UN GOUVERNEMENT POLICIER
La crise gouvernementale turque qui a duré cinq mois
s'est apparemment achevée par la formation d'une coalition entre les
deux principaux partis de centre-droit, le Parti de la Juste Voie (DYP)
et le Parti de la Mère-Patrie (ANAP). L'alliance ANAP-DYP,
populairement appelée La Voie Principale (Anayol), a remplacé
l'alliance de Ciller avec ses partenaires sociaux-démocrates et a barré
la route du pouvoir, du moins pour l'instant présent, au Parti du
Bien-être (RP), islamiste, qui a laissé derrière lui les deux partis de
centre-droite aux élections de décembre 1995.
Bien que la formation de la nouvelle coalition ait
été saluée comme une victoire de la laïcité sur le fondamentalisme
islamique, le futur gouvernement, par son protocole et par sa
composition ministérielle, représente le pouvoir des militaires, la
police, l'extrême-droite et les milieux qui jouissent de fortunes
d'origines douteuses.
Le tandem Ciller-Yilmaz a confié:
- le Ministère de la Justice à Mehmet Agar, le
tristement célèbre chef de la police de la période préélectorale,
- l'un des ministères d'État à Ünal Erkan, le
tristement célèbre super-gouverneur de la Région d'état d'urgence,
- un autre ministère d'État à Ayvaz Gökdemir,
célèbre pour avoir traité de "prostituées" les présidentes de trois
groupes politiques au Parlement Européen,
- le Ministère de la Culture à Agah Oktay Güner, le
deuxième homme du parti néo-fasciste MHP dans les années 70,
- le Ministère de l'environnement à Mustafa Tasar,
un autre haut représentant du parti néo-fasciste MHP dans les années 70,
- le Ministère des Travaux publics à Mehmet
Kececiler, chef des fondamentalistes au sein du ANAP.
D'après le protocole de coalition, le chef du ANAP,
Mesut Yilmaz, sera à la tête du gouvernement jusqu'à la fin de l'année,
laissant alors la place au leader du DYP, Tansu Ciller, pour les deux
années qui suivent. Ensuite, Yilmaz occupera à nouveau le poste
jusqu'au terme de la quatrième année. Finalement, la cinquième
année, un député DYP prendra le gouvernement en charge pour mener le
partenariat jusqu'aux élections générales.
C'est simplement un procédé logique dont le
fonctionnement avait été bloqué par la rivalité personnelle entre
Ciller et Yilmaz.
Au cours de la campagne électorale, les leaders des
deux partis se sont exercés à un duel verbal caractérisé par son âpreté
et ses surenchères. Ce duel était de temps en temps ravivé au cours des
deux mois qui ont suivi les élections du 24 décembre, accentuant ainsi
la crise de confiance entre les deux futurs partenaires de
coalition. Tout le monde a encore en mémoire que Yilmaz a appelé
Tansu Ciller et son entourage proche, y compris son mari Özer Ciller,
de "gang du château littoral". De plus, il a promis au peuple d'envoyer
Ciller devant la Cour Suprême en raison des corruptions et des
irrégularités dont elle a été l'auteur s'il devient premier ministre.
D'autre part, Ciller a parlé de Yilmaz comme "escroc
et fugitif". Pendant qu'ils étaient au gouvernement, les milieux DYP
ont envoyé deux anciens ministres ANAP devant la Cour Suprême pour
corruption, et ceci a déclenché les hostilités entre les deux partis.
Lorsque les résultats des élections les obligèrent à
former une coalition, ces accusations réciproques ont été mises de côté
mais la question de savoir qui allait être le premier à occuper le
poste de chef du gouvernement s'est avérée être un obstacle majeur à la
concrétisation d'une coalition de la Voie Principale. Face à
l'insistance de Ciller pour être la première à occuper la place de
Premier ministre au cours de la tournante, Yilmaz a pris l'initiative
de mettre sur pied un gouvernement de coalition avec le RP.
Alors que les pourparlers entre le ANAP et le RP
s'approchaient de la phase de formation d'un gouvernement de coalition
sous la direction de Yilmaz, les militaires d'une part, les
Etats-Unis d'autre part, ont commencé à exhorter Ciller de modérer son
attitude vis-à-vis de Yilmaz. Le Chef de l'Etat-Major, le général
Ismail Hakki Karadayi, a rencontré Ciller à Uludag et a émis un
avertissement, disant que les militaires ne toléreront pas un
gouvernement dominé par les islamistes et il lui a demandé d'être plus
conciliante dans ses pourparlers avec le ANAP. En fait, la
véritable inquiétude des militaires ne portait pas sur l'orientation
fondamentaliste du RP, parce que l'Armée elle-même avait encouragé la
montée de l'intégrisme après le coup d'état de 1980 et n'était pas du
tout ennuyée par les concessions faites aux islamistes par Ciller au
cours de ses trois années de pouvoir. Les militaires avaient peur que
le RP s'oppose aux options militaires au sujet de la question kurde et
qu'il établisse un dialogue politique avec le mouvement national kurde.
Entre-temps, Robert Squire, le conseiller américain
de Ciller, qui avait auparavant fourni des services de consultance au
président américain Bill Clinton, l'influençait dans le même sens.
Les gouvernements et médias occidentaux ont très
souvent exprimé leurs craintes de voir des islamistes au gouvernement
juste après la mise en marche du processus d'Union douanière.
Ce qui est encore plus important, c'est que Ciller a
finalement pris conscience du fait que, si jamais la coalition ANAP-RP
était constituée, elle pourrait être traduite devant la Cour Suprême et
sa carrière politique pourrait alors prendre fin de manière désastreuse
et honteuse. Donc, en échange de la promesse de recevoir le poste
de Premier ministre en 1987-1988, Ciller a abandonné son
insistance concernant le fait d'être la première à occuper cette
fonction, malgré l'avantage numérique en sièges, 135 contre 126, que
possède son parti.
Quant à Yilmaz, qui subissait déjà la pression des
militaires et celle de l'aile libérale de son propre parti, il a dû
réaliser un revirement spectaculaire consécutivement au pas en arrière
fait par Ciller. Bien qu'Erbakan ait accepté de laisser au ANAP
la primauté concernant le tour d'occupation de la fonction de Premier
ministre et presque tous les ministères clés malgré la supériorité en
sièges du RP, 158 contre 126, Yilmaz a renoncé au dernier moment à
former un gouvernement RP-ANAP en inventant certains prétextes mineurs
et a accepté de partager le pouvoir avec Ciller, dans un gouvernement
de minorité.
Toutes ces manoeuvres, et en particulier les
ingérences des militaires, étaient entièrement anti-démocratiques et
immorales, mais les mass-média prétendant être les défenseurs de la
"laïcité" se sont réjouis de leur succès dans le refus d'accorder du
pouvoir au Refah en tant que partenaire d'une coalition. Ainsi,
Ciller, la politicienne la plus corrompue de l'histoire de la Turquie,
s'est évitée de devoir rendre des comptes sur sa fortune aux origines
douteuses et s'est assurée de retrouver dans dix mois sa place de
Premier ministre pour deux ans.
Toutefois, les sièges réunis des députés ANAP et DYP
ne totalisent que 261 et il manque toujours 14 voix à l'alliance pour
avoir la majorité absolue dans la législature qui en comporte 550.
Après le retour de sept députés ANAP au sein de leur propre Parti de la
Grande Unité (BBP), d'extrême-droite, le nombre des députés du ANAP est
descendu à 126.
C'est le Parti de la Gauche démocratique (DSP) de
Bülent Ecevit qui vient à la rescousse de ce gouvernement de droite.
Comme une majorité simple suffit au gouvernement pour obtenir le vote
de confiance, le DSP a promis qu'il s'abstiendrait de voter, afin
d'assurer un vote de confiance à la majorité simple des suffrages.
Le protocole de coalition signé par Yilmaz et Ciller
est plein de promesses qui avaient déjà été faites quatre ans plus tôt
et qui n'avaient jamais été mises en pratique même sous une coalition
partagée par le CHP social-démocrate.
Le nouveau gouvernement n'a déclaré aucune intention
de trouver une solution politique au problème kurde. Au contraire, sa
composition ultra-conservatrice et nationaliste donne un signe dans le
sens du maintien du terrorisme d'état.
Avec l'exclusion du premier parti, le RP, du
partenariat gouvernemental, la Turquie est-elle maintenant vraiment à
l'abri de la menace islamiste?
Le rédacteur en chef de Turkish Daily News, Ilnur
Cevik, répond comme suit à cette question le 27 février 1996:
"Ceux qui maintenant se réjouissent de leur succès
en refusant un minimum de pouvoir au Refah, en tant que partenaire de
la coalition, ne semblent pas réaliser le fait que les multiples
raisons et facteurs qui ont aidé le Refah à se développer sont toujours
valables. Les masses ont le sentiment que les partis
traditionnels les ont laissées tomber et qu'ils aident les riches à
devenir plus riches et les pauvres plus pauvres. C'est la raison du
succès du Refah qui a réussi à dépeindre lui-même comme un parti pour
les pauvres et les opprimés. Le Refah est une des réalités de ce pays.
Prétendre qu'il n'existe pas va seulement aggraver les choses".
De toute évidence, les gouvernements de La Voie
Principale, menés par les politiciens les plus corrompus et les
représentants du terrorisme d'état serviront au renforcement du Refah
et à son arrivée au pouvoir en l'an 2000. Et si les sociaux-démocrates
du CHP et du DSP ne parviennent pas à unir leurs forces sur base d'un
programme concret donnant la priorité à la démocratisation et à la
justice sociale, et si les forces socialistes ne s'organisent pas en un
parti politique représentatif, la future majorité RP sera probablement
une majorité absolue.
PARTIS GOUVERNEMENTAUX 261
DYP (Droite) 135
ANAP (Droite) 126
PARTIS DE L'OPPOSITION 289
RP (Islamiste) 158
BBP (Islamiste) 7
DSP (Gauche) 75
CHP (Gauche) 49
YASAR KEMAL, LE PLUS GRAND ROMANCIER DE TURQUIE, A ÉTÉ CONDAMNE A 20
MOIS
Pendant que les représentants du terrorisme d'état
se
répartissaient les postes ministériels, le 7 mars 1996, le plus grand
romancier de Turquie Yasar Kemal était condamné à 20 mois
d'emprisonnement et à 466 mille LT d'amendes par la CSE d'Istanbul pour
"incitation à la haine" sur base de l'article 312 du Code pénal turc.
Les charges contre Kemal ont pour origine deux
articles qu'il avait
publiés dans une collection d'essais intitulée "La Turquie et la
liberté d'expression".
L'un des articles était initialement écrit pour le
magazine
allemand Der Spiegel. Dans cet article, il accusait le gouvernement de
mener une "campagne de mensonges" pour dissimuler l'oppression qu'elle
exerce à l'égard des Kurdes.
QUI A COMMIS LE MASSACRE DE GÜCLÜKONAK ?
Juste avant le vote du Parlement Européen sur une
résolution appelant le gouvernement turc à accepter de négocier une
solution politique à la Question Kurde, les forces de sécurité turques
ont annoncé que des militants du PKK avaient tué 11 civils à un barrage
routier à Güclükonak, le 15 janvier 1996.
Les correspondants des principaux quotidiens et
chaînes de télévision ont été emmenés sur les lieux avec des
hélicoptères de l'Armée, pour voir les corps des victimes. Selon la
version du gouverneur de la région d'Etat d'urgence, des militants du
PKK ont stoppé un minibus à Güclükonak et ont abattu les passagers
après avoir contrôlé leurs cartes d'indentité. Bien que le PKK ait
immédiatement réfuté cette accusation, les médias turcs, sous la
pression des militaires et du gouvernement, a crédité la version
officielle et a publié d'horribles photos représentant "le crime du
PKK".
Quelques jours plus tard, le 19 janvier, la section
de Diyarbakir de l'Association des Droits de l'Homme (IHD) a annoncé
que le massacre avait été commis, non pas par le PKK, mais par les
forces de sécurité. D'après ce rapport, six vitcimes étaient
originaires de la province de Sirnak; elles avaient été arrêtées une
semaine auparavant et emmenées au Q.G. militaire de Taskonak. Le
président de l'IHD de Diyarbakir, Mahmut Sakar, a dit que les villages
en question, bien que connus comme recruteurs de milice de village, ont
voté dans leur majorité pour le HADEP pro-kurde et ont été persécutés
par les forces de sécurité depuis les élections. D'autre part, les fils
des six villageois avaient précédemment rejoint les forces du PKK.
Le 12 février, un groupe d'activistes pour la paix
se sont rendus à Diyarbakir pour enquêter sur le massacre de
Güclükonak. Le groupe était composé de représentants des organisations
des Droits de l'homme, dont le mouvement islamiste Mazlum-Der et
l'Association des Droits de l'Homme, des syndicats, des partis
politiques, des journalistes, des écrivains, des artistes, des éditeurs
de même que le parlementaire allemand d'origine turque du parti des
Verts, Cem Özdemir.
La mission baptisée Ensemble pour la Paix a conclu
après avoir écouté et observé in situ que, contrairement aux
accusations officielles dirigées contre le PKK, les villageois ont été
arrêtés et ensuite ont fait l'objet d'exécutions sommaires de la part
des forces de sécurité présentes dans la région.
"L'attaque semble avoir été complotée par certaines
forces au sein de l'Etat, qui cherche à dévaluer le cessez-le-feu
déclaré unilatéralement par le PKK le 14 décembre", a dit le député
allemand Özdemir.
TROUBLES CONSTANTS DANS PRISONS SURPEUPLÉES
Les prisons turques ont été, en décembre et janvier,
la scène de violentes confrontations entre les prisonniers politiques
et les forces de l'Etat. Les incidents sanglants de la Prison Umraniye
d'Istanbul se sont terminés par la mort de quatre prisonniers
politiques ainsi que des blessures chez beaucoup d'autres prisonniers,
et certains agents de sécurité ont été gravement blessés.
Les conditions de détention inhumaines avaient mené
en décembre à une série d'actions de protestations par les prisonniers
politiques dans cette prison spéciale.
Les récents incidents sanglants ont débuté le 4
janvier lorsque des avocats de l'Association des Droits de l'Homme
(IHD) ont demandé à parler à certains prisonniers politiques. Cette
demande a été rejetée par l'administration de la prison sous prétexte
qu'était menée une opération conjointe de sécurité par la gendarmerie
et la police sur ordre du Ministre de l'Intérieur.
Les avocats du Bureau Juridique du Peuple ont
déclaré que circulaient, avant l'opération, parmi les forces de
sécurité, les photographies des prisonniers instigateurs des émeutes de
décembre.
Durant l'opération, les prisonniers politiques
Abdülmecit Seckin, Riza Boybas, Orhan Özen et Gültekin Beyhan ont été
battus à mort. Plus de 120 prisonniers, dont la plupart étaient
blessés, ont été mis en état d'arrestation.
Sur ces incidents, les troubles ont éclaté dans
d'autres prisons à travers toute la Turquie et des manifestations de
masse contre la brutalité de l'état ont pris place dans les rues
d'Istanbul. Au cours des funérailles de ceux qui avaient été
tués, des échauffourées ont eu lieu entre les manifestants et la
police. Après quoi, plus de 2.000 personnes ont été arrêtées.
Entre-temps, le journaliste Metin Göktepe perdait la vie en garde à vue.
Quand les nouvelles des morts et des blessures à la
prison d'Ümraniye ont atteint les autres prisons, les prisonniers
politiques de la prison de Bayrampasa à Istanbul et de la Prison de
Buca à Izmir ont pris en otage des membres des personnels et ont
commencé les émeutes. Celles-ci ont été suivies par des actions
similaires dans les prisons d'Ankara, de Yozgat, de Buca et de Ceyhan.
Les actions de protestations se sont terminées le 9
janvier après un accord intervenu entre l'IHD et les autorités
carcérales pour améliorer les conditions d'emprisonnement.
Toutefois, de pareilles émeutes peuvent recommencer
à tout moment tant que les arrestations de masse continueront de
surpeupler les prisons turques spécialement construites pour les
prisonniers politiques. La capacité des prisons de type E est limitée à
900 occupants alors qu'environ 9.000 détenus et condamnés y sont pour
le moment incarcérés.
Selon les chiffres fournis par le Ministère de la
Justice, il y avait en Turquie 49.451 détenus et condamnés parmi
lesquels 8.624 étaient des prisonniers politiques. Parmi ces
derniers, 8.286 étaient des prisonniers de gauche ou kurdes, tandis que
le nombre de prisonniers politiques de droite ne s'élevait qu'à 338.
Des 8.624 prisonniers politiques, 5.580 sont des
détenus dont les procès sont en cours et 3.044 sont des condamnés.
IMAGES DE LA SAUVAGERIE DES SOLDATS TURCS
Le journal The European, dans son édition du 11-17
janvier 1996, a publié les images de la sauvagerie commise par les
soldats turcs au Kurdistan, sous le titre "la Turquie veut rejoindre
l'Union. D'abord il doit mettre fin à des scènes comme celles-ci."
Dans son commentaire, The European dit :
"Les images publiés sur cette page sont extrait du
conflit brutal entre l'armée turc et la minorité kurde dans le sud-est
du pays.
"Ils sont les moins horrifiant d'un ensemble de
douze images passés au European et qui montreraient des troupes
gouvernementales turques en train de célébrer d'une manière barbare une
victoire sur leur ennemi kurde. Ayant décapité quatre combattants
kurdes, ils sont en train d'exhiber leur têtes, les portant en triomphe.
"Ces photographies macabres fournissent quelques
images qui résument onze ans de guerre qui sont tout oubliés dans les
bouleversements dramatiques du Moyen-Orient, la chute de la puissance
soviétique et la guerre bosniaque. Mais si elles sont authentiques - et
The European n'a montré aucune raison de croire qu'elles ne l'étaient
pas - elles sont aussi la preuve graphique de soutenir ceux qui en
Europe croient que la situation des droits de l'homme en Turquie la
rend inapte à une adhésion à l'Union Européenne à laquelle elle aspire.
"C'était la situation des droits de l'homme qui
était au centre des discutions lorsque le Parlement Européen a ratifié
le 13 décembre l'Union douanière entre la Turquie et l'Union
Européenne, un pas capital vers une pleine adhésion. Les
parlementaires européens ont accepté de ratifier l'accord par 343 voix
contre 149, mais comme Pauline Green, leader du groupe socialiste
majoritaire l'a fait 'avec regret, avec un coeur lourd et sans
enthousiasme'. Jack Lang, le parlementaire européen français du groupe
socialiste, qui était parmi ceux qui avaient voté contre, était
simplement indigné. Il a dit: 'Ma conscience ne me permettra jamais de
soutenir un accord économique avec un régime de régression et de
répression'.
"Selon les sources du European, les photographies
ont été prises dans les montagnes du sud-est de la province turque de
Hakkari en avril dernier. C'est une région où les frontières de la
Turquie convergent avec l'Iran et l'Irak, une partie du monde que les
Kurdes considèrent comme le coeur de leur Kurdistan natal. Un état
d'urgence y a prévalu au cours des deux dernières années. Les
images devraient montrer des soldats d'une unité d'élite appelé la
Brigade de Commandos de Montagne de Hakkari, basé dans la ville de
Hakkari, 80 kilomètres au nord de la frontière irakienne, posant dans
la neige pour des instantanés avec les têtes coupées de quatre Kurdes.
"Que les victimes aient été membres ou non de
l'armée insurrectionnelle marxiste hors-la-loi connue en tant que Parti
Ouvrier du Kurdistan (PKK), les images montrent que certains étaient
atteint mortellement par balles, alors que d'autres semblaient avoir
été gardés en vie, leurs vêtements enlevés et leurs membres liés avant
leur exécution et leur décapitation.
"The European a entendu dire que lorsque les soldats
étaient retournés à leur base à Hakkari, ils avaient réalisé des
photographies pour montrer des images de leur victoire à leurs
camarades. L'un d'entre eux, dont le nom est connu du European et a été
révélé aux autorités turque, a vendu des images aux autres soldats pour
une somme de 100.000 lires turques (2 $) la pièce. Un de ces soldats,
lui-même vétéran de la campagne kurde mais dégoûté par la barbarie
endurcie montrée par les photographies, et leur dissémination
ultérieure, a pris le risque de les envoyés par la poste à un ami à
Londres. L'ami, un ingénieur électricien turc qui a fui la Turquie deux
ans auparavant, les a transmis au centre d'information du Kurdistan,
qui représente l'importante communauté kurde à Londres - récemment, le
8 janvier, les manifestants kurdes ont pris brièvement en otage des
employés d'un centre commercial turc situé dans la capitale britannique.
"Les images sont des preuves de la sauvagerie sans
pitié avec laquelle la guerre est menée - par les deux parties, d'après
les organisations des droits de l'homme. Presque vingt mille
personnes ont perdu leur vie, selon les estimations occidentales et
turques. L'indépendant Human Rights Watch basé à New York est indigné
que les partenaires de la Turquie au sein de l'OTAN aient étendu
généreusement leur soutien politique et militaire, l'aidant ainsi à
développer une formidable industrie d'armement et un large
approvisionnement en armes, souvent gratuit ou à coût réduit. Le soldat
vu en train de poser dans la neige avec une longue arme pourvue d'un
viseur téléscopique tient un fusil SVD sniper. Il s'agit d'une arme
fabriquée à l'origine dans l'ancienne Allemagne de l'Est. Ces armes ont
été délivrées à la Turquie après la réunification de l'Allemagne.
"Ces images sont tellement choquantes que chaque
personne pourrait nous damner pour leur publication. Le journal a donné
à la Turquie de nombreuse opportunité de réfuter les critiques portées
à l'encontre de sa situation des droits de l'homme. Nous reconnaissons
que la plupart de ses propres citoyens seront également écoeurés par
une barbarie tellement visible. L'Europe jugera la Turquie part
la manière dont il considère ces allégations. Si la conclusion est que
les forces turques ont commis ces atrocités, les coupables et leurs
officiers devraient être sévèrement punis. De même, si les images se
révèlent être de la propagante kurde leur cause sera profondément
touchée. C'est le rôle de la Turquie d'enquêter rapidement à
cause de ses actes brutaux qui ont été commis à l'intérieur de ses
frontières internationales reconnues. Ce sont des images de l'ère de
Genghis Khan, non d'une Europe civilisée qui approche le 21ème siècle".
Les autorités turques ont affirmé après cette
publication que toutes les images étaient des photos montages d'après
le résultat des analyses sur les photos réalisées dans les laboratoires
turques.
Cependant, The European, le 18 janvier, a cité un
expert indépendant qui travaille chez le géant photographique
international Kodak qui déclarait qu'il ne pouvait voir aucune preuve
de manipulation sur les photographies.
Le 20 janvier, le quotidien Cumhuriyet a rapporté
que la Turquie intenterait une action légale contre The European et un
journal écossais, The Daily Record, pour avoir tenté de diffamer la
Turquie.
The Daily Record a aussi raconté que de nombreux
diplomates turcs étaient impliqués dans le trafic de drogue.
UN NOUVEAU PARTI SOCIALISTE EN TURQUIE: ÖDP
Un nouveau parti politique est entré dans l'arène
politique turque le 22 janvier en se déclarant lui-même prêt à remplir
ce qu'il appelle "le vide dans l'aile socialiste" de la politique
turque." Le Parti de la Liberté et de la Solidarité (ÖDP) cherche
à réunir différentes factions de gauche sous un même toit.
La création du nouveau parti a été célébré en
janvier 21 dans une salle de sports avec la participation de ses
membres fondateurs, de ses supporters et d'intellectuels.
Dans sa déclaration initiale, l'ÖDP dit:
"La Turquie traverse la crise la plus profonde de
son histoire. La demande pour le changement est grandissante à tous les
niveaux de la société. La tension entre l'Etat et la société accentue
la crise, ce qui nécessite la réformation de l'Etat et de la société".
Après le coup d'état de 1980, les socialistes turcs
ont été sévèrement brimés. Bien que de nouveaux groupes et partis
ont vu le jour après le retour du régime parlementaire en 1983, l'unité
des socialistes est demeurée un rêve lointain.
Le Parti Socialiste (SP) qui avait été interdit par
la Cour constitutionnelle et qui actuellement continue sous le nom de
Parti Ouvrier (IP) n'a pas été capable d'unir tous les socialistes. Aux
dernières élections du 24 décembre, il n'a obtenu que 0,22% des votes.
Pendant ce temps-là, les efforts pour unir la gauche
ont commencé, il y a un an, à l'initiative du Parti Socialiste Uni
(BSP) et de l'initiative Construisons Ensemble le Futur (GBK); le
premier était l'émanation du Parti Communiste de Turquie (TKP) et de
certains autres partis et groupes pro-soviétiques, le second était
principalement constitué des sympathisants de la Voie Révolutionnaire
(Dev-Yol) et certains autres groupes marxistes radicaux.
Enfin réunis sous la bannière du Parti de la Liberté
et de la Solidarité (ÖDP), ils appellent les autres opposants au régime
de se joindre au nouveau parti.
Le président d'ÖDP Ufuk Uras, s'exprimant lors d'une
conférence de presse, a dit que le nouveau parti ne se tournait pas
vers les partis de gauche mais vers le public. "Les travailleurs
deviennent de plus en plus pauvres, le racisme et le chauvinisme se
sont implantés dans la société et l'intégrisme menace le pays.
Notre parti cherche à représenter ceux qui s'opposent à l'ordre actuel
en Turquie. Notre désir est de trouver des solutions
fondamentales aux problèmes de base. ÖDP n'abandonnera jamais la
politique en Turquie aux intrigues des politiciens", a-t-il dit.
Actuellement, les sociaux-démocrates sont organisés
en deux partis différents, le Parti Républicain du Peuple (CHP) et le
Parti de la Gauche démocratique (DSP). Récemment, ils ont obtenu
ensemble un total de 25,35% des suffrages.
A la gauche de la social-démocratie prend désormais
place ÖDP, le Parti Ouvrier (IP) et le Parti du Pouvoir Socialiste
(SIP) en tant que partis marxistes.
A côté de cela, deux partis pro-kurdes, le Parti de
la Démocratie du Peuple (HADEP), qui a récemment obtenu 4,17% des votes
et le Parti de la Démocratie et de la Transformation (DDP) prennent
aussi place à gauche des partis sociaux-démocrates.
Quant aux organisations illégales, le Parti Ouvrier
du Kurdistan (PKK) dispose du plus grand soutien de masse,
principalement au sein de la population kurde, et poursuit sa lutte
armée contre l'Etat turc. Un autre parti pro-kurde hors-la-loi est le
Parti Socialiste du Kurdistan (PSK).
Le Parti/Front Révolutionnaire de la Libération du
Peuple (DHKP/C), émanation de la Gauche Révolutionnaire (Dev-Sol), le
Parti Communiste Marxiste-Léniniste (MLKP), émanation du TKP-ML,
l'Union Révolutionnaire des Communistes (TIKB) et le Parti Communiste
Révolutionnaire de Turquie (TDKP) sont les principales organisations
clandestines de la gauche radicale en Turquie.
LA VIOLENCE POLITIQUE FRAPPE LE MONDE DES AFFAIRES
La violence politique à récemment frappé l'une des
plus riches familles du pays lorsque deux hommes armés sont entrés dans
le bureau principal de la Sabanci Holding à Istanbul et atteint
mortellement Özdemir Sabanci et deux de ses collaborateurs.
L'assassinat perpétré le 9 janvier au 25 ième étage un centre
commercial aussi bien protégé a lancé des ondes de choc à travers toute
la Turquie.
Les deux autres personnes abattues étaient Haluk
Görgün, le directeur général de Toyotasa, et Nilgün Hasefe, la
secrétaire privée du président du groupe.
Le Parti/Front Révolutionnaire pour la Libération du
Peuple (DHKP/C), une émanation de Dev-Sol (Gauche Révolutionnaire), a
revendiqué l'attentat dans un appel téléphonique à l'hebdomadaire de
gauche Kurtulus.
"En représailles aux meurtres des combattants du
peuple révolutionnaire, nous avons pris pour cible le bâtiment du
groupe Sabanci et nous les avons punis par la mort", disait leur
déclaration.
Une semaine auparavant, quatre prisonniers
politiques étaient morts au cours d'une échauffourée dans la prison
d'Umraniye à Istanbul.
Après l'assassinat, la police a lancé une chasse à
l'homme à Istanbul pour arrêter trois suspects, mais n'a pu trouver
aucun indice à la fin du mois de février.
Les hommes d'affaires turcs, irrités par le meurtre
de deux des plus grands industrialistes, ont exhorté les chefs des
partis à mettre fin à trois mois de troubles politiques qui,
disent-ils, a préparé le terrain pour les attaques de la guérilla
gauchiste.
Murat Bekdik, président de l'Association des Jeunes
Hommes d'affaires (TGIAD), a dit: "La Turquie ne peut pas aller à la
rencontre de l'an 2.000 avec de la haine et de la polarisation. Le seul
objectif doit être celui de former un gouvernement sérieux, capable
d'apporter des solutions aux problèmes majeurs."
L'Union des Chambres et des Bourses de Turquie
(TOBB) craint d'autres attaques dirigées contre les hommes d'affaires
tant que le climat politique agité ne trouve pas de solution. "La
communauté turque de libre-entreprise a toujours rencontré de telles
attaques lorsque les autorités politiques et administratives
s'affaiblissaient et les gouvernements n'étaient pas formés", a dit le
président de la TOBB Fuat Miras.
"Nous avertissons les politiciens que le vide
politique en Turquie provoque de telles attaques. La réconciliation
politique devrait s'achever le plus vite possible et le vide politique
devrait être rempli", a dit Refik Baydur, chef du Syndicat des
Employeurs de Turquie (TISK).
Özdemir Sabanci, 54 ans, assassiné dans les bureaux
à la mode de la direction de sa compagnie à Istanbul, était le plus
jeune fils d'une dynastie financière qui dirige le deuxième plus grand
holding de la Turquie. Il était le patron du groupe automobile de la
Sabanci Holding.
Le dernier grand coup d'Özdemir Sabanci, ingénieur
chimiste de formation, était une usine automobile d'une valeur de 325
millions $ près d'Istanbul réalisée en 1990 dans le cadre d'une joint
venture avec le géant japonais de l'automobile Toyota - le plus grand
investissement unique japonais en Turquie. La société a commencé sa
production en 1994.
Le holding Sabanci a d'abord développé des usines de
textile à Adana, et a ensuite émigré à Istanbul pour élargir les
secteurs d'activité de ses sociétés qui vont du textile à la banque, en
passant par l'alimentation.
A part Toyota, le holding a effectué des joint
ventures avec les plus grandes compagnies occidentales et d'autres
compagnies japonaises comme Mitsubishi, Hilton, Dresdner Bank, BNP,
Philip Morris, Kraft Jacobs et Bridgestone.
ALÉVIS FORCÉS D'ÉVACUER DES VILLAGES À SIVAS
Le terrorisme d'Etat, après les Kurdes, a récemment
pris pour cible la population alévite de la province de Sivas. Les
associations et parlementaires locaux ont très souvent annoncé leur
inquiétude et ont appelé pour une action immédiate contre les
opérations militaires forçant les citoyens alévites à évacuer leurs
villages dans cette province d'Anatolie centrale.
Les associations culturelles alévites comme Divrigi,
Pir Sultan Abdal et Imranli, dans un rapport préliminaire à propos de
la pression continue, ont déclaré que de nombreux citoyens avaient été
forcés de quitter leur maisons comme résultat des opérations militaires
dans les villages principalement peuplés par des Alévis et des Kurdes.
"Les membres des unités spéciales ont provoqué des
villageois, disant qu'ils avaient des listes en leurs mains et que les
villages seraient éventuellement évacués. Ils ont aussi demandé aux
villageois s'ils avaient une mosquée ou un endroit de prière et, suite
à une réponse négative de leur part, ils les ont menacés en leur
demandant: 'N'êtes-vous pas musulmans?'" a annoncé le rapport.
Le rapport, basé sur des informations provenant de
sources et de journaux locaux, a averti que l'on pourrait s'attendre à
de sérieux troubles sociaux dans la région. Le rapport a également
affirmé que l'on s'attendait à ce que la population alévito-kurde
quitte la région, incapable de s'accommoder de la mentalité de siège et
des opérations en cours.
Le député CHP de Sivas, Mehmet Isik, a dit que les
forces de sécurité faisaient pression sur les citoyens sous le prétexte
de rechercher des séparatistes. "La nuit, ils (les forces de sécurité)
se promènent en habits civils et demandent à manger aux citoyens,
disant qu'ils sont membres du PKK, et le lendemain ils dénoncent ceux
qui leur ont donné du pain et ils les accusent de collaboration avec
les séparatistes" ajoute-t-il.
Pendant ce temps-là, le 6 février, le gouvernement
de Sivas a annoncé officiellement que 63 villages avaient déjà été
évacués. Les autorités ont confirmé que plus de 150 écoles dans les
districts de Divrigi et de Zara ont été fermées. Selon les rapports,
environ 500 habitants de nombreux villages ont été mis en état
d'arrestation, et près de 300 villages sont sous blocus.
EMPRISONNEMENT POUR AMOUR D'ADOLESCENTS
Un serveur turc de 18 ans, sans emploi, a été arrêté
à Kahramanmaras le 23 janvier pour avoir entretenu des relations
sexuelles avec une fille britannique de 13 ans bien qu'avec laquelle il
se soit marié au cours d'une cérémonie musulmane avec le consentement
des parents de la fille. Leur mariage a abouti devant les
tribunaux après qu'il ait fait la une dans les médias
britanniques et, ensuite, turcs.
La fille et le garçon ont été interrogés par le
procureur, à cause de l'âge de la fille, et elle a dû subir un test de
virginité dont le résultat s'est avéré négatif. "Il a été arrêté
pour avoir eu des relations sexuelles avec une fille mineure", a dit le
procureur général de la ville méridionale de Kahramanmaras.
La chaîne de télévision privée turque ATV a montré
la fille, Sarah Cook, portant le traditionnel voile islamique, et
baissant les yeux lorsqu'un docteur de l'hôpital, a dit aux reporters
qu'elle n'était plus vierge. "Nous sommes très heureux", a t-elle dit
aux journalistes avant de partir rapidement avec la famille de son mari.
Sarah s'est mariée, au cours d'une cérémonie
musulmane, il y a deux semaines, à Musa Komeagac, qui est âgé de 18
ans, et qu'elle avait rencontré en vacances sur la Côte turque l'année
dernière. Le mariage religieux n'est pas officiellement reconnu
en Turquie, mais les couples sont libres de l'avoir célébré.
En Turquie, l'âge limite pour les filles de
contracter un mariage est fixé à 15 ans, à condition qu'il y ait
consentement des parents, mais les autorités légales disent que ceci
peut être abaissé au moyen d'un rapport médical faisant état d'une
aptitude physique de la fille à se marier, de nouveau sous condition du
consentement parental.
Parfois, les filles turques, en général issues de
milieux conservateurs, voient leurs parents leur imposer un test de
virginité s'ils les soupçonnent d'avoir eu des relations sexuelles en
étant mineures.
Les médias turcs et les autorités locales de
Kahramanmaras ont été plutôt sympathiques à l'égard du jeune couple et
ont surnommé la fille "notre bru nationale".
Sarah Cook est retournée en Angleterre, le 6
janvier, avec sa mère.
Le 15 février, une cour à Kahramanmaras a libéré
Musa Komeagac. Le juge a dit que Komeagac pouvait quitter la prison où
il se trouve depuis son arrestation le 23 janvier pour relations
sexuelles avec une mineure d'age, Cook, puisque son mariage célébré au
cours d'une cérémonie musulmane non officielle, avait la bénédiction
des parents.
L'une des premières choses qu'il a fait lorsqu'il a
été libéré, a été d'emprunter le téléphone portable d'un journaliste
pour appeler sa "juliette", Sarah Cook, en Grande-Bretagne.
LE PARLEMENT EUROPEEN APPELLE LA TURQUIE A UN CESSEZ-LE-FEU
Le 18 janvier 1996, le Parlement Européen a adopté
une nouvelle résolution saluant le cessez-le-feu unilatéral décrété par
le PKK et appelant le gouvernement turc à entamer un dialogue national
avec l'objectif de trouver une solution politique et non violente aux
problèmes de la région du Sud-est.
En réponse à cet appel, la Turquie a critiqué la
résolution en disant qu'elle était "une démarche partiale et hostile".
Le porte-parole du Ministre des Affaires étrangères, Ömer Akbel,
prétendant que la résolution avait "pris au sérieux l'appel à un
cessez-le-feu lancé par le PKK", a dit: "Cette attitude sape la
crédibilité et le prestige du Parlement Européen".
Il a ajouté que la décision montrait une fois de
plus combien le Parlement Européen, qui avait voté le mois dernier an
faveur de la réalisation de l'Union douanière avec la Turquie, était
influencé par les "milieux radicaux et militants" contre la Turquie.
Ci-dessous se trouve le texte intégral de la
Résolution du Parlement Européen:
"Le Parlement européen,
"vu ses résolutions antérieures sur la Turquie, en
général, et celle du 13 décembre 1995, sur la situation des droits de
l'homme en Turquie, en particulier,
"A. souhaitant apporter sa contribution à
l'approfondissement des relations entre l'Union européenne et la
Turquie,
"B. considérant que l'élection de la Grande
assemblée nationale le 24 décembre 1995 n'a pas encore débouché sur
formation d'un nouveau gouvernement en Turquie,
"C. prenant note de l'annonce, par le président du
Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), d'un cessez-le-feu
unilatéral, premier pas sur la voie d'une solution non violente et
politique de la question kurde,
"D. considérant la vague de violence terroriste que
connaît la Turquie depuis de nombreuses semaines, notamment les
attentats visant des journalistes, des scientifiques, des hommes
politiques, des entrepreneurs et des syndicalistes, dont les dernières
victimes ont été M. Sabanci et deux de ses collaborateurs,
"E. considérant les attentats terroristes prenant
pour cible les bureaux de partis politiques, des banques, des commerces
en Turquie, ainsi que des institutions turques dans les états membres
de l'Union européenne,
"F. soulignant que, malgré la libération de
plusieurs dizaines d'intellectuels, de journalistes et d'autres
personnalités suite à la modification de la législation
anti-terroriste, de nombreuses personnes restent détenues pour des
raisons politiques,
"G. considérant qu'il en appelle, dans sa résolution
précitée, au gouvernement turc, au PKK et à d'autres organisations
turques pour qu'ils fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour
trouver à la question kurde une solution non violente et politique,
respectueuse de l'intégrité territoriale et de l'unité de la Turquie,
tout en reconnaissant que les citoyens turcs ont le droit d'oeuvrer,
par des moyens pacifiques, à une forme d'autonomie culturelle à
l'intérieur de ce pays,
"H. considérant que Mme Leyla Zana, lauréate du prix
Sakharov 1995 décerné par le Parlement européen, est maintenue en
prison en Turquie ainsi que trois autres anciens députés du Parti
travailliste démocratique (DEP), pour avoir prôné la démocratie et la
reconnaissance des droits du peuple kurde,
"I. épouvanté par les images atroces, parues dans la
presse européenne, de soldats turcs brandissant la tête tranchée de
Kurdes,
"J. considérant l'ampleur du mouvement de rébellion
qui s'est déclenché simultanément dans plusieurs prisons du pays et la
dureté avec laquelle il a été réprimé,
"K. considérant que M. Metin Göktepe, journaliste au
quotidien Evrensel, gui enquêtait sur ces événements, a été arrêté par
la police et que son cadavre a été retrouvé peu après, portant des
marques de torture,
"L. considérant que le conseil d'association entre
l'Union européenne et la Turquie a pris les mesures indispensables à la
mise en oeuvre, avant le 1er janvier 1996, de l'accord d'union
douanière conclu entre les deux parties, ce dans le prolongement de
l'avis conforme donné par le Parlement européen le 13 décembre 1995,
"M. prenant acte de l'initiative de la présidence
italienne visant à faire jouer à l'Union européenne un rôle dans la
recherche d'une solution gui mettrait un terme à la partition de l'île
de Chypre, dans le droit fil des résolutions de l'Organisation des
nations unies;
"1. se réjouit que, en dépit de la montée du vote
intégriste, les élections turques aient fait clairement apparaître
qu'une vaste majorité de la population turque refuse l'extrémisme
religieux et l'isolement de la Turquie qui en serait la conséquence et
qu'elle opte, au contraire, pour le maintien et le renforcement des
relations avec l'Union européenne et d'autres États occidentaux;
"2. invite le gouvernement turc gui sera formé à la
suite de ces récentes élections à poursuivre et à renforcer sa
politique de réformes démocratiques et de respect des droits de l'homme
et réitère tout particulièrement son appel en vue de trouver des
modalités permettant aux citoyens d'origine kurde de faire valoir leurs
droits à leur identité culturelle, sans préjudice de la garantie ni du
respect de l'unité territoriale de la Turquie;
"3. se réjouit de l'annonce d'un cessez-le-feu
unilatéral faite par le président du PKK et y décèle une première
réaction positive à l'appel lancé le 13 décembre 1995, exprime l'espoir
que le gouvernement d'Ankara y verra une contribution positive à la
recherche d'une solution pacifique du probléme et invite toutes les
parties turques concernées à profiter de l'occasion qui s'offre pour
étudier les voies et les moyens de l'ouverture d'un dialogue national
gui ait pour objectif de trouver une solution politique et non violente
aux problèmes de la région sud-est du pays;
"4. condamne les actions terroristes de tout bord
gui visent à déstabiliser le pays ainsi que les attentats terroristes
commis dans l'Union européenne,
"5. condamne l'assassinat de l'entrepreneur Sabanci
et de ses collaborateurs, s'associe à la douleur des familles des
victimes et engage le gouvernement turc à faire toute la lumière sur
les circonstances de cet attentat terroriste, comme sur d'autres
attentats commis précédemment;
"6. demande aux autorités turques d'inclure
expressément comme priorité dans le programme du futur gouvernement la
promotion du respect des droits de l'homme et notamment la lutte contre
la torture;
"7. demande que le nouveau gouvernement propose une
révision de la législation afin de permettre la libération immédiate de
Mme Leyla Zana, des trois autres anciens députés du DEP encore détenus
ainsi que des autres prisonniers politiques;
"8. demande instamment aux autorités turques
d'instituer une commission impartiale d'enquête composée d'experts afin
d'élucider les causes des décès survenus à la suite de mauvais
traitements infligés dans les commissariats de police et de l'irruption
des forces de sécurité dans les prisons;
"9. condamne l'assassinat du journaliste Metin
Göktepe et invite les autorités à clarifier sans tarder les
circonstances de son assassinat et à demander des comptes aux coupables;
"10. demande au Conseil et à la Commission de
s'assurer de la véracité de nouvelles dont la presse s'est faite l'écho
récemment, clichés à l'appui, gui montreraient des soldats turcs
brandissant la tête tranchée d'opposants présumés au gouvernement;
"11. invite les autorités turques à enquêter sur ces
faits et, s'ils étaient établis, à punir les coupables;
"12. déplore la déclaration de Mme Ciller, premier
ministre en fonction, au sujet de l'éventualité de l'intégration de la
partie septentrionale de Chypre à la République turque dans le contexte
de la future adhésion de l'île à l'Union européenne; demande
instamment, d'une part, à la Turquie de respecter les dispositions de
l'accord d'union douanière en ce qui concerne Chypre et, d'autre part,
à la Commission et au Conseil de prendre les initiatives nécessaires
pour favoriser la fin de la partition de l'île, tout en les invitant à
nommer un médiateur chargé de contribuer à trouver une solution à ce
problème;
"13. demande à la Commission de tenir ses
engagements quant au suivi de la situation des droits de l'homme en
Turquie et l'invite à lui transmettre dans les plus brefs délais le
deuxième rapport intérimaire sur les droits de l'homme en Turquie;
"14. charge son Président de transmettre la présente
résolution au Conseil, à la Commission, au gouvernement turc et à la
Grande assemblée nationale turque."
HEURES SUPPLEMENTAIRES DANS LES CSE
Il semblerait que les Cours de Sécurité d'Etat (CSE)
fassent des heures supplémentaires, et des expériences récentes
montrent qu'il est très difficile de trouver une place d'auditeur dans
les chambres d'audience.
Chaque jour, environ 100 personnes, des
intellectuels pour la plupart, y sont accusés d'avoir exprimé leurs
opinions.
Après la modification par le parlement de l'article
8 l'automne dernier, les cas d'un grand nombre de personnes devaient
être revus, certains d'entre eux devant être rejugés par les CSE.
D'après certaines sources, plus de 100 personnes ont
été acquittées grâce à l'article 8 modifié, une vue non partagée par
les avocats, qui prétendent que le nombre de condamnations a en réalité
augmenté depuis l'amendement de la loi.
Selon les données fournies par le Ministère de la
Justice, le nombre d'accusés jugés en état d'arrestation, par les CSE,
dans huit provinces, atteint 5.406, parmi lesquels 5.203 sont des
détenus de gauche.
Ensemble, avec ceux qui sont jugés sans être mis en
état d'arrestation, le nombre total des accusés dans les CSE se monte à
plus de 10 mille.
LEYLA ZANA DECERNEE ALORS QU'ELLE ÉTAIT EN PRISON
Le 17 janvier 1996, la députée kurde emprisonnée
Leyla Zana a reçu le prestigieux prix Sakharov attribué par le
Parlement Européen avec amertume face aux motifs de l'assemblée qui lui
a décerné le prix.
"Nous honorons, dans la personne de Leyla Zana, une
femme de courage, d'énergie, d'intelligence et d'une extraordinaire
abnégation de soi", a dit Klaus Haensch, le Président du Parlement
Européen, avant de tendre le prix à Mehdi Zana, le mari de la Kurde
emprisonnée.
"Leyla Zana a été élue pour la première fois au
Parlement turc en octobre 1991, comme la première femme kurde et avec
une écrasante majorité des suffrages. Elle est aujourd'hui en prison
dans le centre d'Ankara, son mandat retiré", a dit Haensch.
Il a rejeté l'idée d'une quelconque contradiction
dans le fait que le Parlement loue le travail de Zana au nom de la
population kurde de Turquie un mois après avoir approuvé l'Union
douanière entre l'UE et Ankara.
"La majorité au sein du Parlement européen, qui a
voté en faveur de l'Union douanière savait parfaitement bien qu'elle
n'allait pas apporter de chargements radicaux en Turquie du jour au
lendemain," a-t-il dit au cours d'une conférence de presse ultérieure.
"Nous avons réalisé que si nous avions dit non à l'Union douanière,
rien n'aurait changé", a dit Haensch, ajoutant que le "oui" mettrait
les 15 pays de l'UE dans une meilleure position pour influencer les
réformes démocratiques en Turquie.
Mais Danielle Mitterrand, la veuve du dernier
président français, François Mitterrand, et depuis longtemps championne
des droits des Kurdes, a déclaré à la même conférence de presse que le
prix n'était rien de plus qu'un peu de baume pour apaiser la conscience
du Parlement.
"Lorsque j'ai entendu que le prix Sakharov était
attribué à Zana, j'ai dit ... que j'espérais que ce n'était pas une
dorure de la part du Parlement - et j'ai très peur que ce soit le cas -
pour faire passer la pilule" a-t-elle dit.
Zana, née en 1961, est occupée à purger une peine de
15 ans de prison parce qu'elle est soupçonnée d'avoir été impliqué dans
des activités terroristes. Son arrestation, en même temps que ceux de
cinq autres parlementaires, a soulevé un tollé de la part des
parlementaires européens.
Zana s'est vue décerner le prix, qui porte le nom de
l'ancien dissident soviétique Andréi Sakharov, sur proposition du
groupe socialiste du parlement, fort de 217 voix, et groupe politique
le plus représenté de l'assemblée.
LA NOUVELLE LEGISLATION TURQUE HARMONISATION AVEC L'UNION DOUANIÈRE.
"La Turquie a promulgué le dernier jour de 1995 un
ensemble de nouvelles législations en vue d'harmoniser les règles sur
le commerce extérieur avec ceux des 15 pays de l'Union Européenne comme
contrepartie de l'Union douanière qui prend effet au 1er janvier 1996.
Un décret gouvernemental publié dans la Gazette Officielle a
formellement adopté la politique de commerce extérieur commune de l'UE.
Les nouveaux tarifs et droits de douane, équivalents
à ceux de l'UE, deviennent effectifs à partir du 1er janvier 1996.
Le nouveau régime d'importation, un document de 828
pages, abaisse de 10,97 pour cent à 5,8 pour cent les barrières
douanières moyennes sur les importations industrielles de pays tiers.
La Turquie a promis de s'aligner totalement après
cinq ans sur la politique de l'UE sur les préférences commerciales.
Un autre décret, publié par la suite, a levé tous
les taxes et tarifs douaniers appliqués sur l'importation de biens
industriels en provenance de l'UE. Cela représente une moyenne de 20
pour cent, mais dans certains secteurs on culmine entre 20 et 40 pour
cent.
La Commission Européenne estime que cela mènera à
doubler les exportations de l'UE à destination de la Turquie dans les
cinq ans qui viennent.
Avec l'exception notable du textile, l'UE a déjà
laissé tomber la plupart de ses droits de douane et ses quotas
concernant l'importation de produits industriels en provenance de
Turquie.
Ankara a aussi revu ses règles de commerce extérieur
concernant le secteur agricole en concordance avec ses engagements
relatifs au GATT (General Agreement on Tariffs and Trade).
Les deux parties travaillent à la réalisation d'un
libre-échange des produits agricoles pour l'an 2005, avec des
négociations portant sur des concessions mutuelles qui doivent être
entreprises entre temps.
Les barrières douanières moyennes turques contre
toutes les importations, y compris agricoles, de l'EFTA se situe à 14,4
pour cent et des autres à 18,4 pour cent.
Pour remplir les conditions de l'accord d'Union
douanière, la Turquie entrepris de respecter dans son entièreté la
politique de l'UE en matière de textiles.
Sur les voitures dont le moteur est supérieur à 3
litres, elle a promis de maintenir les tarifs douaniers qui restent
au-dessus de ceux qui prévalent dans les Tarifs Douaniers Communs de
l'UE. Elle s'est aussi engagée à coopérer à l'élaboration d'un
système de contrôle statistique pour l'importation de voitures
japonaises et, lorsque cela s'avérera nécessaire, celles produites en
Turquie.
La Turquie a aussi promis d'aligner ses lois
concernant les copyrights et les patentes sur les règles qui sont
d'application dans l'UE, et spécialement pour accélérer la mise en
oeuvre des règles de l'Uruguay Round au sujet des patentes pour les
procédés et les produits pharmaceutiques.
Ankara s'est engagé à aligner totalement ses lois
sur la législation européenne et de mettre sur pied une agence
indépendante pour leur exécution.
De même, la Turquie a accepté d'ouvrir des
négociations sur le libre-échange pour les produits qui entrent dans
les compétences de la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier
(CECA).
En résumé, les analystes s'accordent à dire que
l'alliance signifie moins de revenus mais plus d'investissements.
L'accord de commerce pourrait diminuer les recettes
de la Turquie dans les droits à l'importation et secouer certains
secteurs turcs, mais les autorités espèrent que cela attirera de
nouveaux investissements étrangers en Turquie. "Nous avons entendu dire
que certaines firmes japonaises et coréennes, comme Daewoo, se
préparent à effectuer des investissements directs en Turquie. De tels
plans deviennent de plus en plus populaires à mesure que nous nous
dirigeons vers l'Union douanière" a dit un représentant de la division
capital étranger du Trésor.
Les autorités espèrent que les Européens vont
investir davantage en Turquie où les coûts salariaux sont beaucoup plus
bas qu'en Europe. Ils disent que la Turquie, avec ses 60 millions de
consommateurs, est aussi une base pour exploiter des opportunités
d'affaires dans les proches marchés de l'Asie centrale, du Caucase, de
la Mer Noire et du Moyen-Orient.
L'UE, le plus grand partenaire commercial de la
Turquie, comptabilisant plus de la moitié de ses importations et de ses
exportations, fournira des ressources budgétaires de 375 millions ECU
(European Currency Unit) (487 millions $) sur une période de cinq ans.
La Turquie aura aussi plus facilement accès aux
fonds de la Banque Européenne d'Investissement (BEI) dans le cadre de
la nouvelle politique méditerranéenne et à de nouveaux emprunts
bancaires pour améliorer la compétitivité de l'économie turque.
L'UE pourrait aussi accorder une assistance financière
macro-économique à moyen terme sur demande de la Turquie.
Au total, la Turquie espère récolter jusqu'à 2,5
milliards ECU (3,2 milliards $) en prêts et en assistance originaires
de l'UE d'ici l'an 2001.
Le gouvernement turc a déjà ébauché un projet de loi
pour imposer des impôts spéciaux à la consommation sur le tabac, les
voitures, l'essence, les boissons alcoolisés et certains autres
biens dans le cadre de ses efforts pour alléger les charges financières
qui découlent du pacte commercial.
La Turquie signera aussi des accords de
libre-échange avec un total de neuf pays, dans le cadre de son Union
douanière avec les 15 pays de l'UE qui est entré en application au 1er
janvier 1996. Les accords de libre-échange seront signés avec la
République tchèque, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie,
la Pologne, le Maroc, la Tunisie ainsi que Israël, a rapporté l'agence
de presse Anatolie.
Les autorités du Sous-secrétariat au Commerce
Extérieur ont dit que l'accord de libre-échange avec Israël prendrait
effet à partir de la seconde moitié de 1996.
Les négociations avec la République tchèque et la
Slovaquie devraient commencer bientôt. Il y a des progrès notables dans
les négociations avec la Hongrie, et, d'après les autorités, l'accord
de libre-échange qui sera signé avec la Hongrie entrera en application
à la fin de l'année.
Les autorités disent que la Turquie devrait aussi
signer un accord de libre-échange avec la République Turque de Chypre
du Nord (RTCN) en vue d'éviter de possibles tensions dans un cadre
bilatéral de commerce. La Commission Européenne a imposé en 1994 un
embargo sur toutes les exportations de la RTCN. Les responsables disent
qu'un projet de loi concernant l'accord de libre-échange avec la RTCN à
été concocté mais qu'il ne pourra être signé que suite à une décision
politique.
La Turquie va également revoir ses relations avec
l'Organisation de Coopération Economique (ECO) en accord avec la
politique de l'UE. La Turquie, le Pakistan et l'Iran sont parmi les
membres de l'ECO.
LE BILAN DU TERRORISME D'ÉTAT EN 1995
Un total de 122 personnes sont mortes dans des
exécutions extra-légales, sous la torture ou pendant leur garde à vue
en 1995, d'après un rapport publié le 22 janvier 1996 par l'Association
des Droits de l'Homme de Turquie (IHD).
Le rapport 1995 sur les Violations des Droits de
l'Homme dit que 99 personnes ont été assassinées par des assaillants
inconnus, alors que 3.894 personnes mouraient dans les affrontements
armés.
En 1995, des 14.473 personnes qui ont été détenues
par les forces de sécurité, 2.101 ont été placées en état d'arrestation
par les tribunaux. Parmi les personnes détenues, 231 ont disparu.
Les chiffres concernant les violations des droits de
l'homme sont les suivants:
• Attaques par les assaillants
inconnus: 99 morts, 136 blessés
• Morts dans des exécutions
extra-légales, sous la torture et en détention:
122
• Tués dans des affrontements
armés: 3.894
• Attaques contre des
civils: 230 morts, 321 blessés
• Disparus au cours de leur
détention préventive: 231
• Cas de
torture: 251
• Personnes
détenues: 14.473
• Personnes
arrêtés: 2.101
• Villages
évacués: 243
• Violations des Droits du
travail: 5.326
• Bombes dans des
bureaux: 184
• Associations, syndicats et
publications interdites: 100
• Raids effectués par la police
contre les associations, syndicats et institutions de
presse: 173
• Journalistes
arrêtés: 461
• Publications
confisquées: 304
Prisonniers d'opinion:
• Sentences
données: 172 ans
• Amendes
données: 40 milliards TL
• Amendes
approuvées: 17 milliards TL
• Nombre de
prisonniers: 121 à la fin de l'année
LA VIE D'UN ANCIEN DÉPUTÉ KURDE EN DANGER
Alors que les anciens députés kurdes du DEP sont en
train de purger leurs peines de 15 ans de prison, un autre député
kurde, Abdülmelik Firat, 67 ans, était arrêté et incarcéré à la prison
de Bayrampasa à Istanbul, le 13 janvier, en application d'une décision
rendue par la Cour de Sécurité de l'Etat de Erzincan en 1993. Il est
accusé d'avoir aidé et hébergé les militants du PKK et d'avoir
contribué à la propagande séparatiste dans un discours qu'il avait
prononcé.
Le 23 février, Firat a été transféré d'Istanbul à la
prison d'Erzurum. Il sera jugé par la CSE de Erzincan le 7 mars.
Les accusations de la CSE se basent sur la
dénonciation d'un repenti du PKK qui a dit qu'il avait trouvé refuge à
la maison de Firat à Erzurum. Firat lui-même ne se trouvait pas à la
maison à ce moment-là.
L'accusation, malgré l'âge avancé, de Firat qui
souffre d'un cancer de la prostate et d'une affection cardiaque a donné
lieu à une grande protestation aussi bien en Turquie qu'à l'étranger.
Il a subi une intervention chirurgicale importante l'année passée, mais
souffre toujours de blocages partiels et complets de certaines artères.
Il a été rapporté qu'avec cette maladie coronaire critique, son
hypertension et le cancer dont il est atteint, il ne pourra pas
survivre aux conditions misérables de la prison d'Erzurum et son
emprisonnement là-bas constitue une menace pour sa vie.
La vie politique du petit-fils du Cheikh Said, le
leader du soulèvement des Kurdes, en 1995, contre la République a
commencé dans le Parti Démocrate d'Adnan Menderes et s'est poursuivi
plus tard dans le DYP du Premier Ministre Ciller.
En protestation contre la politique répressive du
gouvernement, il a démissionné du DYP, il y a quelques années et a
siégé en tant que député indépendant jusqu'aux élections du 24 décembre
1995.
Firat ne s'est pas présenté aux dernières élections,
déclarant qu'il ne voulait pas prendre part dans un parlement qui
refuse de discuter du problème kurde.
Le mandat d'arrêt émis par la CSE d' Erzincan en
1993 a été mis en application lorsqu'il a perdu son immunité
parlementaire.
UN JOURNALISTE DE GAUCHE TUE SOUS LA TORTURE
Alors que les dirigeants d'Ankara et leurs
supporters en Europe célébraient l'entrée en vigueur de l'Union
douanière, le 8 janvier, un jeune journaliste de gauche a été assassiné
sous la torture par la police, à Istanbul. L'assassinat a mené à
une campagne de protestation à l'échelle mondiale contre le régime turc.
Metin Göktepe, 27 ans, correspondant du quotidien
Evrensel a été détenu par la police pendant qu'il couvrait les
funérailles de deux militants de gauche tués durant des émeutes dans
une prison. Son corps a ensuite été trouvé près d'un gymnase. Le
journal et les défenseurs des droits de l'homme ont accusé la police
d'être à l'origine de sa mort en se basant sur des informations données
par des témoins. "Il a été battu par la police malgré le fait
qu'il ait monté sa carte de presse et a ensuite été emmené au
gymnase d'Eyüp. Les personnes détenues ont dit que Göktepe a
commencé à se sentir mal et alors séparé des autres et transféré
ailleurs...Göktepe a été tué par la police", a dit Evrensel dans une
déclaration.
Le bureau du procureur a d'abord nié cette
information prétendant que Göktepe avait été relâché de sa garde à vue
et était mort alors qu'il avait un malaise consécutif à la consommation
d'un thé dans un salon de thé. L'agence de presse officielle Anatolie a
dit qu'un examen effectué par le bureau du procureur n'a révélé aucun
signe de violence sur le corps.
Mais les avocats du Bureau Juridique du Peuple ont
dit lors d'une conférence de presse qu'ils croyaient que Göktepe avait
été battu à mort.
"J'ai vu le corps à la morgue et, sur sa tête, il y
avait des traces de coup" a dit Levent Tüzel, président du bureau
juridique. "Il était évident qu'il avait été tué sous la torture
policière et la correction".
Les associations turques de journalistes ont
protesté contre le meurtre présumé et ont accusé la police
d'intensifier leurs attaques sur les journalistes.
En fait, le rapport de l'autopsie officielle rendu
public deux jours plus tard a confirmé que Göktepe avait des lésions
traumatiques à la tête et qu'une de ses côtes était aussi cassée.
Après la publication de ce rapport, un ministre, qui
enquêtait sur la mort du journaliste, devait déclarer le 16 janvier que
le reporter était mort sous la garde à vue policière. "Ce
qui est clair, c'est que Metin (Göktepe) a été placé en garde à vue et
il a été tué durant sa garde à vue", a déclaré le ministre d'Etat
chargé de droits de l'homme pendant une conférence de presse.
"GUERRE D'OPERETTE" SUR LES ÎLOTS ET ROCHERS DE LA MER EGEE
A la fin du mois de janvier, la Turquie et la Grèce
qui entretiennent déjà une série de disputes se sont retrouvées soudain
face à un danger réel de guerre.
La crise a débuté lorsqu'un navire turc a percuté le
26 décembre un îlot inhabité de 4 hectares, appelé Kardak par les Turcs
et Imia par les Grecs, près des côtes turques. L'équipage du
bateau a refusé l'aide d'un remorqueur grec en prétextant qu'ils
étaient sur sol turc.
Interviewé par la télévision grecque, le capitaine
du cargo turc a admis avoir refusé l'aide d'un remorqueur grec parce
que les rochers étaient sur le territoire turc.
Ses déclarations ont soulevé des huées de la part
des Grecs, et aussitôt le maire de Kalymnos, accompagné d'une équipe de
journalistes, a planté le drapeau grec sur Imia/Kardak.
En représailles, des journalistes turcs du quotidien
d'Istanbul Hürriyet sont arrivés en hélicoptère pour descendre le
drapeau et hisser celui de la Turquie.
Suite à cela, des marins grecs ont été déployés sur
l'îlot pour y restaurer le drapeau grec et neuf d'entre eux y sont
restés pour le protéger.
La réaction du gouvernement turc fut de déclarer
qu'ils ne pouvaient pas tolérer un drapeau grec sur une île turque et
bientôt se positionnaient de part et d'autre plusieurs navires de
guerre armés de missiles. La Première Ministre turque Ciller lança un
ultimatum aux forces grecques pour qu'ils se retirent.
Alors que la confrontation paraissait imminente, le
Président américain Clinton recommanda un retrait mutuel dans l'intérêt
de l'unité de l'OTAN et du bon sens. Finalement, un commando turc
hissa le drapeau turc sur un autre îlot pendant que le drapeau grec
flottait toujours sur Kardak/Imia. Après cette opération destinée à
sauver la face, les deux camps prirent chacun leur drapeau avec eux et
se retirèrent des îlots.
Malgré leur retrait, chaque partie se déclara
victorieuse. "La Turquie a échoué dans ses efforts de forcer la Grèce à
négocier" a dit le Premier Ministre grec Simitis. Quant à Ciller,
elle jubilait: "La Turquie a prouvé qu'elle n'avait pas un seul caillou
à donner". Et alors que les médias et les hommes politiques grecs
vociféraient des cris de défaite nationale en accusant le gouvernement
Simitis de soumission, la Première Ministre turque Ciller était
applaudie par les médias turcs et, dans une hystérie chauvine, même par
ses adversaires politiques.
Même si le gouvernement turc semble victorieux de
cette "guerre d'opérette" provoquée par les médias, les jours qui
viennent ne semblent, à long terme, pas très roses pour Ankara.
En premier lieu, la Commission Européenne a exprimé
sa solidarité avec la Grèce.
Le Parlement Européen, dans une résolution adoptée
le 15 février, a dit qu'il était "gravement inquiété par la dangereuse
violation par la Turquie des droits souverains de la Grèce" et a
souligné que les frontières de la Grèce constituaient en même temps une
partie des frontières externes de l'UE.
Ankara a immédiatement critiqué la résolution
soutenant Athènes. "La résolution prise par le Parlement européen est
dénuée de toute base légale", a dit le Ministre turc des Affaires
étrangères dans une déclaration. "Le Parlement européen persévère dans
son attitude biaisée et reste loin d'être constructif dans ses
décisions concernant la Turquie, et émet souvent des critiques
injustes".
Par ailleurs, la question de savoir si oui ou non le
litige portant sur les rochers et îlots de la Mer Egée pouvait être
porté devant la Cour Internationale de Justice de La Haye a créé une
cacophonie parfaite dans le triangle Athènes-Ankara-Washington.
La tempête s'est calmée après que le Président Bill
Clinton a dit au cours d'une réunion gréco-américaine que les
Etats-Unis étaient "en train d'essayer de réduire les tensions et
d'envoyer la question de l'appartenance devant un tribunal
international comme le gouvernement grec l'avait proposé".
L'idée était effectivement "inspirée" par la Grèce
même si elle n'était pas exactement "proposée" par elle, comme l'a
souligné le porte-parole du Département d'Etat américain Nicholas Burns.
Dans un article publié dans le Milliyet du 25
février, Yalcin Dogan a indiqué que, d'un point de vue juridique, la
Turquie avait un dossier léger:
"Pendant la nuit où la crise a eu lieu, au cours de
son entretien téléphonique avec Clinton, la Première Ministre Ciller a
accepté l'offre de porter la question devant la Cour Internationale de
Justice. La Turquie a perdu du terrain à partir de ce moment-là.
"Il y a une clause dans le Traité de Lausanne qui
dit que la Turquie concède ses droits de souveraineté sur les
territoires situés à trois miles nautiques ou plus de ses côtes
asiatiques.
"Après la signature du Traité de Lausanne, la
question a une fois encore été mise à l'ordre du jour en 1932 mais à
cette occasion aussi la Turquie a concédé qu'il n'y avait pas de
problèmes relatifs à la "souveraineté territoriale" à propos des îles
égéennes. De plus, il était envisagé qu'une carte basée sur les
directives légales soit préparée.
"Il y a 114 îles dans l'Egée. La plupart d'entre
elles sont situées au moins à trois miles nautiques de la côte turque.
Ainsi en est-il des rochers de Kardak. Ils sont situés à 3,2 miles
nautiques de la côte turque. D'après le Traité de Lausanne et l'Accord
de 1932 qui l'a suivi, la Turquie n'aurait pas un dossier juridiquement
solide dans l'affaire des rochers de Kardak ou au sujet des 114 îles
situées dans l'Egée. Malheureusement, ceci est un fait.
Légalement parlant, la Turquie est dans une position de faiblesse. Le
fait est que la Turquie a été traînée devant La Haye, en criant sur
tout le chemin. Et La Haye ne semble pas prometteuse du tout à l'égard
de la Turquie."
TENSION ETHNIQUE GRANDISSANTE EN BULGARIE
La tension ethnique en Bulgarie, dans la ville de
Kircaali, où les gens d'origine turque sont majoritaires, a connu une
escalade après qu'une cour de Kircaali ait décidé d'annuler le résultat
des élections municipales à Kircaali où Rasim Musa, le candidat du
Mouvement pour les Droits et les Libertés (MRF) pro-turc, avait
remporté les élections.
Le MRF a accusé le gouvernement du Parti Socialiste
Bulgare (BSP) de poursuivre des politiques discriminatoires, et a
ajouté qu'il se battrait contre l'attitude du BSP.
Angel Naydenov, le gouverneur bulgare de la région
de Hasköy, qui a joué un rôle important dans l'annulation de l'élection
du candidat MRF Rasim Musa, a désigné Yasar Saban maire faisant
fonction jusqu'à ce que la tenue de nouvelles élections soit possible.
Le MRF a décidé le 15 février de retirer Yasar
Saban, de la Mairie de Kircaali, en protestation contre l'annulation
des résultats des élections locales de la ville.
D'autre part, Ankara a exprimé le 7 février son
inquiétude face à la montée d'une vague anti-turque en Bulgarie et a
appelé Sofia à ne permettre aucune montée de tension à l'égard des
citoyens d'origine turque du pays.
Les relations entre la Turquie et la Bulgarie se
sont dégradées à la fin des années 1980, lorsque les personnes
d'origine turque, forcées de changer leur noms dans le cadre d'une rude
campagne d'assimilation, se sont enfuis en Turquie. Nombre
d'entre eux, déçus par le manque d'opportunités économiques ont, malgré
tout, été dans l'obligation de retourner en Bulgarie.
Après que le leader communiste Thodor Zhivkov ait
été renversé, les relations bilatérales et le niveau de vie des Turcs
d'origine se sont améliorés. Mais de nombreux membres de la minorité
turque affirment qu'ils sont toujours sujets à des pressions ouvertes
ou couvertes de la part des autorités bulgares au quotidien.
Il y a aujourd'hui en Bulgarie plus d'un million de
citoyens Bulgares d'origine turque. Les autorités bulgares
accusent les diplomates turcs d'ingérence dans les élections locales
bulgares. Le BSP tenterait de récolter les signatures de 48
députés qui sont requises pour pouvoir introduire un recours auprès de
la Cour constitutionnelle.
Le Parti du Travail de la Mère-Patrie (ACP), qui
soutient le BSP au pouvoir, a aussi prétendu qu'Ahmet Dogan, le leader
du MRF, menaçait l'unité nationale du pays avec ses déclarations, et a
demandé la levée de l'immunité de Dogan pour que puisse s'ouvrir la
voie à des procédures judiciaires.
PROCHE DES TCHETCHENES, LOIN DES KURDES
Le 16 janvier, un commando pro-tchétchène prend en
otage les 180 passagers et les 45 membres de l'équipage du ferry
Avrasya, alors qu'il se préparait pour son voyage de Trabzon en Turquie
vers Sochi. Cet épisode éprouvant de prise d'otages qui a aggravé les
tensions historiques entre la Turquie et la Russie s'est terminé le 19
janvier dans le port d'Eregli, après une série de marchandages entre le
commando et les autorités turques, extrêmement compréhensives à l'égard
de la cause tchétchène.
Cet incident met une fois de plus en évidence
l'hypocrisie des autorités turques en ce qui concerne les nationalités.
Nous reproduisons ci-dessous l'article de Mehmet Altan publié dans le
quotidien Sabah du 22 janvier:
"L'aventure du ferry Avrasya s'est terminé sans
aucun blessé au grand soulagement de chacun. Cet incident a clairement
montré pourquoi la Turquie a été incapable de résoudre son problème
kurde. L'esprit de la relation entre l'Etat et l'individu, c.à.d., le
concept légal de 'citoyenneté' comme défini par la loi et par la
Constitution, ce qui a tristement manqué depuis la création de la
République. Ce manque devient encore plus évident lorsque des questions
comme la 'race' et la 'religion' sont en jeu.
"Pendant qu'il fait manger des excréments humains à
ses propres citoyens, il arrive à la République Turque de se sentir
plus proche de citoyens bulgares parce qu'ils sont 'co-ethniques' que
de ses propres citoyens d'origine kurde.
"Alors qu'elle arrête comme "séparatiste" Abdülmelik
Firat, une personne qui a servi en tant que parlementaire depuis ses 23
ans, la République appelle 'résistants' les gens qui détournent un
ferry, prennent ses passagers en otage et se servent d'innocents comme
bouclier humain.
"Un exemple particulièrement éclairant est le
commentaire à propos du détournement du ferry fait par l'ancien chef
d'État-major Dogan Güres qui dit qu'il avait ordonné personnellement
l'éjection des députés du Parti de la Démocratie (DEP) hors du
Parlement. Il a dit: 'Ces Tchétchènes sont de bons Turcs. Ce sont des
gens honnêtes, sains. Ce ne sont absolument pas des terroristes.
Ils essayent de faire entendre au monde la cruauté des Russes.
J'ai aussi un peu de sang tchétchène.
"Que penserions-nous si l'ancien chef d'Etat-Major
russe disait des choses similaires à propos du Parti Ouvrier du
Kurdistan (PKK) interdit?
"Qu'il est loin du concept de loi cet homme
qui a été le 'bureaucrate militaire le plus élevé' de la République de
Turquie. Quand il s'agit des gens d'origine kurde de son propre pays,
il dit qu'il les a éjectés du Parlement, et quand il s'agit des
Tchétchènes, il dit que ces pirates sont 'des gens honnêtes qui veulent
raconter l'oppression russe au monde'.
"Mais est-ce uniquement l'ancien chef
d'Etat-Major? La façon dont le commandant de la flotte parlait au
chef des pirates Mohammed Tokcan était aussi hautement significative:
"- Cher Mohamed, dis-moi ce que tu veux.
"- Eloignez les canonnières, Monsieur.
"- Mais si j'éloigne les canonnières, les bateaux de
pêche vous accosteront.
"- Quoi qu'il en soit, éloignez les, Monsieur.
"- Veux-tu autre chose de moi, Mohamed? Les
Forces Navales, tu sais, font tout pour votre sécurité.
"- Merci Monsieur.
"Le reste du monde évalue de tels événements avec
sang-froid au contraire des litanies patriotiques auxquelles on a
affaire en Turquie. Le Monde, par exemple, fait référence aux
dires du chef de l'organisation de contre-espionnage russe qui prétend
que la Turquie a envoyé des volontaires pour se battre aux côtés des
Tchétchènes et qu'elle les entraîne sur son propre sol. Le
quotidien conclut en disant que la Turquie est incapable de soutenir le
soulèvement tchétchène de manière plus explicite parce qu'elle a été
impliquée depuis 1983 dans une guerre coûteuse contre les Kurdes qui
veulent leur indépendance, une guerre qui coûte 8 milliards $ par an.
"L'incident du Avrasya a montré combien la
'mentalité militaire' reste loin dans la formulation d'une solution au
problème kurde. C'est parce que cette mentalité ne laisse aucune
place au 'concept de citoyenneté'. Si c'était le cas, l'ancien
chef d'État-major ne rêverait même pas de parler de personnes armées
qui ont détourné un bateau comme de 'personnes honnêtes, absolument pas
des terroristes'. C'est le genre de mentalité administrative qui
fait qu'un rapport, en vue de déterminer si l'un des sergents de ses
propres commandos est mort d'avoir été battu ou d'une pneumonie, ne
peut être rendu public depuis des mois - mais le commandant de la
flotte traite un pirate armé aussi chaleureusement.
"Il y a eu d'amples déclarations disant, qu'en
Turquie, il n'y a pas de discrimination fondée sur la religion, la
secte, la langue ou la race. Mais dans la pratique, nous sommes
proches des Tchétchènes et distants de nos propres citoyens d'origine
kurde. Les Kurdes sont des terroristes mais les Tchétchènes qui
se battent contre les Russes sont de 'braves gens'.
La Turquie peut-elle atteindre une base plus solide
avec autant d'hypocrisie et de manque de respect envers la loi?
Nos enfants meurent en vain et chaque année 8 milliards $ sont dépensés
dans des voies que nous ne pouvons vérifier".
LES DEFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME EN PROCÈS
Une cour pénale d'Ankara a entamé le 17 janvier le
procès de dirigeants de la Fondation des Droits de l'Homme en Turquie
(TIHV), sur base d'accusations relatives à un livre, un cadeau à Emil
Galip Sandalci.
Le livre avait été publié l'année dernière par la
TIHV, et le bureau du procureur a ouvert une procédure contre l'avocat
Turgut Inal, ancien président du Barreau de Balikesir et auteur du
livre, pour insultes à l'encontre de la loi et du Parlement.
Le procureur requiert des peines de prison qui vont
de 15 jours à six mois pour Inal ainsi que pour le président de la
TIHV, Yavuz Önen, le secrétaire général, Okan Alehan, et les membres du
Conseil d'administration, Murat Yetkin, Haldun Özen, Mehmet Vural, Veli
Lök, Mahmut Tali Öngören, Sükran Akin et Fevzi Argun.
TENSION A PROPOS DES EAUX ENTRE LA TURQUIE ET SES VOISINS
Les firmes européennes qui aident la Turquie à
construire des barrages et des centrales d'énergie sur le fleuve
Euphrate seront "punies" en perdant des opportunités d'investissement
en Syrie et en Irak, a dit le 12 février un représentant irakien en
visite en Syrie. Abdel Sattar Salman, secrétaire d'Etat au ministère
irakien
de l'irrigation, a dit que l'Irak et la Syrie intenteraient des actions
juridiques contre les sociétés qui "collaborent dans des projets en
Turquie sans la permission de tout les états où passe l'Euphrate".
L'Irak et la Syrie ont dit que les plans de la
Turquie concernant le fleuve réduiraient d'avantage la quantité d'eau
dont ils peuvent disposer. Ils accusent déjà la Turquie de prendre plus
que sa part normale de l'Euphrate qui prend sa source en Turquie et qui
s'écoule à travers la Syrie et l'Irak.
Par un accord de 1987, la Turquie est obligée
d'octroyer 500 m3/s d'eau à la Syrie. La Syrie et l'Irak veulent
augmenter cela et l'amener à 650 m3/s, accordant à chaque pays le tiers
de ce qu'ils considèrent être une voie d'eau internationale.
Entre-temps, la Ligue Arabe a appelé pour la
signature d'un accord juste qui garantit à la Syrie et à l'Irak des
droits pour le partage des eaux de l'Euphrate.
Ismet Abdulmecit, le secrétaire général de la Ligue
Arabe, cité par le quotidien Al Hayat, a sommé les pays concernés à
respecter les accords internationaux sur le partage des eaux.
Al Hayat a déclaré que l'appel de Abdulmecit pour
une réunion tripartite avait été décliné par la Turquie.
Auparavant, le gouvernement syrien avait envoyé un
mémorandum à la Ligue demandant qu'une discussion, au sujet des eaux du
fleuve Euphrate, soit incluse à l'ordre du jour du conseil ministériel,
qui doit se réunir au Caire le 13 mars.
En disant que la Turquie ne céderait pas aux
"menaces", Ankara a fait le 15 février une déclaration sur un ton
inhabituellement sévère en réponse à un avertissement iraco-syrien
adressé à la Turquie lui demandant d'arrêter la construction de deux
barrages sur l'Euphrate,
"La premier point à l'ordre du jour entre la Turquie
et la Syrie est le dossier du terrorisme. Le fait est que le chef de
l'organisation terroriste PKK continue à résider en Syrie, bien que
Damas continue à le nier' dit la déclaration.
D'autre part, Israël, l'Egypte, la Jordanie et la
Palestine envisagent de constituer un consortium pour importer de l'eau
de la Turquie, a annoncé un rapport émis le 13 février par le
gouvernement israélien.
Le rapport, intitulé "Alternatives de Développement
pour la Coopération au Moyen-Orient et dans la Région Est de la
Méditerranée 1996", avertit que le niveau bas des ressources en eau
dans la région est alarmant.
D'après le rapport, le projet le plus efficient en
termes de prix pour résoudre le problème de l'eau dans la région est le
"Projet Manavgat" de la Turquie, qui devrait s'achever d'ici la fin de
l'année.
Le rapport suggère de créer un consortium pour
transporter l'eau de Manavgat, Antalya, vers le port d'Ashkelon près de
la Bande de Gaza.
Un autre projet cité dans le rapport était le
pipeline d'eau appelé "Eau de la Paix". Le projet prévoit de
transporter les eaux des fleuves Seyhan et Ceyhan en Turquie vers
Israël et la Jordanie grâce à un pipeline qui traverserait la Syrie.
SOUTIEN MILITAIRE AMÉRICAIN AU TERRORISME D'ÉTAT TURC
La Turquie recevra 320 millions $ en aide militaire
étrangère - terme utilisé pour les emprunts destinés à financer les
ventes à l'étranger de matériel militaire américain - en 1996.
L'aide accordée à la Turquie, comme indiqué dans le projet de loi, se
compose de 320 millions $ en emprunts militaires et de 32,5 millions $
en fonds de soutien économique.
Le même projet de loi donne à la Grèce 224 millions
$ en aide militaire étrangère et rien en fonds d'assistance économique,
respectant ainsi le rapport sept à dix qui existe depuis très longtemps
sur les aides américaines accordées respectivement à la Grèce et à la
Turquie.
L'administration Clinton avait à l'origine demandé
450 millions $ pour la Turquie, mais le montant a été revu à la baisse
comme pour toutes les aides étrangères, dans le cadre de restrictions
budgétaires. De même, l'appel de l'administration pour 100 millions $
en fonds d'assistance économique n'a trouvé d'écho que pour 33,5
millions $.
Le Département américain de la défense a annoncé le
30 janvier que la Turquie prendrait livraison en novembre 1998 des
nouveaux missiles air-air AMRAAM. Ces missiles à moyenne portée
d'une technologie avancée sont en général utilisés sur les avions de
combat F-15 Eagle et F-16. Avec ces missiles, la Turquie veut accroître
sa capacité de combat.
Des contrats ont été signés avec les géants
américains de l'armement, Hughes Missile Systems et Raytheon du
Massachusetts. Les deux compagnies vont construire environ 650 missiles
chacune pour le Département américain de la défense qui, lui, va vendre
68 pour cent des missiles à divers pays dont la Turquie.
Dans le même temps, les autorités turques ont dit
que le gouvernement américain portera vraisemblablement devant le
Congrès la demande de la Turquie pour plus d'hélicoptères Super Cobra
qui seront utilisés dans le sud-est anatolien contre la guérilla
kurde. La Turquie utilise déjà dix de ces hélicoptères contre les
positions kurdes dans les montagnes.
La Turquie était en train de négocier l'achat de ces
hélicoptères depuis le printemps 1995, et cette acquisition fait partie
des programmes gouvernementaux pour renforcer les forces de sécurité
intérieures et mettre les régions du sud-est du pays à l'abri des
attaques kurdes.
D'autre part, le Sénat américain a accepté un projet
de loi qui permettra à la Turquie de transférer trois frégates de
classe Oliver Parry et de placer la Turquie en première ligne pour des
garanties de prêt aux exportations en matière de défense.
La récente acquisition par la Turquie de 120
missiles ATCAM pour 130 millions $ a fomenté une résistance au sein du
Congrès américain et a donné un coup de fouet à l'action des lobbies
ethniques qui opposaient la vente à un certain nombre de
questions telles que la situation des droits de l'homme en Turquie, la
situation à Chypre, la lutte contre le PKK et l'embargo à l'Arménie.
L'AIDE MILITAIRE AMÉRICAINE A LA TURQUIE VISE LES KURDES
Dans son numéro d'automne 1995, la revue américaine
CovertAction a publié l'article suivant sur l'aide militaire américaine
à la Turquie:
"Les armes américaines alimentent la guerre entre la
Turquie et les Kurdes. Dans ses attaques aériennes dirigées contre le
PKK et ses sympathisants, la Turquie utilise des appareils fournis par
les États-Unis, particulièrement des chasseurs F-16, d'autres avions de
combat, et des hélicoptères d'assaut AH-1 Cobra. L'année dernière, les
médias turcs ont rapporté que deux escadrons de F-16 seraient basés à
Diyarbakir parce que 'les officiels sont convaincus que les F-16 seront
efficaces contre le PKK.' Des officiels de l'ambassade de Turquie à
Washington ont confirmé que des F-16 avaient été utilisés dans
des raids aériens dirigés contre des camps du PKK profondément à
l'intérieur du Kurdistan irakien près de la frontière iranienne aux
mois de janvier et mai 1994. Des bombes à fragmentation, et des bombes
de 250 et de 1000 kg ont été utilisées contre les camps rebelles.
Ces mêmes F-16 ont survolé l'Irak cette année dans le cadre des
opérations extra-frontalières.
"Les avions ne constituent pas le seul matériel de
guerre américain qui soutient la guerre des Turcs contre les Kurdes. A
une occasion au moins, les villageois kurdes ont affirmé que les
troupes turques ayant brûlé une partie de leur village se déplaçaient
avec des véhicules blindés de transport de personnel américains M-113.
L'armée turque dispose aussi, dans le cadre de son programme pour
contrer l'insurrection une large gamme d'armement fourni, financé et
donné par les États-Unis.
"La Turquie et les États-Unis ont des relations
militaires qui remontent à longtemps, qui bénéficient à chacune des
parties et qui incluent de nombreux prêts, de la formation, des
productions communes et des primes.
"Un Accord de Coopération Militaire et Économique
commun que fournissent les États-Unis avec accès à des terrains
d'aviation, à des renseignements et à des communications
"Les Articles de Défense en Surplus (ADS) et les
programmes "cascade". (Cascade est un programme dans lequel les armes
en surplus des bases militaires américaines en Europe sont offerts en
tant que dons.) Au cours des années financières 1992-1993, la Turquie a
reçu, dans le cadre de ces programmes, plus de 1500 chars, presque 500
véhicules blindés de transport de personnel, presque 150 obusiers 28
hélicoptères d'assaut AH-1 et 29 chasseurs F4-E.
"Les livraisons proposées par les ADS en 1994
comprenaient: 110 mitrailleuses M-85, 14 hélicoptères anti-sous-marins
SH-2F LAMPS, un lance-roquettes anti-sous-marin, des munitions, et des
pièces pour mitrailleuses, obusiers, chars et avions de combat.
"Un commerce d'armes lucratif. De 1984 à 1993,
le gouvernement américain a vendu à la Turquie de l'armement pour une
valeur de 8,5 milliards $ dans le cadre du programme de Ventes
Militaires à l'Étranger, sans parler des 956 millions $ additionnels
réalisés en ventes directes privées, faisant ainsi de la Turquie le
cinquième plus grand marché parmi les acheteurs d'armes américaines.
3,5 autres milliards $ seront probablement mis sur le tapis au cours
des deux prochaines années. Parmi les acquisitions récentes, on trouve
5 hélicoptères d'attaque AH-1W Super Cobra, 51 hélicoptères de
transport Blackhawk, et 74 véhicules blindés. Un accord controversé
avec le manufacturier d'armes Alliant Techsystems destiné à fournir à
la Turquie 493 bombes à fragmentation a été suspendue par l'absence de
garantie d'exportation par le Département d'État .
"Le programme "Peace Onyx" - la pièce centrale des
relations militaires turco-américaines - est un accord de production de
F-16 pour une valeur de 7,6 milliards $. Les avions sont construits en
Turquie sous un accord de production avec Lockheed. A la fin de
l'accord en 1996, 240 seront avions seront construits.
"Les États-Unis sont évidemment le fournisseur
d'armes numéro un de la Turquie. De 1987 à 1991, les États-Unis ont
comptabilisé 77 % des livraisons d'armes. L'Allemagne est loin,
en seconde position, avec 17 %. Au cours de la décennie précédente, le
Congrès a dépensé 5,1 milliards $ en aides militaires sous la forme de
prêts et dans le cadre de programmes de Financement Militaire Étranger,
plaçant la Turquie uniquement derrière Israël et l'Égypte. Les efforts
au Congrès américain ce printemps de reporter l'aide à la Turquie en
considération d'un rapport présidentiel sur la situation des droits de
l'homme en Turquie ont échoué".
PAS DE CARTE DE PRESSE A UNE CORRESPONDANTE DE REUTERS
Aliza Marcus, une correspondante de l'agence de
presse Reuters, s'est vue refuser le renouvellement de sa carte de
presse par le gouvernement turc. Cette action empêche en fait Marcus de
continuer à travailler en Turquie. En décembre 1995, Marcus, de
même que tous les correspondants étrangers, a introduit sa demande pour
obtenir une nouvelle carte de presse; cependant, tous les
correspondants, excepté elle, l'ont reçu. Il n'y a pas eu de réponse
officielle de la part du gouvernement à la question de savoir pourquoi
on lui avait refusé le renouvellement de sa carte de presse.
Le Comité pour Protéger les Journalistes (CPJ), qui
a tenté de s'enquérir du cas de Marcus, s'est vu répondre par un
responsable du Directorat Général de la Presse et de l'Information, le
12 février, qu'elle n'avait pas reçu sa nouvelle carte parce que le
gouvernement avait été informé du fait qu'elle quittait la Turquie.
Cependant, selon le CPJ, la véritable raison pour laquelle Marcus doit
quitter la Turquie est le défaut de renouvellement de sa carte de
presse par le gouvernement.
Marcus a été la première citoyenne américaine à
tomber dans le piège de la campagne de censure du gouvernement. En
octobre 1995, Marcus a dû se rendre devant une cour pour répondre aux
accusations d'incitation à "la haine raciale" sur base de l'article 312
du Code pénal turc. Les accusations étaient relatives à une dépêche de
Reuters du 25 novembre 1994 dont elle était l'auteur et dans laquelle
elle décrivait l'évacuation forcée de villages kurdes dans le Sud-est
de la Turquie comme un élément central dans la guerre qui depuis 10 ans
oppose les militaires turcs aux guérillas kurdes. La dépêche a été
traduite par le défunt quotidien pro-kurde Özgür Ülke et imprimé
dans le journal du 26 novembre. Elle a été acquittée le 9 novembre 1995.
3,3 MILLIONS D'EMIGRES TURCS DANS 26 PAYS.
Selon les derniers chiffres donnés par le Bureau de
l'Emploi de Turquie, le 5 février, le nombre d'émigrés qui proviennent
de Turquie et qui vivent dans 26 pays différents atteint
3.305.303. Parmi eux, 1.327.500 travaillent dans ces pays soit en
tant que salariés, soit dans leur propre affaire.
La plus grande partie de cette population migrante
se trouve en Allemagne avec environ deux millions de personnes.
En Europe, il y a 2.904.000 migrants.
La répartition des migrants originaires de Turquie
comme suit:
Allemagne 1.918.395
France 268.000
Pays-Bas 264.763
USA 135.000
Arabie Saoudite 130.000
Autriche 150.000
Belgique 88.248
Suisse 78.231
Australie 49.370
CEI 40.000
Royaume-Uni 37.802
Suède 35.713
Canada 35.000
Danemark 34.658
Italie 15.000
Norvège 10.000
Chypre (RTCN) 6.308
Libye 6.236
Koweit 3.500
Finlande 1.800
Jordanie 1.591
Espagne 848
Liechtenstein 528
Afrique du Sud 500
Qatar 440
Luxembourg 220
DEUX MOIS DE TERRORISME D'ETAT
8.1, à Mersin, Cetin Karakoyun, âgé de 14 ans, est
tué sous torture au cours de sa détention.
9.1, à Cizre, l'ouvrier Maruf Göcen est abattu au
cours d'une rafle dans un cabinet dentaire.
11.1, à Istanbul, neuf étudiants d'université sont
mis en état d'arrestation par un tribunal pour avoir tenu une
conférence de presse relative aux incidents dans la prison d'Umraniye.
12.1, à Kiziltepe, Yahya Veziroglu est abattu par
des tireurs non identifiés.
14.1, Hanefi Gürcan est retrouvé assassiné à
Nusaybin.
15.1, la police arrête cinq personnes au cours d'une
rafle à Eskisehir pour des activités islamistes. A Bursa, Yalova et
Gemlik, un total de 20 personnes sont arrêtées pour des activités
illégales.
17.1, à Batman, Arafat Cakir, âgé de 15 ans, est
poignardé à mort par des membres de Hizbullah.
18.1, à Istanbul, H. Güc, âgé de 17 ans, est
hospitalisé après avoir été blessé sous torture au poste de police de
Bakirköy.
18.1, à Izmir, les forces de sécurité abattent Ercan
Özceken au cours d'une rafle dans une maison.
20.1, à Diyarbakir, Nimet Akgün est abattu par des
tireurs non identifiés.
21.1, quatre personnes à Adana et six personnes à
Van affirment avoir été torturés pendant leur détention préventive par
la police.
21.1, à Bursa, huit personnes sont mis en état
d'arrestation sous le chef des activités terroristes.
22.1, un détenu nommé Ali Ormanci est retrouvé mort
dans le poste de police à Bursa.
22.1, à Istanbul, l'ouvrier Ali Ormanci affirme
avoir été torturé pendant sa détention préventive par la police.
24.1, la CSE d'Izmir entame le procès de deux
islamistes sous le chef des activités au sein de l'IBDA-C. Yilmaz
Dalyan risque la peine capitale. Le même jour, trois personnes sont
traduites devant un tribunal pénal à Rize pour avoir participé aux
activités d'Aczimendi.
24.1, un des dirigeants de l'Organisation pour la
libération de Turquie et de Kurdistan du Nord (TKKKO), Mustafa Kemal
Kacaroglu est arrêté à Antalya.
25.1, à Istanbul, Aysel Güldaga, Tülay Sürmeli et
Ibrahim Yildirim affirment avoir été torturés pendant leur détention
préventive par la police.
28.1, le local du HADEP à Izmir est attaqué et
détruit par des militants du MHP.
28.1, la police arrête plus de 50 personnes à Izmir
sous le chef d'activisme au sein du DHKP-C.
29.1, un ancien député, Hasan Mezarci, est condamné
par une cour pénale de Bandirma à une peine de prison de 18 mois pour
avoir insulté Atatürk.
29.1, les forces de sécurité arrêtent 15 personnes à
Usak et 10 personnes à Divrigi pour des activités au sein du PKK.
30.1, à Diyarbakir, la présidente du Centre Culturel
de Mésopotamie (MKM) Nuray Sen affirme avoir été torturée à la suite de
son arrestation le 9 janvier.
31.1, à Istanbul, la police abat un sympathisant du
MHP, Ergin Tütenocak, au cours d'une rafle dans une agence immobilière.
31.1, la CSE d'Istanbul entame le procès des 22
personnes pour des activités du DHKP/C. Le procureur réclame la peine
capitale contre deux inculpés et la peine de prison allant jusqu'à 20
ans contre les autres.
31.1, les forces de sécurité arrêtent 14 personnes à
Corlu pour des activités illégales.
1.2, deux dirigeants du parti ouvrier socialiste de
Turquie (TSIP) à Eskisehir, Memduh Canbey et Gülfem Yilmaz, sont
condamnés chacun à une peine de prison d'un an et quatre mois.
1.2, la CSE d'Ankara condamne six membres du PKK aux
peines de prison allant jusque 22 ans et six mois.
2.2, un ancien dirigeant du Syndicat des
travailleurs de la Santé (Tüm-Saglik-Sen), Mahmut Konuk, est condamné
par la CSE d'Istanbul à une peine de prison d'un an et une amende de
100 millions LT en vertu de l'article 8 pour un discours qu'il avait
prononcé le 26 décembre 1993.
3.2, à Istanbul, l'Association pour les droits et
libertés contemporaines (CHÖD) est fermée par la décision du gouverneur.
5.2, à Bismil, Ihsan Polat, le frère du poète Edip
Polat, est assassiné par des protecteurs de village.
6.2, les forces de sécurité annoncent la détention
de 26 personnes à Istanbul sous le chef d'activisme au sein du DHKP-C.
6.2, à Idil, un berger est tué à l'explosion d'une
grenade abandonnée par des forces de sécurité.
7.2, quatorze employés du Ministère de la Justice
sont traduits devant un tribunal à Izmir pour avoir participé à une
manifestation des employés des services publics.
7.2, à Diyarbakir, les forces de sécurité abattent
Ahmet Kaya, Nihat Yoldas et Nefer Yoldas au cours d'une rafle dans une
maison.
8.2, sept dirigeants du syndicat Tüm-Saglik-Sen sont
inculpés par le procureur de la CSE d'Istanbul pour leurs discours au
cours d'une réunion syndicale le 10 novembre 1994.
9.2, la police abat trois militants présumés du
DHKP-C, Fuat Perk, Meral Akpinar et Ayten Korkulu, au cours d'une rafle
dans une maison à Istanbul.
9.2, à Izmir, trois personnes sont arrêtées pour des
activités anti-laïques.
9.2, à Batman, Ekrem Celik, âge de 13 ans, est tué
et dix autres enfants blessés à l'explosion d'une grenade abandonnée
par des forces de sécurité.
11.2, un président local du HADEP, Lütfü Zeren, est
mis en état d'arrestation.
11.2, à Kocaeli, un déserteur nommé Hamdi Deniz est
retrouvé mort à un poste de police après avoir purgé sa peine de prison
pour désertion.
11.2, à Batman, deux ouvrier, Ismail Seven et Siddik
Omurcan, sont tués à l'explosion d'une mine.
13.2, à Zara, Ali Güverlik qui a été arrêté le 30
janvier perd la raison à cause des tortures auxquelles il a été soumis
au poste de police.
14.2, à Istanbul, vingt personnes sont arrêtées sous
le chef d'activisme au sein du TIKKO.
15.2, le local de l'IHD à Iskenderun est
perquisitionné par la police.
16.2, à Kiziltepe, Halim Dincli est abattu par des
tireurs non identifiés.
19.2, à Istanbul, Orhan Avci affirme avoir été
enlevé et torturé par des inconnus qui prétendent être
policiers. 19.2, à Istanbul, treize personnes sont
mises en état d'arrestation pendant une manifestation de protestation.
20.2, à Soma, Yeliz Kilic, âgée de 17 ans, affirme
avoir été torturée et violée par la police après son arrestation du 8
février.
21.2, à Hakkari, Abdullah Canan qui a été enlevé le
17 février, est retrouvé assassiné.
22.2, à Diyarbakir, Nihat Uzun est abattu par des
tireurs non identifiés.
23.2, à Corlu, Mehmet Siddik Dogru affirme avoir été
torturé après son arrestation du 13 février.
23.2, quinze personnes sont arrêtées à Istanbul
après une manifestation en protestation contre l'augmentation des prix.
23.2, un candidat du HADEP pour les élections du 24
décembre, Ishak Tepe, est arrêté à Bartin. Ses deux fils, le
journaliste Ferhat Tepe et Safyettin Tepe, avaient été victimes des
assassinats politiques.
25.2, le lycéen Kaya Geren est abattu à Diyarbakir.
27.2, à Hakkari, deux frères, Eyüp et Mahir Karabey,
qui ont été enlevés le 28 décembre 1995, sont retrouvés assassinés.
27.2, à Halfeti, Abdullah Yalcinkaya, âgé de 80 ans,
affirme avoir été torturé pendant 24 heures après son arrestation par
la police le 24 février.
28.2, dix inculpés du procès de MLKP sont condamnés
par la CSE d'Ankara à des peines de prison jusque 22 ans et 6 mois.
29.2, le président Feridun Yazar et quatre autres
dirigeants du HEP, fermé par la Cour Constitutionnelle, sont traduits
devant la CSE d'Ankara.
DEUX MOIS DE PERSECUTION DES MEDIAS
4.1, les numéros récents des périodiques Özgür
Genclik, Özgür Gelecek et Savasa Karsi Baris sont saisis par la CSE
d'Istanbul.
5.1, la publication du périodique Hedef est
interdite pour un mois en raison de deux articles parus en juillet
1995. Le même jour, une amende de 50 millions LT contre l'éditeur du
Hedef, Emel Atici, est ratifiée par la Cour de cassation.
10.1, le quotidien Evrensel est saisi par la CSE
d'Istanbul pour la propagande d'une organisation illégale.
11.1, l'éditrice de la Maison d'édition Belge, Mme
Ayse Nur Zarakolu est condamnée par la CSE d'Istanbul à une peine de
six mois et une amende de 50 millions LT en vertu de l'article 8, pour
avoir publié le livre intitulé Bekaa-Une terre créée de Hasan
Bildirici. Bien que la peine de prison soit commuée à une amende de 900
mille LT, l'exécution du jugement n'est pas suspendue sous prétexte que
Zarakolu n'a pas l'intention de ne plus commettre un délit de même
genre.
14.1, à Sivas, le correspondent du périodique
Kurtulus, Hülya Dagli, et six autres personnes sont arrêtées pour des
activités illégales.
14.1, le N°20 de Yeni Dünya est saisi par la CSE
d'Istanbul pour propagande séparatiste.
14.1, le correspondent de la TV4 suédoise, Retva
Rönnberg est arrêté à Diyarbakir après avoir interviewé des Kurdes
expulsés récemment de Suède.
16.1, Alinteri N°66 et Halkin Birligi N°5 sont
saisis par la CSE d'Istanbul pour l'incitation à la haine et au
désordre.
17.1, le correspondent d'Özgür Gündem à Diyarbakir,
Hasan Özgün est condamné par la CSE de Diyarbakir à une peine de prison
de 12 ans et 6 mois.
18.1, l'avocat Kemal Yildiz est condamné par la CSE
d'Istanbul à une peine de prison de 26 mois et une amende de 580 mille
LT pour une annonce qu'il avait donnée au quotidien Özgür Ülke.
19.1, à Gaziantep, l'éditeur d'un journal local,
Sabah, Aykut Tuzcu est attaqué par des agresseurs non identifiés.
22.1, le caricaturiste Ismail Gülgec et la
rédactrice Fatma Bayar du quotidien Evrensel sont inculpés par le
procureur d'Istanbul sous le chef d'avoir insulté dans une caricature
le président de la République et les membres du gouvernement. Chacun
risque une peine de prison de deux ans au minimum.
23.1, le périodique Partizanin Sesi N°33 est saisi
par la décision de la CSE d'Istanbul d'une part et par celle d'une cour
pénale d'Istanbul d'autre part en vertu de la LAT et du CPT.
24.1, la CSE d'Istanbul condamne l'éditeur du
quotidien Yeni Politika, Necati Taniyan, à une amende de 418 millions
LT.
25.1, les périodiques Alinteri, N°67, et Hedef,
N°51, sont saisis par la CSE pour propagande séparatiste.
26.1, l'éditeur responsable d'Özgür Gündem, Isik
Yurtcu est condamné par la CSE d'Istanbul à une peine de prison de 4
ans et une amende de 400 millions LT en vertu de l'article 8 pour trois
articles qu'il avait publiés. Au cours du même procès, l'éditeur du
quotidien Yasar Kaya est également condamné à une amende de 300 million
LT.
26.1, cinq correspondants à Mersin du périodique
Atilim, Bülent Öner, Fatma Harman, Hasan Abali, Mesut Bozkurt et Ali
Varol sont condamnés par la CSE de Konya à une peine de 12 ans et 6
mois chacun pour des activités illégales.
28.1, le directeur de la maison d'édition Yurt,
Ünsal Öztürk, affirme avoir été menacé par des personnes non
identifiées.
29.1, le périodique Proleter Halkin Birligi est
saisi par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
29.1, le rédacteur du périodique Devrimci Emek,
Sedat Hayta, est arrêté à Istanbul.
30.1, le président du parti du pouvoir socialiste
(SIP), Aydemir Güler est traduit devant une cour pénale d'Istanbul pour
un article qu'il avait écrit à la revue Sosyalist Iktidar. Accusé de
l'incitation au désordre, Güler risque une peine de prison jusque deux
ans.
2.2, le représentant du MKM à Diyarbakir, Aydin
Alökmek affirme avoir été torturé après son arrestation du 9 janvier.
2.2, l'écrivain kurde Recep Marasli est condamné par
la CSE d'Istanbul à une peine de prison de deux ans et à une amende de
100 million LT en vertu de l'article 8 pour un livre contenant sa
défense devant la CSE de Diyarbakir. Le directeur de la maison
d'édition Komal, Faruk Zade Muhsionoglu est également condamné à une
peine de prison de six mois et une amende de 100 millions LT.
2.2, un ancien rédacteur du quotidien Özgür Gündem,
Isik Yurtcu est condamné par la CSE d'Istanbul à une peine de prison
d'un an et une amende de 100 million LT en vertu de l'article 8.
L'exécution du jugement est suspendu.
3.2, les périodiques Özgür Gelecek, N°68, et
Partizanin Sesi, N°34, sont saisis par la CSE d'Istanbul pour la
propagande des organisations illégales.
4.2, le procureur de la CSE d'Ankara inculpe le
président de l'IHD, Akin Birdal, et 17 autres dirigeants de
l'association en vertu de l'article 8 pour un communiqué de presse
qu'ils ont publié à l'occasion de la Journée mondiale pour la Paix le
1er septembre 1995.
5.2, deux périodiques, Yeni Dünya, N°2, et Alinteri,
N°68, sont saisis par la CSE d'Istanbul en vertu de l'article 8.
5.2, l'office d'Adana du périodique Tavir est
perquisitionné par la police et cinq personnes à l'intérieur sont
arrêtées.
6.2, la revue Özgür Gelecek, N°19 est saisi par la
CSE d'Istanbul en vertu de l'article 8.
7.2, un leader socialiste âgé de 82 ans, Mihri
Belli, est condamné par la CSE d'Istanbul à une peine de prison d'un an
et quatre mois et une amende de 133 millions LT en vertu de l'article 8
pour un article qu'il avait écrit au quotidien Özgür Ülke. L'exécution
de la sentence est suspendue à cause de son âge.
8.2, l'ancien président du Syndicat des travailleurs
pétroliers (Petrol-Is), Münir Ceylan est inculpés en vertu de l'article
8 par la CSE d'Istanbul pour deux article qu'il avait écrits aux
périodiques Ada et Jiyana Nû. Les éditeurs des revues, Ali Demir,
Selman Cimen et Atakan Say sont également traduits devant le tribunal
pour avoir publié ces articles.
9.2, l'éditeur responsable de la revue Ekinler,
Nusret Öztürk est condamné par la CSE d'Istanbul à une peine de prison
de cinq mois et une amende de 41 millions LT en vertu de l'article 8.
11.2, l'office du périodique Atilim à Malatya est
perquisitionné et plusieurs documents sont saisis par la police.
14.2, Alinteri, N°69, est saisi par la CSE
d'Istanbul pour la propagande d'une organisation illégale.
14.2, le rédacteur du périodique Devrimci Emek,
Sedat Hayta est mis en état d'arrestation par la CSE d'Istanbul.
15.2, le procès des huit membres du Centre culturel
de Mésopotamie (MKM) commence à la CSE de Diyarbakir.
15.2, le bureau du périodique Atilim à Iskenderun
est perquisitionné et deux personnes sont arrêtées par la police.
17.2, le correspondent du quotidien Evrensel à
Adana, Taylan Türkmen affirme avoir été torturé après son arrestation à
Urfa.
19.2, le correspondent du Alinteri, Aynur Aydeniz
est arrêtée à Istanbul alors qu'elle couvre une manifestation.
19.2, Devrimci Cözüm est saisi par la CSE d'Istanbul
pour propagande séparatiste.
23.2, le correspondent d'Evrensel Latif Kaya est
arrêté à Istanbul alors qu'il couvre une manifestation.
. 24.2, le local du HADEP à Karacabey est attaqué et
détruit par des agresseurs non identifiés.
25.2, le périodique Odak est saisi par la CSE
d'Istanbul.
26.2, le local du MKM à Adana est
perquisitionné, plusieurs matériels saisis et deux personnes arrêtées.
27.2, le procureur d'Istanbul inculpe un nouveau
groupe de 86 intellectuels pour la publication d'un livre intitulé La
liberté de pensée, publié sous la responsabilité conjointe de 1080
intellectuels.
27.2, la publication du périodique Alinteri est
interdite pour vingt jours.
28.2, l'ancien secrétaire général du DEP Kemal
Okutan est condamné à une peine de prison de 10 mois par une cour
criminelle pour un article qu'il avait écrit au journal Özgür Ülke.
LA REACTION TURQUE CONTRE UN PROGRAMME DE CBS SUR LES KURDES
Un programme concernant les traitements infligés par
la Turquie à sa minorité kurde diffusé par CBS le 14 janvier a mené à
de furieuses réactions de la part du gouvernement d'Ankara. Le chargé
d'affaires des Etats-Unis à Ankara a été immédiatement convoqué au
Ministère des Affaires étrangères et il lui a été demandé une
clarification à propos des avis exprimés par des autorités américaines
"complètement à contrario de la position américaine connue".
Dans le programme documentaire journalistique "60
Minutes", CBS a interviewé John Kornblum, le Secrétaire-adjoint d'Etat
-chargé des affaires européennes et canadiennes-, et John Shattuck, le
Secrétaire-adjoint d'Etat pour les droits de l'homme et les affaires
humanitaires de même que le sous-secrétaire turc du Ministère des
Affaires étrangères Onur Öymen et le président du PKK Abdullah Öcalan.
D'après une transcription venant de CBS, Kornblum
s'est vu demander s'il y avait une quelconque différence entre la
destruction de villages en Turquie et la destruction de villages kurdes
en Irak par le gouvernement de Saddam Hussein. Sa réponse: "Si vous
êtes dans le village, il n'y a aucune sorte de différence".
Shattuck a dit que les droits de l'homme et les
problèmes en Turquie ont été documenté. Lorsqu'on lui demande si le
gouvernement turc assassine des civils, il répond, "Affirmatif. Ce
n'est pas une voie efficace pour combattre l'activité terroriste, cela
aliène un très large segment de la population, et cause des abus
massifs des droits de l'homme".
Le sous-secrétaire turc au Ministère des Affaires
étrangères Onur Öymen, après l'émission, à dit aux journalistes
qu'Ankara engagerait une action légale contre la chaîne de télévision
CBS. "Ceci est une partie d'une campagne qui a pour but de vilipender
la Turquie dans les médias occidentaux après la ratification de l'Union
douanière avec l'Europe. Nous entamerons des actions légales contres
les institutions qui vilipendent délibérément la Turquie. Les
Américains devraient clarifier si leur politique est ce qu'ils ont
officiellement annoncée ou la thèse que ces officiels ont annoncée dans
le programme diffusé sur la chaîne CBS", a dit Öymen.
A Washington, Nicholas Burns, le porte-parole du
Département d'Etat, interrogé sur le programme de CBS, à fait savoir
que les USA s'inquiètent "de la continuation des rapports de torture,
ou de restriction de la liberté de la presse et de certains meurtres
extra-légaux, ou le fait de brûler des villages et de forcer
l'évacuation des villages"