conté de la province de Diyarbakir, est passée de 10.000 à 800 personnes pour le même motif.
    Le président du Parti Démocratique de Gauche (DSP), Bülent Ecevit, a lancé un appel au boycott des élections partielles. "Moi, je n'irais pas voter ou je voterais en blanc", a-t-il déclaré.
    Le député du DEP Nizamettin Toguç déclarait le 25 septembre au quotidien Özgür Ülke: "1.800 villages ont été évacués dans les régions où vont se célébrer les élections. Trois millions de personnes ont été forcées de quitter la région. Etant donné qu'au cours du vote des équipes spéciales et les protecteurs de village seront responsables de la sécurité et des isoloirs, la convocation d'élections partielles dans les régions kurdes est simplement un piège. Mais nous n'y tomberons pas."
    Le Secrétaire Général du PKK, Abdullah Öcalan, déclarait dans une interview publiée par Özgür Ülke le 30 septembre dernier: "Les gens du DEP ont déjà été élus, ils n'auront pas de mal à se faire élire une nouvelle fois. S'ils vont être réélus, pourquoi ont-ils été emprisonnés? Ils ont les mêmes personnalités et les mêmes opinions. Si ce sont des traîtres, pourquoi est-ce que la voie à l'élection leur est de nouveau ouverte? C'est contradictoire. Les conditions d'une élection démocratique sont claires. Elles ne sont pas du tout réunies dans le Kurdistan. Si un parti se présente aux élections dans ces conditions au nom de la démocratie, il se détruira lui-même. Nous nous opposons à ces élections."
    Le Parti de la Démocratie du Peuple (HADEP), successeur du disparu DEP, a déjà fait clairement savoir qu'il n'entendait pas participer à des élections évoluant dans des "conditions anti-démocratiques et négatives."

"10 POUR CENT DE POLITIQUE HONORABLE"

    Le rédacteur du quotidien Sabah Cengiz Candar, dans son article du 28 août 1994, a critiqué en les termes suivants la réponse du gouvernement turc à la décision du Congrès des Etats-Unis concernant l'aide américaine à la Turquie:
    "Ciller a annoncé que la Turquie rejetterait 10 pour cent de l'aide américaine à la Turquie, celle en rapport avec la situation des "droits de l'homme", surtout celle qui concerne la situation des Kurdes et la question de Chypre. Avant de vous empresser de saluer sa décision de protéger "l'honneur national" de la Turquie, il convient de ne pas oublier qu'il ne s'agit que de "10 pour cent de l'honneur."
    "La totalité de l'aide américaine, 365 millions de $, n'est pas rejetée. Seuls 36,5 millions de $ sont rejetés pour préserver notre honneur national!
    "Il est évident que Ciller tente de cultiver une image "patriotique", mais nous ne pouvons parler "d'honneur national" dans ces circonstances. C'est une comédie. Pire encore, c'est une situation honteuse.
    "Si la République Turque n'a rien à se reprocher en ce qui concerne les droits de l'homme, si la situation des droits de l'homme dans le pays répond aux normes démocratiques internationales, pourquoi toute cette susceptibilité?
    "La situation `honteuse' des droits de l'homme dans le pays est bien ce qui pourrait nuire à `l'honneur national.'"

TERREUR D'ETAT EN DEUX MOIS

    Le 1.8, des inconnus battent à mort Tahir Güvenc à Silvan et abattent Hasan Keles à Hasankeyf.
    Le 1.8, Gültekin Acet, de dix ans, meurt et trois autres personnes sont blessées suite à l'explosion d'une bombe lancée contre une maison à Bismil.
    Le 2.8, un des fondateurs de l'HADEP, Tahir Tans, est arrêté à Mersin alors qu'il se rendait à Ankara pour assister au procès des députés du DEP.
    Le 3.8, à Urfa, le représentant local de l'HADEP, Behcet Öcalan, est arrêté alors qu'il allait retirer sont permis de conduire au poste de police.
    Le 3.8, l'Association pour les Droits de l'Homme et la Solidarité envers les Victimes de la Répression (Mazlum-Der) accuse la police d'avoir torturé Sevgi Engin, arrêtée à Izmir en Juin. Engin a également été victime de harcèlement sexuel.
    Le 4.8, à Batman, Abdullah Baskin, arrêté le 3 juillet, meurt lors de son transfert devant la cour. Ses parents accusent la police de l'avoir torturé et de lui avoir causé la mort.
    Le 4.8, une confrontation armée résultant d'une intervention policière dans une maison d'Istanbul cause la mort de trois membres présumés de Dev-Sol: Güner Sar, Hüseyin Aslan et Özlem Kilic. L'Association des Droits de l'Homme (IHD) accuse la police de recourir aux exécutions sommaires au lieu d'arrêter les suspects.
    Le 5.8, à Elazig, Haci Albayrak, de trois ans, et Hasan Demiralp, de 15 ans, meurent suite à l'explosion d'une mine.
    Le 6.8, à Diyarbakir, Dalyan Yay et Ikram Sesigüzel sont assassinés par des inconnus.
    Le 8.8, dans le village de Merkez à Bingöl, Raif Arktekin est abattu par un protecteur de village.
    Le 8.8, la police annonce l'arrestation de 24 membres du PKK à Istanbul et trois membres du TIKKO à Ankara.
    Le 8.8, des tireurs inconnus abattent deux orfèvres, Musa Baris et Sedat Demir, à Batman, et Abdulkadir Bilge à Nusaybin.
    Le 9.8, quatre activistes anti-militaristes sont jugés par la Cour militaire de l'Etat-Major. Le président de l'Association Anti-Guerre, Arif Hikmet Iyidogan et trois autres personnes, Gökhan Demirkiran, Osman Murat Ülke et Sefa Fersal, sont accusés d'avoir fait de la propagande contre le service militaire. Au cours du procès, Iyidogan se plaint d'avoir été forcé de porter un uniforme militaire lors de son séjour à la prison militaire. Alors qu'il ôte cet uniforme, il est poussé hors de la salle du tribunal par ordre du juge.
    Le 9.8, dans le village de Yolalti, à Diyarbakir, les forces de sécurité interviennent dans une maison et abattent deux sympathisants présumés du PKK.
    Le 9.8, à Istanbul, l'association culturelle de Caglayan reçoit la visite de la police, toutes les publications présentes dans ses locaux sont confisquées et deux personnes sont arrêtées.
    Le 9.8, des inconnus armés pénètrent dans une maison à Suruc, abattent un enfant de sept ans, Erkan Kücük, et blessent deux femmes. Le même jour, Ali Sur est victime d'un assassinat politique à Viransehir.
    Le 10.8, à Ankara, le porteur Bayram Karabulut affirme avoir été torturé au poste de police après avoir été arrêté le 8 août.
    Le 11.8, à Samsun, Cevat Alver accuse la police de l'avoir torturé après l'avoir arrêté le 8 août dernier.
    Le 11.8, à Batman, Hasan Akin et Mehmet Baser sont assassinés par des inconnus.
    Le 12.8, à Kulp, une unité militaire bombarde le village de Kunuklu, tue deux jeunes femmes, Mümine Zümrüt et Netice Coskun, et blesse huit autres personnes.
    Le 12.8, à Batman, le berger Abdurrahman Aras est retrouvé assassiné. Le même jour, Hasan Ertas est assassiné à Nusaybin.
    Le 13.8, à Midyat, Sehmuz Kizmaz est victime d'un assassinat politique.
    Le 14.8, à Adana, les forces de sécurité arrêtent plus de 200 personnes au cours d'une manifestation marquant le dixième anniversaire du début de la guerre de guérilla lancée par le PKK. Par ailleurs, des centaines de personnes sont arrêtées à Mersin, Diyarbakir, Bitlis, Agri, Dogubeyazit et Eruh. Parmi les détenus figurent des membres du DEP et de l'HEDEP.
    Le 15.8, les forces de sécurité interviennent dans une maison à Diyarbakir et abattent deux personnes inconnues.
     Le 15.8, à Istanbul, des opérations policières menées dans des quartiers habités par des Kurdes donnent lieu à l'arrestation de 100 personnes.
    Le 15.8, des mines placées par la police tuent quatre enfants, Ahmet Olgac et Mehmet Akdemir à Kulp et Celebi Özgüc et Ishak Özgüc à Savur.
    Le 16.8, le chef du village de Tilozik à Viransehir, Naif Ummaz, est retrouvé mort à Hilvan. Ummaz, membre du DEP, avait été enlevé par des inconnus le 7 juin dernier.
    Le 17.8, le travailleur municipal Ibrahim Kizilkaya est victime d'un assassinat politique à Bismil.
    Le 17.8, deux citoyens hollandais, Van Der Voort et Cengiz Mavgi, ce dernier d'origine turque, affirment avoir été torturés au poste de police de Beyoglu. Selon Mavgi, les policiers l'ont forcé à renoncer à sa nationalité hollandaise.
    Le 18.8, deux paysans du village de Cintepe à Eruh, Halit Deniz et Salih Kaya, affirment avoir été torturés au poste de gendarmerie pendant 13 jours.
    Le 18.8, cinq avocats de différentes provinces, Ali Demir, Eyüp Duman, Necati Güven (également président du DEP à Erzurum), Ahmet Gerez et Mahmut Tuncer Caferoglu sont arrêtés et accusés d'avoir soutenu le PKK.
    Le 18.8, le président de l'HADEP, Halil Ibrahim Olcay, est arrêté par une équipe de police faisant une descente dans son café. Deux autres représentants de l'HADEP, Sait Tadki et Yusuf Turgut, ont également été arrêtés par la suite.
    Le 19.8, des inconnus attaquent un café kurde à Saruhanli, abattent Cebrail Signic et blessent trois autres clients. Le président local de l'HADEP, Mehmet Tozan, est arrêté par la police alors qu'il conduit les blessés à l'hôpital.
    Le 21.8, à Diyarbakir, le commerçant Seyithan Aktas est abattu par des tireurs inconnus.
    Le 21.8, à Istanbul, deux membres du DEP, Cemil Gedik et Hüseyin Kelekci, sont arrêtés en compagnie de deux autres personnes.
    Le 22.8, à Adana, la police annonce l'arrestation de 15 militants présumés du PKK.
    Le 23.8, à Istanbul, le jeune Can Demirag, arrêté dans le cadre d'un crime, est retrouvé mort dans sa cellule. La mère de Demirag, Sakine Demirag, accuse la police de l'avoir torturé à mort. Sa soeur, Gülcan Demirag, et ses frères, Tayfun et Demirhan Demirag, arrêtés le même jour, affirment avoir entendu les cris de Can endurant la torture.
    Le 24.8, dans le village de Cayüstü, à Diyarbakir, six enfants, Savas Ates, Halit Gunes, Bayram Gunes, Vedat Balta, Ibrahim Balta et Isa Can sont victimes de l'explosion d'un obus abandonné après une opération militaire dans la zone.
    Le 25.8, cinq représentants du Parti du Pouvoir Socialiste (SIP), le président Murat Salmaner, Nezahat Cali, Ulvi Icil, Süleyman Baba et Tunc Tatoglu, sont inculpés par le procureur de la CSE d'Istanbul pour avoir induit à la violence dans des tracts électoraux distribués à l'occasion des élections locales du 27 mars. Chacun d'eux risque une peine de prison de quatre ans et six mois.
    Le 25.8, à Ankara, la police arrête neuf personnes pour appartenance à l'Armée de Libération des Travailleurs-Paysans de Turquie (TIKKO).
    Le 25.8, à Diyarbakir, la police annonce que Cihan Akkun, arrêté le 10 août, a été retrouvé mort dans sa cellule de l'Ecole de Police de Diyarbakir. Le père de la victime accuse la police de l'avoir torturé jusqu'à la mort.
    Le 26.8, des inconnus armés abattent Sadik Yildirim à Nusaybin.
    Le 28.8, à Batman, Haci Selim Ciftci est victime d'un assassinat politique.
    Le 29.8, deux avocats, Necati Güven et Mahmut Tuncer Cafroglu, arrêtés auparavant pour avoir soutenu le PKK, sont placés en détention par la CSE d'Erzincan.
    Le 28.8, à Mazgirt, une patrouille militaire ouvre le feu sur un groupe, abat le serveur Mehmet Özalp et blesse ses deux collègues.
    Le 28.8, à Kozluk, Mehmet Emin Celik est abattu par un
groupe d'hommes armés faisant une descente chez lui.
    Le 29.8, des inconnus armés abattent Niyazi Tekin à Yüksekova et Hüseyin Güya à Dicle.
    Le 29.8, une patrouille militaire abat Mehdi Bilgin, de 65 ans, dans le village de Baspinar à Batman.
    Le 30.8, à Eskisehir, le chauffeur d'un minibus, Coskun Kirici, arrêté le 25 août, affirme avoir été torturé au poste de police. Les traces de torture sur son corps et son visage ont été certifiées par un rapport médical.
    Le 31.8, à Kayseri, cinq personnes sont arrêtées par la police pour appartenance à une organisation islamiste radicale.
    Le 31.8, à Kirsehir, cinq jeunes vendant divers objets peints en jaune, rouge et vert (les couleurs du drapeau national kurde) sont arrêtés par la police.
    Le 1.9, les meetings pour célébrer le jour du premier mai sont interdits à Ankara, Izmir et Antalya par décision des gouverneurs. Le même jour, le secrétaire de l'Association des Droits de l'Homme (IHD), Eren Keskin, et neuf autres représentants de l'IHD sont arrêtés à Istanbul alors qu'ils distribuaient des dépliants pour la Journée de la Paix.
    Le 1.9, à Ankara, 53 travailleurs qui occupaient une compagnie de transport pour protester contre le licenciement de leurs camarades sont expulsés de force par la police. Au cours de l'opération, certains travailleurs sont gravement blessés.
    Le 1.9, à Diyarbakir, des inconnus armés abattent Fuat Akgül et blessent trois autres personnes.
    Le 3.9, un ancien prisonnier kurde, Metin Balaban, est abattu à Diyarbakir par des inconnus armés.
    Le 4.9, au cours d'un meeting organisé dans le cadre de la Semaine Mondiale de la Paix à Istanbul, 24 personnes distinguées sont arrêtées pour avoir distribué des dépliants intitulés "La Paix Maintenant !", imprimés en cinq langues, dont le kurde.
    Le 4.9, à Diyarbakir, Nurettin Doruk, blessé le 1er septembre à la hache par un inconnu, meurt à l'hôpital.
    Le 5.9, à Diyarbakir, l'étudiant universitaire Mehmet Ali Aslan, enlevé cinq mois auparavant, est retrouvé mort.
    Le 6.9, à Bismil, Mehmet Tunc affirme avoir été torturé pendant trois jours suite à son arrestation en compagnie de son fils Vedat Tunc. La famille Tunc s'était rendue à Bismil quatre mois auparavant après que les forces de sécurité aient brûle leur maison dans le village de Kürthaci.
    Le 6.9, au cours d'une série d'opérations militaires, quinze personnes sont arrêtées à Varto et deux enseignants subissent le même sort à Ankara.
    Le 7.9, à Diyarbakir, deux représentants du SHP, Servet Aslan et Sahabettin Latifeci, meurent sous la torture.
    Le 7.9, la Cour militaire de cassation ratifie la sentence prononcée contre le président de l'Association Anti-Guerre d'Izmir, Aytek Özel. Accusé de mener une campagne contre le service militaire, Aytek avait été condamné par la Cour militaire de l'Etat-Major à 14 mois et 15 jours de prison et à payer une amende de 410.000 TL.
    Le 8.9, les forces de sécurité arrêtent 20 personnes au cours d'une opération à Besiri.
    Le 8.9, un ancien représentant des partis disparus HEP et DEP, Kemal Okutan, est arrêté à Istanbul pour purger une peine de prison de 6 mois dont il avait écopé pour des discours prononcés dans le cadre de son parti.
    Le 9.9, sept représentants syndicaux, Mustafa Oztaski, Sükrü Gunsili, Coskun Yilmaz, Ahmet Yildirim, Yakup Dogan, Cuma Sahin et Faruk Turan sont arrêtés pour avoir manifesté contre le discours du Premier ministre lors de l'inauguration de la Foire Internationale d'Izmir.
    Le 12.9, à Diyarbakir, Abdulaziz Bilgin est assassiné par des inconnus armés.
    Le 13.9, à Yüksekova, le travailleur Abdullah Citak, enlevé la veille, est retrouvé mort.
    Le 13.9, à Diyarbakir, Ihsan Elmas est victime d'un assassinat politique.
    Le 14.9, à Adapazari, la jeune Nuriye Özgüroglu est trouvée morte au poste de police où elle était détenue depuis la veille. Selon la police Özgüroglu s'est suicidée en se jetant par la fenêtre du quatrième étage.
    Le 14.9, à Istanbul, le serveur Imam Yildirim affirme avoir été torturé par la police après avoir été arrêté en compagnie de deux autres personnes.
    Le 14.9, à Izmir, trois militants du MHP, Erkin Ulutas, Savas Sözak et Dogan Sever, affirment avoir été battus alors qu'ils collaient des affiches.
    Le 14.9, à Uludere, le chauffeur de camion Abdullah Demir est victime de l'explosion d'une mine placée par les forces de sécurité.
    Le 17.9, une mine placée par les forces de sécurité à Eruh tue neuf personnes et blesse sept autres qui voyageaient dans un minibus.
    Le 18.9, à Semdinli, deux femmes, Gül Alp et Azime Uysal, sont victimes de l'explosion d'une mine placée par les forces de sécurité.
    Le 18.9, à Diyarbakir, le chef du village de Kadi, Bedri Tan, meurt en détention policière. Sa famille accuse les forces de sécurité de l'avoir torturé jusqu'à la mort.
    Le 18.9, le bureau d'Izmir de l'IHD est fermé par le gouverneur sous prétexte que sa bibliothèque contenait plusieurs publications interdites.
    Le 18.9, à Diyarbakir, Aziz Oguz et Kemal Kücük sont victimes d'assassinats politiques.
    Le 19.9, à Dicle, l'explosion d'une mine placée par les forces de sécurité tue une femme, Fatma Baspinar, et blesse trois autres personnes.
    Le 20.9, le gouverneur de Samsun décide de réduire d'un tiers le salaire de neuf fonctionnaires publics pour avoir pris part à un acte de protestation organisé par le Syndicat des Employés des Finances (Tüm Maliye Sen) le 28 mai 1994 à Ankara.
    Le 21.9, à Bergama, Süleyman Demirce affirme avoir été torturé au poste de police où il s'était rendu pour demander des nouvelles de son fils de 16 ans, arrêté auparavant.
    Le 21.9, la CSE d'Istanbul condamne un membre du Parti Communiste Révolutionnaire de Turquie (TDKP), Hüseyin Kiran, à la peine capitale. Plus tard, la sentence sera commuée en une peine de prison à vie.
    Le 21.9, les sections d'Adana de l'IHD et de l'Association Pir Sultan Abdal sont fermées par décision du gouverneur pour possession de publications interdites. Le gouverneur a également demandé au procureur d'introduire une action en justice contre les représentants de l'IHD.
    Le 20.9, des tireurs inconnus abattent Nuri Aktas à Besirli et Mehmet Emin Odabasi à Siverek.
    Le 21.9, les forces de sécurité arrêtent Mehmet Yurttas à Diyarbakir, frère d'un des députés du DEP détenus, et six personnes à Izmir.
    Le 22.9, à Ankara, le jeune de 18 ans Umut Kara affirme avoir été kidnappé et torturé par la police pour l'obliger à devenir leur informateur.
    Le 22.9, le président de l'IHD à Tunceli, Ekber Kaya, est arrêté par la police.
    Le 23.9, la police annonce l'arrestation de neuf personnes à Istanbul, quatre islamistes à Mersin et quinze membres supposés du PKK à Antalya.
    Le 27.9, à Midyat, Ali Arbas est victime de l'explosion d'une mine placée par les forces de sécurité.
    Le 27.9, des tireurs inconnus abattent Hursit Altin à Cizre.
    Le 28.9, à Istanbul, les forces de sécurité interviennent dans une cafétéria et abattent trois membres présumés du Dev-Sol, l'avocat Fuat Erdogan, Elmas Yalcin et Ismet Erdogan. La section de l'IHD accuse la police de recourir aux exécutions sommaires au lieu d'arrêter les suspects.
    Le 28.9, à Adana, le représentant de l'HADEP Mehmet Salih Sabuttekin est abattu par deux tireurs inconnus.
    Le 28.9, une marche en faveur de la liberté d'opinion, organisée à Ankara par l'IHD et l'Association des Juristes Contemporains (CHD) est interdite par décision du gouverneur.
    Le 28.9, le fils de la député en détention du DEP à Diyarbakir, Leyla Zana, et de l'ancien maire de Diyarbakir, Mehdi Zana, est arrêté par la police à l'aéroport d'Istanbul alors qu'il partait pour Paris. Ronay Zana, étudiant universitaire en France, s'était rendu en Turquie pour y passer les vacances d'été.
    Le 28.9, la police d'Izmir annonce l'arrestation de 28 membres présumés de l'organisation kurde Rizgari au cours d'une récente opération.
    Le 28.9, la CSE d'Istanbul condamne huit membres présumés du Dev-Sol à des peines de prison allant jusqu'à 12 ans et six mois. Dans un autre procès, la cour condamne quatorze personnes à des peines de prison allant jusqu'à 11 ans et 8 mois pour avoir pris part dans un acte de protestation contre l'assassinat d'un étudiant par la police.
    Le 28.9, à Besiri, Seyithan Kara est victime d'un attentat à la bombe.
    Le 29.9, à Adiyaman, douze personnes sont placées en détention par un tribunal pour activités illégales. A Ankara, onze membres présumés du PKK sont arrêtés par la police.
    Le 30.9, à Istanbul, le travailleur du bâtiment Cafer Atmaca se plaint d'avoir été torturé pendant trois jours au poste de police de Kurtulus.
    Le 30.9, la CSE d'Istanbul condamne le militant du TIKKO Metin Dere à la peine capitale et Hasan Erdem à dix ans de prison.
    Le 30.9, la CSE d'Ankara condamne les membres du PKK Nasrettin Akar et Abdülbaki Babür à quatre ans et six mois de prison.
    Le 30.9, Siddik Etyemez et Ahmet Ceylan, kidnappés antérieurement, sont retrouvés morts sur l'autoroute Diyarbakir-Ergani. A Batman, Ahmet Özalp est victime d'un assassinat politique.

LE PARLEMENT EUROPEEN SUSPEND TOUS CONTACTS AVEC LE PARLEMENT TURC

    Le Parlement Européen, lors de sa réunion du 29 octobre 1994, a décidé de suspendre tous contacts avec le Parlement turc pour protester contre le procès des députés pro-kurdes dont l'immunité parlementaire a été levée et dont le parti, le Parti de la Démocratie (DEP), a été fermé par le Tribunal Constitutionnel.
    Auparavant, le 14 septembre, le Conseil Présidentiel du Comité des Affaires Etrangères du Parlement Européen avait adopté la même décision.
    L'organe législatif de l'Union Européenne avait demandé à la Turquie de relâcher les députés en question et de lever l'interdiction du DEP.
    Le Parlement Européen a aussi préconisé la suspension de la proposition d'union douanière entre la Turquie et l'Union Européenne aussi longtemps que sont inculpés les députés kurdes.
    Cette décision est la plus sévère que le Parlement Européen ait prise à l'encontre de la Turquie depuis sa décision de 1980 de suspendre ses liens avec le Parlement turc suite au coup-d'Etat militaire du 12 septembre de cette année-là.
    Voici le texte intégral de la résolution du PE:
    "Le Parlement européen,
    "- rappelant sa résolution du 10 mars 1994 sur l'arrestation de parlementaires kurdes en Turquie,
    "A. considérant que le 3 août 1994 s'est ouvert le procès de six membres kurdes de la Grande Assemblée Nationale turque, appartenant au parti DEP (Parti de la démocratie),
    "B. considérant la décision prise par la Cour constitutionnelle, le 17 juin 1994, de déclarer inconstitutionnel le DEP qui dispose, outre les six membres déjà incarcérés, de treize membres à la Grande Assemblée Nationale,
    "C. considérant que ces six députés, M. Ahmet Türk, Mme Leyla Zana, MM. Orhan Dogan, Sirri Sakik, Hatip Dicle et Mahmut Alniak, sont accusés de séparatisme et de soutien à l'organisation terroriste PKK, et que ces accusations sont fondées sur l'article 125 du Code pénal qui prévoit obligatoirement la peine capitale,
    "D. considérant que les principaux chefs d'inculpation de ces parlementaires sont d'avoir défendu les intérêts du peuple kurde en Turquie par des déclarations publiques dans les médias et des contacts avec des représentants d'institutions internationales, y compris le Parlement européen et le Conseil de l'Europe,
    "E. considérant que le 1er juin 1994, le Tribunal constitutionnel a décidé la 'dissolution' du DEP en tant que parti, ce qui revenait à mettre hors-la-loi, à dater de ce jour, le DEP et ses parlementaires,
    "F. inquiet des obstacles mis récemment par les autorités turques à l'acheminement des volontaires humanitaires et des secours aux populations kurdes d'Irak, en violation de la résolution 688 du Conseil de Sécurité des Nations unies;
    "1. dénonce l'intégralité de ce procès contre les six députés DEP de la Grande Assemblée Nationale turque, et la mise hors-la-loi de ce parti, comme une attaque à l'égard de la démocratie pluraliste dans ce pays, et demande la libération immédiate de ces députés;
    "2. insiste pour que ces procès puisse être considéré comme strictement équitable et demande par conséquent que des observateurs internationaux, et notamment des observateurs désignés par l'Européenne, puissent y assister;
    "3. décide de geler la commission mixte parlementaire UE/Turquie en attendant la fin du procès;
    "4. salue l'initiative, prise par la Grande Assemblée Nationale de la Turquie le 4 décembre 1994, d'organiser de nouvelles élections et invite les gouvernements à créer les conditions d'un scrutin libre et démocratique;
    "5. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la Grande Assemblée Nationale de la Turquie, au Secrétaire général du Conseil de l'Europe ainsi qu'au Secrétaire général des Nations unies."
    Le lendemain, le Président turc Süleyman Demirel réagissait durement à la décision du Parlement Européen. "Il est impossible d'appliquer ce que le Parlement Européen demande à la Turquie," a-t-il précisé au cours d'une conférence de presse le 30 septembre dernier. "Les pressions et les accusations contre la Turquie sont injustes. Nous en avons l'habitude. Il n'y a rien à remettre en cause dans le système turc.

UN EDITEUR TORTURE EN TURQUIE
   
    L'éditeur Recep Marasli était arrêté à Istanbul le 8 juillet 1994 et aurait été gravement torturé pendant sa détention. Aux alentours du 11 juillet il a commencé une grève de la faim pour protester contre le traitement qui lui a été infligé.
    Marasli aurait du mal à garder son équilibre des suites de la torture. Il souffre encore les retombées des tortures subies lors des précédentes détentions entre 1982 et 1991. Marasli, arrêté en compagnie de dix autres personnes dont sa femme, n'a pu voir son avocat jusqu'au 11 juillet 1994. Le 21 juillet, il était officiellement accusé, en vertu de la Loi Anti-Terreur, d'appartenance au Parti de la Liberté du Kurdistan. Lors de son arrestation, de nombreux documents et manuscrits, dont un alphabet kurde et un livre sur les Arméniens en Turquie, ont été confisqués.
    Recep Marasli a encore en suspens sept autres procès en relation avec ses commentaires sur la situation kurde et ses livres. Le 23 février 1994 était ratifiée une sentence de deux ans de prison prononcée contre lui pour "dissémination de propagande séparatiste" dérivant de la publication de son livre Défense Politique.

LE CPJ PRESSE LE GOUVERNEMENT TURC

    Le Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ) s'est montré inquiet par l'ajournement de la révision de la Loi pour la lutte contre le terrorisme, en vertu de laquelle des centaines de journalistes et écrivains ont été condamnés pour leurs écrits.
    Dans un message envoyé au Premier Ministre Ciller, le directeur général du CPJ, William A. Orme Jr. affirme:
    "Selon des informations filtrées à la presse turque pendant les sessions à huis-clos de la commission à l'origine de la proposition, la définition du mot `terrorisme' a été modifiée. La nouvelle définition ne considère terroristes que les actes ayant recours à la `force, la violence ou la menace'. Il s'agit là d'une appréciable amélioration de la loi. Cependant, la révision de l'Article 8 de la Loi Anti-Terreur, qui considère délictueux la propagande séparatiste, n'est pas satisfaisante. Le nouveau projet de loi interdit la propagande de soutien aux organisations terroristes qui mettrait clairement et immédiatement en danger l'intégrité de l'Etat.' La formulation de ce passage est encore suffisamment vague pour qu'elle puisse être utilisée contre les journalistes qui écrivent sur les organisations terroristes."

PERSECUTION DES MEDIAS EN DEUX MOIS

    Le 1.8, le correspondant à Van du quotidien Özgür Ülke, Bülent Ciftci, est arrêté à Tatvan alors qu'il voyageait en bus vers Istanbul.
    Le 1.8, la CSE d'Istanbul ouvre le procès du rédacteur d'Özgür Gündem Kemal Sahin pour propagande séparatiste dans plusieurs articles publiés.
    Le 1.8, à Gaziantep, les forces de sécurité interviennent dans une maison et arrêtent les musiciens Saban Kilic, Mustafa Gümüs, Ilyas Gümüs, Salih Ceylan, Ahmet Sezer et Celal Sezer.
    Le 2.8, deux reporters de la chaîne de télévision allemande WDR, Osman Okkan et Yüksel Ugurlu, sont retenus pendant 20 heures par des gendarmes à Diyarbakir alors qu'ils préparaient un reportage, bien qu'ils avaient une permission spéciale du gouverneur régional.
    Le 2.9, le livre Arménie occidentale et génocide est confisqué par la CSE d'Istanbul. La maison d'édition Zel est accusée d'avoir donné le nom d'Arménie aux territoires orientaux de la Turquie.
    Le 3.8, le N° 24 de l'hebdomadaire Newroz et le N° 11 de Denge Azadi sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
    Le 7.8, le N° 23 du périodique Alinteri est confisqué par la CSE d'Istanbul parce qu'il contient des articles incitant les gens à l'hostilité.
    Le 9.8, le journaliste d'Özgür Gündem Mehmet Can Yüce est condamné par la CSE d'Istanbul à deux ans de prison et à payer une amende de 400 millions de TL. Le rédacteur responsable, Ömer Özdemir, écope également de 6 ans de prison et d'une amende de 50 millions de TL. Özdemir devra également purger deux ans de prison et payer une amende de 450 millions de TL pour un autre article publié par Özgür Gündem. Le tribunal a également décidé d'interdire la publication d'Özgür Gündem, déjà disparu, pendant un mois.
    Le 9.8, les dernières éditions des périodiques Genclik Yildizi, Taraf et Öncü Partizan sont confisquées par la CSE d'Istanbul pour propagande en faveur du séparatisme et d'organisations illégales.
    Le 11.8, le bureau d'Özgür Ülke à Agri subit une intervention policière et les quatre employés du journal, Mustafa Aladag, Seyfettin Tepe, Nevzat Bulut et Berivan Kutlay sont arrêtés.
    Le 11.8, trois journalistes, Ufuk Kaptan (Milliyet), Ebru Kücükaydin (Hürriyet) et Necdet Dogruyol (Agence Anatolie), sont arrêtés par les gendarmes à Karamürsel alors qu'ils prenaient des photos de Mert Ciller, fils du Premier ministre Tansu Ciller, appelé au service militaire.
    Le 12.8, le bureau de Diyarbakir d'Özgür Ülke subit une descente de police.
    Le 13.8, l'éditeur du journal Demokrat, Ersen Korkmaz, est poignardé par un inconnu. Korkmaz avait publié récemment une série d'articles sur les services publics.
    Le 13.8, quatre journalistes de la section de Mardin d'Özgür Ülke, Hüsniye Tekin, Emine Igdi, Hüsnü Akgül et Sükrü Kaplan, sont  arrêtés chez eux au cours de descentes policières.
    Le 15.8, le N° 5 du périodique Halkin Gücü est confisqué par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste et apologie d'une organisation illégale.
    Le 16.8, le livre d'Osman Devres La Paysannerie en Turquie et Révolution est confisqué par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste. Le livre avait été publié par la maison d'édition Yasam.
    Le 17.8, un rédacteur responsable d'Özgür Ülke, Hasan Sahin, est placé en détention par un tribunal en raison de divers articles qu'il a publiés. Il sera jugé par la CSE d'Istanbul en vertu de la Loi Anti-Terreur.
    Le 17.8, l'auteur-éditeur Mehmet Bayrak est condamné par la CSE d'Ankara à deux ans de prison et à payer une amende de 250 millions de TL pour un livre intitulé Les Kurdes et leurs luttes nationales démocratiques. Le tribunal a également décidé de détruire toutes les copies du livre.
    Le 17.8, le N° 20 du périodique Gercek et le N° 25 de Yeni Insan sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste et apologie d'organisations illégales.
    Le 17.8, à Konya, le gouverneur interdit les émissions d'une radio locale, Gencligin Sesi, pour avoir diffusé le témoignage d'un petit enfant qui prétendait avoir été torturé. Le propriétaire de la radio, Naci Daglioglu, et l'animateur Ahmet Inci, ont été arrêtés.
    Le 18.8, commence le procès de deux correspondants d'Özgür Gündem, Ismail Günes et Sabri Bölek, à la CSE d'Erzincan. Les deux journalistes sont déjà détenus.
    Le 19.8, la Cour de cassation ratifie la peine infligée à un ancien rédacteur responsable du périodique disparu Azadi. Salih Özcelik avait été condamné par une cour de la sûreté de l'Etat à deux ans de prison et à payer une amende de 250 millions de TL. Le tribunal supérieur a également ratifié la condamnation de deux autres journalistes du même périodique: 6 mois de prison et 50 millions de TL d'amende pour le rédacteur responsable Zana Sezen et 100 millions de TL d'amende pour le rédacteur Ikramettin Oguz. L'interdiction de publier le journal pendant un mois a également été ratifiée.
    Le 21.8, le N° 2 du périodique Newroz et le N° 14 de Denge Azadi sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
    Le 23.8, à Diyarbakir, le distributeur de journaux Hidir Celik est abattu par des tireurs inconnus. Il avait reçu des menaces parce qu'il distribuait des journaux pro-kurdes.
    Le 24.8, un ancien rédacteur du magazine Medya Günesi, Nurettin Yüksekyayla, est condamné par la CSE d'Istanbul à deux ans de prison et à payer une amende de 250 millions de TL. Le tribunal a également décidé d'interdire la publication du magazine pendant quinze jours.
    Le 24.8, le N° 33 du périodique Özgür Gelecek, le N° 33 de Mücadele et le N° 1 spécial d'Öncü Partizan sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour avoir fait la propagande de plusieurs organisations illégales.
    Le 25.8, l'ancien rédacteur du périodique Alinteri, Ayse Egilmez, est condamné par la CSE d'Istanbul à 6 mois de prison et à payer une amende de 50 millions de TL. La cour a également interdit la publication du magazine pendant un mois.
    Le 25.8, à Istanbul, les locaux du mensuel Devrim subissent une descente de police et de nombreux meubles et publications y sont détruits.
    Le 25.8, le rédacteur d'Özgür Ülke Haluk Yurtsever et huit autres personnes sont arrêtés par la police.
    Le 26.8, le correspondant à Van d'Özgür Ülke, Bülent Ciftci, est placé en détention après 26 jours de détention policière.
    Le 27.8, deux correspondants à Van d'Özgür Ülke, arrêtés le 8 août au cours d'une descente de police dans les locaux du journal, sont placés en détention.
    Le 28.8, le N° 15 du magazine Denge Azadi et le N° 107 de Mücadele sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste et apologie d'organisations séparatistes.
    Le 29.8, à Ankara, les gendarmes harcèlent le cameraman Zihni Oguzak et le correspondant Selim Sahin alors qu'ils couvraient une opération de répression contre un acte de protestation d'un groupe de travailleurs.
    Le 30.8, le livre de l'historien kurde Nuri Dersimi, Dersim dans l'histoire du Kurdistan, publié par la maison d'édition Zel, est confisqué par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
    Le 31.8, l'ancien rédacteur responsable du quotidien disparu Aydinlik, Hale Soysü, est condamné par la CSE d'Istanbul à 26 mois de prison pour une information concernant le PKK. La cour a également interdit la publication du journal pendant cinq jours.
    Le 1.9, quatre procès contre Özgür Gündem, journal déjà disparu, donnent lieu aux sentences suivantes: deux ans de prison et 50 millions de TL d'amende pour Özgül Aslan, six mois de prison et 64 millions d'amende pour Besim Döner, 67 millions d'amende pour Emel Kapilan et 242,5 millions d'amende pour l'éditeur Yasar Kaya.
    Le 1.9, l'écrivain Yalcin Kücük est condamné par la CSE d'Ankara à deux ans de prison et à payer une amende de 250 millions de TL pour son livre Conversations dans le jardin kurde. Cet ouvrage contient des interviews du leader kurde Öcalan. La cour a également émis un mandat d'arrêt contre Kücük et a demandé son extradition par la France, pays où il s'est exilé.
    Le 3.9, à Diyarbakir, le correspondant d'Özgür Ülke, Metin Dag, est arrêté alors qu'il couvre un événement. Une fois au poste de police il sera battu.
    Le 4.9, une équipe de la chaîne de télévision ARD composée de cinq personnes se voit interdire l'accès au nord de l'Irak suite aux directives du ministre des Affaires Etrangères, Mümtaz Soysal.
    Le 5.9, à Mardin, les correspondants d'Özgür Ülke Emine Igdi, Sükrü Kaplan, Hüsnü Akgül et Hüsniye Tekin, arrêtés le 13 août, sont placés en détention par un tribunal.
    Le 5.9, le rédacteur responsable du magazine Taraf, Abdullah Kiraci, est placé en détention par la CSE d'Istanbul.
    Le 5.9, le N° 128 d'Emegin Bayragi et le N° 55 de Medya Günesi sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
    Le 6.9, le N° 16 d'Azadi et les derniers numéros de Deng et Odak sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
    Le 6.9, le professeur d'université et rédacteur du Cumhuriyet, Toktamis Ates, échappe à un attentat à la bombe dirigé contre lui. Les explosifs avaient été placés par un groupe islamiste radical dans une librairie où Ates devait signer des livres. Heureusement, l'engin n'a pas explosé en raison d'une défaillance technique et a été retrouvé en fin de journée, après le départ de Toktamis.
    Le 7.9, la dernière édition de l'hebdomadaire Aydinlik est confisquée par une cour d'Istanbul pour avoir omis d'appliquer une décision judiciaire précédente interdisant la publication de la revue pendant cinq jours. Selon le rédacteur en chef d'Aydinlik, Ferit Ilsever, il est ahurissant de condamner un hebdomadaire pour avoir omis d'appliquer une sentence contre un quotidien disparu portant le même nom.
    Le 9.9, le rédacteur responsable de la maison d'édition Doz, Eren Keskin, est condamné par la CSE d'Istanbul à six mois de prison et à payer une amende de 50 millions de TL pour un livre intitulé La conférence mondiale sur les Kurdes. Eren est également Secrétaire de l'IHD à Istanbul.
    Le 9.9, la CSE d'Istanbul condamne le responsable de la maison d'édition Zagros, Nabi Barut, à un an de prison et à payer une amende de 50 millions de TL pour avoir publié le livre de Yalcin Kücük, L'histoire d'une résurrection.
    Le 10.9, la publication de deux périodiques, Emegin Bayragi et Genclik Yildizi, est interdite sous prétexte que leur éditeur commun, Haydar Demir, et le rédacteur Cem Özen sont en état d'arrestation.
    Le 10.9, le Centre Culturel Mésopotamie (MKM) subit une descente de police et un certain nombre de personnes, dont le président de l'HADEP d'Istanbul, Kemal Parlak, sont arrêtées.
    Le 11.9, la CSE d'Istanbul confisque le quotidien Cumhuriyet pour avoir publié une interview de militants islamistes radicaux. Les périodiques Kizil Bayrak et Öncü Partizan subissent le même sort pour propagande séparatiste et apologie d'organisations illégales.
    Le 12.9, le correspondant d'Adana d'Özgür Ülke, Hanifi Aydemir, affirme avoir été torturé au poste de police suite à son arrestation le 10 septembre.
    Le 12.9, le chanteur de musique folklorique Ali Ekber Eren et cinq membres du groupe Kizilirmak, Ilkay Akkaya, Ismail Ilknur, Tuncay Akdogan, Yasar Aydin et Cengiz Akatas, sont arrêtés à l'aéroport d'Istanbul alors qu'ils rentraient d'une tournée de concerts en Allemagne.
    Le 13.9, un rédacteur responsable d'Özgür Ülke, Mehmet Irvan, est placé en détention par la CSE d'Istanbul. Celle-ci met en cause plusieurs articles du journaliste. 27 actions en justice ont déjà été introduites contre Irvan.
    Le 13.9, trois anciens maires, Sükrü Cali (Hakkari), Nazmi Balkas (Lice) et Abdullah Kaya (Kozluk) sont condamnés par la CSE d'Istanbul à 20 mois de prison et à payer une amende de 210 millions de TL pour les déclarations qu'ils ont faites à Özgür Gündem. Le rédacteur du quotidien Davut Karadag a également écopé de six mois de prison et d'une amende de 122 millions de TL et l'éditeur Yasar Kaya devra payer 242 millions d'amende pour le même article.
    Le 16.9, une cour pénale d'Istanbul entame le procès d'Ismet Aslan, rédacteur de la maison d'édition Berfin, pour avoir publié un livre intitulé Les phrases interdites. Accusé de discréditer l'Islam, il risque une peine de prison de deux ans et six mois. La cour a également émis un mandat d'arrêt contre l'auteur du livre, Abdullah Riza Ergüven, actuellement en Europe.
    Le 16.9, le rédacteur du magazine Azadi, Ikramettin Oguz, est condamné par la CSE d'Istanbul à payer une amende de 100 millions de TL. La cour a également interdit la publication du magazine pendant une semaine, bien qu'elle avait déjà été interdite par une autre cour.
    Le 17.9, le concert du célèbre chanteur de folklore Sadik Gürbüz, organisé par la branche de l'IHD de Sivas, est interdit par le gouverneur. Gürbüz s'est déjà vu interdire cinq autres concerts dans d'autres villes.
    Le 17.9, l'ancien représentant à Sivas du magazine Mücadele, Rifat Özgüngör, est abattu par une patrouille de gendarmerie.
    Le 19.9, le N° 2 du magazine Alinteri et le N° 34 d'Express sont confisqués par la CSE d'Istanbul, pour instigation à l'hostilité raciale et de classes et propagande séparatiste respectivement.
    Le 20.9, le bureau de Diyarbakir d'Özgür Ülke subit une descente de police et trois correspondants, Gürsel Sahin, Metin Dag et Nezahat Özen, sont arrêtés.
    Le 20.9, le quotidien Özgür Ülke annonce que 146 de ses éditions depuis le 26 avril 1994, date de sa première publication, ont été confisqués par des cours et ses sept journalistes ont été placés en détention. Quatre rédacteurs d'Özgür Ülke, Suha Soysal Demirci, Halil Dalkilic, Hasan Sahin et Mehmet Evran sont toujours aux arrêts.
    Le 22.9, la CSE d'Istanbul inculpe le rédacteur de Mücadele, Cafer Cakmak, pour divers articles publiés dans trois éditions différentes.
    Le 23.9, l'ancien rédacteur d'Hedef, Naime Kaya, est arrêté à Istanbul en compagnie de trois autres personnes.
    Le 24.9, les dernières éditions du magazine Hedef et du bulletin Haklar ve Özgürlükler sont confisquées par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
    Le 25.9, le distributeur d'Özgür Ülke à Izmir, Mahmut Akkartal, est arrêté et sa maison est fouillée.
    Le 26.9, un des éditeurs de l'hebdomadaire disparu Azadi, Behram Alabay, est condamné par la CSE d'Istanbul à payer une amende de 100 millions de TL pour un article publié le 16 juin 1994.
    Le 28.9, le président du Centre Culturel Mésopotamie (MKM), Ibrahim Gürbüz, est condamné par la CSE d'Istanbul à deux ans de prison et à payer une amende de 112 millions de TL pour un discours prononcé lors d'un meeting du HEP.
    Le 29.9, la CSE d'Istanbul inflige une amende de 296 millions de TL à l'éditeur du Cumhuriyet, Berin Nadi, et une autre de 148 millions de TL à l'ancien rédacteur Aydin Engin pour une nouvelle concernant le PKK.
    Le 29.9, le N° 19 du magazine Denge Azadi est confisqué par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
    Le 30.9, les correspondants à Diyarbakir d'Özgür Ülke, Kadriye Özcanli, Mehmet Balamir et Ibrahim Karaca, arrêtés le 6 septembre, sont placés en détention par la CSE de Diyarbakir. Par ailleurs, le correspondant du quotidien à Urfa, Vehbiye Tüzün, est arrêté par la police à Diyarbakir.

PERSECUTION DES CHRETIENS ORTHODOXES

    A Washington, le sénateur Alphonse D'Amato soulignait le 29 juin dernier que les chrétiens orthodoxes de Turquie étaient sous une grande tension et que récemment, "la situation était devenue violente."
    Selon lui la persécution religieuse a été dirigée de manière spécifique contre le patriarche oecuménique de Constantinople. "La presse turque et d'éminents citoyens turcs ont été implacables dans leurs attaques verbales contre le leader spirituel de la chrétienté orthodoxe, le patriarche oecuménique Bartholomew.
    Les autorités turques ont simplement rejeté la notion selon laquelle le patriarche est oecuménique par nature et y font simplement allusion comme le "patriarche de Fener" - d'après le district d'Istanbul où se trouve le patriarcat.
    Le sénateur D'Amato a déclaré: "Malheureusement, ces derniers temps la situation est devenue violente. Parmi les incidents il est à déplorer des attentats à la bombe incendiaire contre le patriarcat et des profanations de cimetières et églises."

LE LEADER DU DEV-SOL ARRETE EN FRANCE

    Le leader de l'organisation illégale Dev-Sol (Gauche Révolutionnaire), Dursun Karatas, aurait été arrêté le 10 septembre à Modane, en France, après être entré dans le pays par la frontière italienne avec de faux papiers.
    Karatas avait été arrêté en Turquie en 1980 après le coup-d'Etat et accusé, avec 41 autres, de l'assassinat de 37 personnes. En 1989, il s'est évadé de la prison de haute sécurité d'Istanbul alors que son procès était toujours en cours. Il avait laissé une lettre où il se moquait des autorités. En 1991 il était condamné à mort par contumace, mais la peine était commuée par la suite en peine de prison à vie.
    Le 27 septembre, la Turquie demandait formellement son extradition à la France. Les 50 pages du dossier Karatas, reprenant ses délits présumés, ont été soumises au Ministère des Affaires Etrangères français par l'ambassade turque à Paris.
    Etant donné l'existence de la peine de mort en Turquie, il est peu probable que les autorités françaises concèdent l'extradition mais dans ce cas Karatas serait jugé en France.
    Après la demande d'extradition par la Turquie, l'Association des Droits de l'Homme de Turquie (IHD) a envoyé une lettre à l'ambassadeur français François Doppfer, demandant à la France de ne pas extrader Karatas.