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A non-government information service on Turkey
Un service d'information non-gouvernemental sur la Turquie


150

13e année - N°150
Avril  1989
38 rue des Eburons - 1000 Bruxelles
Tél: (32-2) 215 35 76 - Fax: (32-2) 215 58 60
 Rédacteur en chef: Dogan Özgüden - Editrice responsable: Inci Tugsavul
 

ÖZAL EN DEROUTE

Les élections locales du 26 mars ont provoqué une véritable déroute dans les rangs de l'ANAP de premier ministre Özal et ont livré la Turquie à un bouleversement politique inattendu. Malgré la défaite spectaculaire du parti au pouvoir et la progression relative de chaque parti de l'opposition, aucun de ces derniers ne dispose de la puissance nécessaire pour gouverner seul, sans avoir à se coaliser avec un autre parti.
        Bien que 32% des voix soient suffisantes pour être majoritaire au Parlement, aucun des trois grands partis de l'opposition ne l'auront si les résultats des élections locales se répétaient exactement lors des élections parlementaires.
        Lors des élections législatives de novembre 1987, le Parti de la Mère Patrie d'Özal (ANAP) a totalisé 36% des voix. Pendant la dernière campagne électorale, Ozal a fait allusion à la possibilité d'une démission en cas d'un résultat électoral inférieur à 3O%. Or, le parti d'Özal a totalisé 21,88% des voix, et se place ainsi derrière le Parti populiste social-démocrate (SHP) et le Parti de la Juste Voie (DYP) qui ont obtenu respectivement 28,36% et 25,37% des voix.
        "Ce vote est une protestation claire et nette contre l'incapacité du gouvernement de fléchir la courbe de l'inflation. Cette dernière est montée à un taux de 87% en novembre 1988, pour redescendre à un taux de 72% en février dernier. Les électeurs turcs sont devenus allergiques au style de vie néo-ottoman et opulent d'Özal ainsi qu'à son autorité personnelle qu'il exerce entouré des membres de sa famille et de ses conseillers proches. A tout cela, s'ajoutaient des bruits de népotisme et de corruption au gouvernement." (The Financial Times, le 28 mars 1989)
        "La carte maîtresse d'Özal, menace que le pays ne connaisse à nouveau des années sanglantes à moins que les électeurs ne continuent à voter pour lui, n'a pas fonctionné. Elle a convaincu les banquiers et le FMI, mais pas le peuple turc. Les effets secondaires de ce genre de modernisation se produisent aussi bien en Turquie que dans de larges zones du Tiers Monde. D'autre part, l'influence croissante des conservateurs indique que le succès d'Özal, dans sa tentative de recentrer une partie de l'opinion islamique, est limité. Özal a déjà agi maladroitement dans sa façon de manœuvrer lors de la récente discussion sur les turbans, lorsque des manifestations ont eu lieu en faveur du chador." (The Guardian, le 30 mars 1989).
        De plus, l'image "occidentale" de la famille d'Özal, surtout de Madame Özal s'affichant en public avec un verre de whisky dans une main et un cigare dans l'autre alors qu'on assiste à l'ascension du fondamentalisme en Turquie a été préjudiciable à l'ANAP lors de ces élections.
        Trois partis de l'opposition de droite ont mené leur campagne électorale en accusant l'ANAP de ne pas tenir compte des revendications des fondamentalistes et ont attiré ainsi, les votes des nombreux électeurs conservateurs de l'ANAP. Une telle campagne n'avait rien d'étonnant de la part du parti intégriste RP d'Erbakan et du parti néo-fasciste MCP de l'ex-colonel Turkes. Mais cette fois-ci, le DYP de l'ancien premier ministre Demirel s'est également livré à la démagogie, allant jusqu'à revendiquer la transformation du Sainte Sophie en mosquée et ce, dans le but de redevenir le parti le plus puissant de l'aile droite de l'opposition turque.
        Il est à noter que les meilleurs scores de ces partis de droite ont été enrégistrés dans les zones rurales où les sentiments religieux sont encore très forts. Mais ce n'est pas la seule raison de la défaite d'Özal dans ces zones. La politique monétariste imposée par le FMI et appliquée par Özal depuis maintenant 9 ans, trois ans comme vice-premier et six ans comme premier ministre, a provoqué un appauvrissement de la paysannerie, des commerçants et artisans des petits centres urbains.
        Le revers le plus sérieux de l'ANAP, dans l'élection des maires, des conseils municipaux et des représentants locaux, a été la perte de grandes villes comme Istanbul, Ankara, Izmir, Antalya et Adana. La plus surprenante est celle d'Istanbul, ville la plus importante de Turquie. L'ANAP espérait de gagner cette ville avec une différence considérable. Le maire d'Istanbul, Bedrettin Dalan, est certainement l'homme politique le plus populaire du pays et cependant l'ANAP a perdu ce siège au profit des sociaux-démocrates.
        Un tel résultat n'est pas surprenant dans les villes où les salariés ont perdu au moins 5O% de leur pouvoir d'achat à cause de la politique monétariste d'Özal et de l'inflation galopante, qu'il ne parvenait plus à freiner.
        Dans les grandes villes, les scores des sociaux-démocrates ont dépassé toutes leurs espérances. Des deux partis sociaux-démocrates de Turquie, le grand vainqueur est sans conteste le parti populiste social-démocrate (SHP) qui a obtenu 28,4% des voix. Quant au deuxième, le parti de la gauche démocratique (DSP) de Bulent Ecevit, il n'a pas dépassé la barre des 10%.
        Le SHP et certains journaux de gauche accusent Ecevit de diviser les sociaux-démocrates et d'apporter ainsi de l'eau au moulin d'Özal. En fait, si les 28,4% du SHP et les 8,9% du DSP sont orientés vers une liste commune lors des prochaines élections législatives, les sociaux démocrates pourront aisément prendre le pouvoir avec 37,3% de voix, et ce, à condition que le système électoral actuel demeure inchangé.
        Mais la coalition des deux partis sociaux-démocrates semble être freinée par différents facteurs. L'obstacle principale à cette alliance électorale réside en l'aversion d'Ecevit pour certains leaders du SHP et en son hostilité vis à vis des intellectuels marxistes ou kurdes qui travaillent maintenant au sein du SHP.
        Özal, conscient de cet état des choses, avait déjà fourni au parti d'Ecevit des appuis financiers avant les élections locales, et ce dans le but de diviser l'électorat social-démocrate. Après sa défaite, il compte plus que jamais sur la division des sociaux démocrates qui constituent la seule alternative réelle à son pouvoir.
        Depuis sa défaite électorale, Özal subit des pressions de toutes parts pour provoquer des élections anticipées. Tous les partis de l'opposition affirment que la confiance dans le gouvernement d'Özal a été érodée et que la balance du pouvoir a changé. Ils estiment également qu'une majorité parlementaire ne peut pas élire le nouveau président de la République sans assise populaire.
        Alors qu'un certain nombre de syndicalistes et d'hommes d'affaires ont adhéré à la revendication des hommes politiques de l'opposition, certaines dirigeants de l'ANAP ont reconnu la signification du vote de protestation. Le ministre de l'Energie et des Ressources naturelles, Fahrettin Kurt, a demandé des élections générales anticipées. Il a déclaré: "L'échec n'est pas local mais national. Ces discussions sur l'agenda pourraient créer une instabilité politique et économique".
        Selon The Guardian  du 30 mars 1989, "Turgut Özal devra faire un véritable miracle s'il veut sauver son Parti de la Mère Patrie après l'humiliation électorale qu'il a essuyée lors des dernières élections."
        Cependant, Özal affiche toujours la même attitude arrogante en affirmant qu'il tiendra jusqu'aux prochaines élections générales de 1992.
        Lors de la première conférence de presse, qu'il a tenue après les élections, il a déclaré que ce résultat était un message des électeurs demandant que l'inflation, ± 70 %, soit diminuée. Il a ajouté: "Les gens ont voulu nous donner, à l'occasion des ces élections, une légère tape sur la joue, mais ça c'est transformé en quelque chose de plus musclé. Tant que l'ANAP disposera de sa majorité parlementaire de 289 sièges sur 450, le gouvernement remplira son deuxième mandat."
        De plus, Özal a manœuvré secrètement pour restreindre les fonds accordés aux municipalités des villes qui sont désormais sous le contrôle des partis de l'opposition.
        Malgré la résolution d'Özal, le résultat des votes semble présager une période d'incertitude, puisque les leaders de l'opposition comptent tirer profit de leurs scores étonnamment élevés.
        Le manque de stabilité du gouvernement a menacé les efforts d'Özal de libéralisation de l'économie et de recherche de capitaux étrangers.
        Un diplomate occidental a déclaré: "Özal a mis en mouvement des changements fondamentalement irréversibles, surtout sur le plan financier. Özal a toujours rappelé aux gens qu'il était la seule personne capable de maintenir la stabilité en Turquie. C'était vrai jusqu'au début de 1988. Maintenant d'autres en sont capables."
        Un de ces "autres", Demirel, a lancé un défi à Özal: "Özal avait dit qu'il démissionnerait si les résultats électoraux lui rendaient la tâche gouvernementale impossible. S'il tient sa parole, alors il devrait le faire."
        Alors que la pression en faveur de l'organisation d'élections anticipées s'accentue, le meurtre d'un député de l'opposition par un député de l'ANAP au Parlement, le 29 mars dernier, accentue encore les tensions politiques.
        Les parlementaires sont autorisés à porter une arme en Turquie, mais pas dans l'enceinte du Parlement. La fusillade a eu lieu dans un des corridors du Parlement.
        L'assaillant, Idris Arikan, et la victime, Abdurrezzak Ceylan, étaient tous deux originaires de la province sud-orientale de Siirt, près de la frontière irakienne, une zone où la guérilla kurde est active depuis 5 ans. Ceylan est membre du DYP.
        L'incident a eu lieu, quand Idris Arikan parlait des résultats électoraux avec Zeki Çeliker, un autre député originaire de la même province. Ceylan a essayé de s'interposer entre les deux députés pour les séparer. A ce moment, Arikan a pris son arme et a abattu Ceylan au lieu de Çeliker. Ceylan est mort lors de son transfert à l'hopital d'une balle dans la poitrine.
        Le deuxième meurtre à l'Assemblée nationale, depuis la proclamation de la République en 1923, est un nouveau coup dur pour le crédibilité de l'ANAP.
        Malgré la déclaration d'Özal, la force combinée de l'opposition pourrait le forcer à convoquer des élections anticipées, sans doute à la fin de l'année.
        Un autre effet immédiat des résultats électoraux est l'intensification des luttes entre l'aile droite et l'aile libérale de l'ANAP et l'augmentation des désertions vers les autres partis de droite. Alors qu'une partie des députés libéraux sont attirés par le DYP, beaucoup de députés islamistes et nationalistes seront séduits par le fondamentalisme du RP et le néo-fascisme du MCP.
        Pendant ce temps, le grand capital et l'armée, de crainte de voir la gauche arriver au pouvoir, feront de leur mieux pour réunir toutes les forces de droite au sein d'un front nationaliste. Depuis que le total des votes de gauche atteint 37 % et celui des quatre partis de droite 63 %, un tel scénario n'est plus du tout de la fiction politique. Dans un passé proche, cela a déjà été tenté par l'union de l'AP de Demirel, du MSP d'Erbakan et du MHP de Türkes.
        Ces trois leaders de droite sont à nouveau à la tête de leurs nouveaux partis: respectivement le DYP, le RP et le MCP. Malgré toute son arrogance, Özal pourrait aussi les rejoindre cédant ainsi à la pression des miilieux d'affaires et ce, au nom du "sauvetage du pays de l'emprise de la gauche".
        Quelle est la situation des forces de gauche dans ce nouveau contexte politique? Ce sujet sera traité dans les prochains numéros d'Info-Türk.

LE PREMIER MEURTRE LIE A L'AFFAIRE RUSHDIE EN BELGIQUE?

        Un double meurtre commis en Belgique à la fin de mars peut, selon la presse belge, être la première exécution liée à l'Affaire "Rushdie". Le 29 mars 1989, le directeur du Centre Culturel et Islamique (CCI), Abdullah Abdal, et le bibliothécaire du centre, Salem Bahri, ont été retrouvés assassinés par balles dans le bureau du centre après la prière du soir.
        Le porte-parole de la police a déclaré qu'Ahdal avait reçu des menaces de morte après son intervention à la télévision belge à propos de l'affaire "Rushdie". Un journaliste de la télévision a ajouté que les responsables de la TV ont, eux aussi, reçu des appels téléphoniques menaçants après la diffusion du programme. Les remarques d'Ahdal ont été considérées assez modérées bien qu'il ait condamné Rushdie pour son livre.
        D'après certains journalistes, le double merture peut également être un règlement des comptes au sein de l'équipe du CCI. Jusqu'au moment de la rédaction de ce Bulletin, il n'y avait aucune preuve concrète démontrant le véritable motif de l'assassinat.
        Le CCI et sa mosquée sont situés près du bâtiment de la Commission des Communautés européennes.
        Depuis des années, les deux acteurs principaux de l'intégrisme islamique, le régime chiite d'Iran d'une part et le régime sunnite de l'Arabie saoudite d'autre part se sont engagés dans une querelle féroce afin de prendre le dessus dans le monde islamique. Le Centre culturel et islamique en Belgique a été fondé par la Ligue mondiale islamique (Rabitat-ul-Alem-ul-islam), dirigée par l'Arabie saoudite, en vue de propager l'influence saoudienne sur les familles immigrées musulmanes en Europe. Les partisans de Khoméini contestent depuis des années le pouvoir religieux attribués par les autorités belges au CCI. (Intégrisme islamique en Turquie et Immigration, Info-Türk, Bruxelles, 1987).
        D'ailleurs, certains pays musulmans du Moyen-Orient comme le Liban et la Turquie sont devenus le champs de bataille pour les agents de ces deux puissances islamiques, qui se trouvent dans ces pays à titre de diplomates. (Voir: Extreme-Right in Turkey, Info-Türk, Brussels, 1988; Bulletin Info-Türk, décembre 1988)
                                           
L'APPEL PAR UN GROUPE DE RESSORTISSANTS DE PAYS ISLAMIQUES

        Un groupe de ressortissants de pays islamiques en Belgique ont lancé un appel reprochant la déclaration de Khoméini en ce qui concerne l'Affaire Rushdie et ont défendu la liberté d'expression.
        "La mort de Salman Rushdie sera la mort de notre liberté de pensée et de création, et le silence une indigne complicité," dit l'appel.
        Parmi les premiers signataires se trouvent le journaliste Dogan Ozgüden (rédacteur de l'Info-Türk), le docteur Ilkay Alptekin, le sociologue Nuran Cicekciler de Turquie; et l'ingénieur Mahfoud Romdani, le sociologue Brahim Ameriah, le bibliothécaire Belgacem Ben Saad, le gérant d'entreprise Sadok Boudoukhane, les architectes Jamil Daghrir et Karim Faket, l'islamologue Slah Dhaoui, le journaliste Moncef El Fliti, les assistants sociaux Souad El Hafi et Hayet N'Ciri, l'artiste Mohamed Enanni, les écrivains Leila Haouari, Hamadi et Ali Serguini, l'informaticien Brahim Lahouel, le syndicaliste Mohamed Maizi, le psychologue Salima Nacer de pays maghrébins..

LES PRIVILEGES DES OFFICIERS TURCS

        Les officiers de l'armée turque sont parmi les soldats les plus privilégiés au monde. Comparés à ceux des autres fonctionnaires, leurs revenus sont très élevés.
        Par exemple, un commandant gagne environ 495.306 LT net par mois alors qu'un professeur ayant de l'ancienneté arrive péniblement à 293.114 LT et un ingénieur civil à 245.865 LT.
        Un général d'armée gagne un salaire mensuel net de 1.092.889 LT. Lorsqu'il prend sa retraite, il touche une prime de 15 millions et il continue à toucher un salaire de 926.400 LT net par mois (Hurriyet,  5.7.1988)
        Il est utile de rappeler que le salaire minimum mensuel d'un ouvrier est de 85.000 LT et que celui d'un ouvrier qualifié et expérimenté atteint parfois 250.000 LT.
        De plus, tous les officiers et les sous-officiers sont actionnaires du holding financier gigantesque qu'est l'OYAK (Fondation d'aide mutuelle des forces armées). En plus de tous les avantages matériels dont ils jouissent, ils touchent une part des profits que ce holding réalise grâce à ses investissements dans tous les secteurs économiques. Selon le rapport annuel de l'Assemblée des actionnaires de l'OYAK datant de juin dernier, le profit annuel du holding a atteint 33,5 milliards de LT en 1987 alors que celui de 1986 n'était que de 10,5 milliards de LT. La valeur de ses biens est estimée à 74 milliards de LT. En 1988, l'OYAK a redistribué à ses actionnaires en uniforme 63,9% des profits réalisés. Lors de sa session de juin 1988, l'Assemblée a décidé d'investir d'avantage dans l'industrie de guerre.

DES ANCIENS GENERAUX DANS LES AFFAIRES

        Les grosses compagnies turques ont suivi l'exemple de leurs consœurs américaines: elles engagent des généraux à la retraite dans le but de se tailler la part du lion dans l'industrie de la guerre en pleine extension.
        Le numéro du 29 septembre 1989 du quotidien Milliyet  révèle les noms de 30 anciens généraux de l'armée turque qui sont actuellement employés par des compagnies dans leurs services administratifs ou comme conseillers militaires.
        Ainsi l'amiral Bulent Ulusu, ancien premier ministre du gouvernement militaire de 1980 à 1983, est au service de la Compagnie Aksa. Le général Dogan Özgöçmen est employé par la Banque Yapi Kredi, le général Namik Kemal Ersun par la compagnie de construction Kutlutas, le général Recai Baturalp et le général Talat Çetiner le sont par la compagnie Tekel.
        Leurs appointements mensualités atteignent 10 millions de LT (5.000 dollars) avec les salaires, allocations diverses ainsi que leurs parts des profits (Milliyet,  29.9.1988).
        Une entreprise géante a été récemment créée dans le secteur du tourisme et ce, avec la participation d'anciens généraux. Elle se nomme la Compagnie de Tourisme Kamelya et a déjà bâti sur une surface de 305.000 m2 dans le district de Manavgat, sur la côte méditerranéenne. Elle projette d'y construire le plus grand complexe touristique du pays. Parmi ses fondateurs, on retrouve les anciens commandants de la Force aérienne: Tahsin Sahinkaya (membre de la junte militaire de 1980) et Halil Sözer, l'ancien commandant de gendarmerie Mehmet Buyruk, l'ancien commandant de la force terrestre Kemal Yamak ainsi que la fille  et le beau-fils du Général Evren  (Milliyet,  21/4/88).

MONOPOLISATION DE L'ECONOMIE TURQUE

        Selon un rapport de l'Université Technique du Moyen-Orient (ODTU), l'économie turque est menacée d'une dangereuse monopolisation de capital. Déjà dans 86 des 127 principaux secteurs économiques, la monopolisation a atteint une proportion telle que, selon les standards européens, il faudrait prendre des mesures de prévention (Cumhuriyet,  7.2.1989)
        1988 a été, sur le plan des profits, une année faste pour les grosses compagnies turques, par exemple:
        - l'Akbank a connu un profit annuel de 300 milliards de LT (60,4%);
        - la Vakif Bank: 150 milliards de LT (72,4%);
        - la Yapi Kredi Bank: 100 milliards de LT (63,9%);
        - la Garanti Bank: 46 milliards LT (64,2% );
        - l'Etibank: 100 milliards LT (28,2%).
        Quant aux 17 banques étrangères opérant en Turquie, leur taux annuel de bénéfices se situe entre 4 et 20% (Cumhuriyet,  8.3.1988)
        Cependant, selon une autre étude, il existe un intervalle énorme sur le plan des chiffres d'affaires entre les compagnies européennes de pointe et les monopoles turcs. Alors que le chiffre d'affaires annuel de la Shell est de 84,9 milliards de dollars en Europe, le chiffre d'affaires total des 500 plus grosses compagnies turques atteint à peine 33 milliards de dollars en 1988. La plus grosse part de ce chiffre appartient à la Tupras avec 3,9 milliards de dollars (Cumhuriyet,  27/11/88)
        Sur le plan des fonds attribués à la recherche, la Turquie est à nouveau très loin des standards occidentaux. Alors que la CEE, le Japon et les USA dépensent
respectivement à cet effet: 1,9%, 2,9% et 2,8% de leur PNB, la Turquie n'atteint que 0,20%.
        De plus, les besoins de la Turquie en personnel spécialisé sur la CEE est estimé à 25.000 personnes. Actuellement, le nombre de ces spécialistes ne dépasse pas le millier. Dans le but de combler le vide, des unités sont créées dans les universités turques pour informer les étudiants des questions relatives à la CEE. (Cumhuriyet,  14.2.1989)

LA TERREUR POLICIERE A TRAVERS LA TURQUIE

        La terreur policière à l'encontre des étudiants universitaires et des intellectuels atteint des dimensions alarmantes à travers la Turquie. La dernière opération policière a été déclenchée fin février à Istanbul.
        Tout d'abord, le  22 février 1989, la soirée de commémoration pour le poète Hasan Huseyin organisée dans le centre culturel d'Ortakoy a fait l'objet de l'attaque policière. Le directeur et les employés du centre ont été interrogés par les brigades de la police politique. Depuis, le centre a été fermé et mis sous scellés sur ordre du procureur.
        Des représentants d'organisations de défense des droits de l'homme, d'organisations féministes et d'associations de parents et amis des prisonniers politiques ont organisé un conférence de presse commune pour protester contre la fermeture du centre culturel. Plusieurs députés du Parti  populiste social-démocrate (SHP) assistaient également à la conférence.
        La police a fait une descente lors de cette conférence de presse: 43 personnes ont été arrêtées dont 14 ont été relâchées mais les 29 autres ont été expédiées à la Cour de Sûreté de l'Etat, le 28 février dernier. Là, ils ont été relâchés après avoir été questions par la Cour mais la charge d'avoir manifesté sans autorisation pèse toujours sur eux. Cette violation de la loi est sanctionnée par une peine de trois ans de prison.
        Parmi les détenus, se trouvaient une écolière de 15 ans qui n'a pas pu s'empêcher de ricaner lorsque le juge l'a interrogée, ainsi qu'une Grecque qui a étudié à l'Université Technique d'Istanbul.
        Le bar Bukalemun (caméléon), qui se trouve au bas de la rue du centre cultuel Ortaköy, a également attaqué par la police. Ce bar, géré par un artiste turc contemporain,
Bedri Baykam, est connu pour être fréquenté par des gens de gauche.
        Baykam a déclaré que ce raid allait faire beaucoup de mal au gouvernement puisque la police l'a effectué sans être en possession d'un mandat de perquisition. L'artiste a raconté que dans les toilettes se trouve une des ses peintures composée de coupures de journaux concernant la censure et la violation des droits de l'homme et intitulée "Pinochet Pasa, Aci ektin topraga" (le Général Pinochet a semé la peine dans le sol). Lorsque le chef des policiers l'a découverte, Baykam raconte qu'"il a paru content comme s'il avait trouvé la preuve d'un crime" et qu'il "leur a conseillé de continuer comme ça et de saisir les quotidiens du jour, juste pour se faciliter la vie".
        Ce raid a provoqué des conflits entre la police et les étudiants. Le 28 février, les étudiants de l'Université de Yildiz ont organisé une marche de protestation allant de leur campus à Besiktas où ils ont été dispersés par des escadres de police anti-émeutes. Près de 110 étudiants ont été arrêtés, le lendemain, un autre groupe d'étudiants s'est rendu au bureau du gouverneur pour demander la libération de leurs amis. Ils ont été battus par la police et neuf d'entre eux ont été arrêtés.
        Par ailleurs, le 24 février 1989, les étudiants de l'Université de Yildiz se sont réunis pour protester contre les nouveaux règlements des campus. Lorsque les étudiants se sont rendus au bureau du recteur et ont demandé à lui parler, ils ont été mis en colère par des policiers en civil qui les filmaient. Une échauffourée a eu lieu et un policier a tiré en l'air.

        AUTRES OPERATIONS POLICIERS EN FEVRIER:

        Le 7 février, 9 membres présumés du Parti communiste unifié de Turquie (TBKP) ont été arrêtés par la police à Ankara.
        Le 8 février, la police a détenu 17 étudiants pour avoir affiché des placards critiquant le régime du 12 septembre. Bien que relâchés quelques jours plus tard, ils ont été exclus de leur école pour une durée d'un mois.
        Le 17 février, 16 personnes ont été arrêtées à Istanbul, elles sont accusées d'être membre du Parti communiste révolutionnaire de Turquie (TDKP).
        Le 22 février, à Ankara, 250 personnes venues pour assister au procès des leaders du TBKP ont été assaillies et battues par la police, 12 d'entre elles ont été blessées.
        Le 28 février, à Bismil (Diyarbakir) 5 militants du PKK et un policier ont été tués durant un affrontement armé entre la guérilla kurde et les forces de sécurité.

        LES PROCES POLITIQUES

        Le 14 février, 12 étudiants ont été condamnés à 4 ans de prison par la cour de Sûreté de l'Etat de Malatya, pour avoir participé à une action syndicale en 1988.
        Le 16 février, un nouveau procès contre 31 membres présumés du PKK a commencé à la cour de Sûreté de l'Etat de Diyarbakir.
        Le 21 février, trois membres du Parti communiste de Turquie/Union (TKP/B) ont été condamnés à 5 ans et 10 mois d'emprisonnement chacun.
        Le 24 février, un membre du PKK a été condamné à une peine de 15 ans de prison par la cour de Sûreté de l'Etat d'Ankara.

UN RAPPORT MEDICAL SUR CALAYLIOGLU

        La campagne de terreur menée contre les lycéens s'est poursuivie par l'arrestation d'un écolier de 16 ans, S.T, à Diyarbakir le 10 février dernier. Le jeune détenu est accusé d'avoir distribué des tracts de propagande du PKK et risque une peine de prison allant jusqu'à 12 ans.
        D'autre part, une équipe de 6 psychiatres, chargée d'examiner Melih Calaylioglu, ce jeune lycéen accusé de s'être livré à la propagande communiste, a déclaré dans son rapport rédigé après 6 semaines d'examens, qu'il était incapable d'avoir commis ce crime délibérément.
        Calaylioglu est né en RFA, il est revenu en Turquie en 1986 avec sa mère pour avoir une éducation turque. En septembre dernier, Turan Baysal, le principal du collège Karatas, avait informé la police que le jeune homme faisait de la propagande communiste et discutait marxisme-léninisme avec ses amis.
        Calaylioglu a été arrêté et envoyé à la cour de Sûreté de l'Etat.
        Le rapport des psychiatres met en évidence la différence qui existe entre l'interprétation de l'acte dont il est accusé faite en Turquie et dans le pays où il est né.
        Le rapport poursuit en disant que les articles 46 et 47 du code pénal turc définissent un adolescent de 15 ans comme suffisamment mûr pour être responsable de ses actes. Il souligne le fait que Calaylioglu avait eu 15 ans et 11 jours avant qu'il ne commette prétendument ce crime.
        Toujours selon ce rapport, si on applique la loi à la lettre, Calaylioglu ne bénéficiera  pas des réductions de peine et des exemptions prévues par ces articles. Il continue en ces termes "Bien qu'il faille également tenir compte de la nature du délit et de la façon dont il a été commis, il ne faut pas perdre de vue la structure du caractère ainsi que les circonstances psychologiques du défendant".
        Selon les psychiatres, Calaylioglu a passé son enfance en RFA dans une culture totalement différente et au sein d'une famille instable. Ils rappellent aussi qu'il a une tante déséquilibrée mentalement. Cependant, les tests psychiatriques effectués sur lui prouvent qu'il est "un jeune homme intelligent, créatif, mais tourmenté".
        Les médecins estiment que Calaylioglu a commis son crime pour répondre aux questions posées par ses amis et ce, dans le but de leur prouver ses connaissances et qu'il était motivé par les traits mêmes de son caractère.
        Le rapport conclut ainsi: "Il n'est pas possible de considérer son acte comme une violation délibérée et calculée de l'article 142 à savoir l'interdiction de se livrer à la propagande prônant la domination d'une classe sociale sur les autres".

UNE GREVE BRISEE PAR LE GOUVERNEMENT

        Alors que le nombre de travailleurs syndiqués va en s'accroissant, le gouvernement, ne tenant aucun compte des avertissements de l'OIT, a recours aux mesures de répression pour prévenir les mouvements de grève.
        Selon des statistiques sectorielles du ministères du Travail sur les 3.525.956 travailleurs des secteurs et des services, 2.277.898 sont syndiqués (Cumhuriyet,  18/1/89)
        L'année 1989 s'est ouverte par des négociations collectives de travail pour près de 650.000 travailleurs des Entreprises d'Etat, 14.000 d'entre eux l'ont commencées d'emblée par une grève. On s'attend à ce que 52.000 autres les rejoignent depuis que les négociations les concernant ont échoués.
Dernièrement, 23.000 ouvriers des usines de fer et d'acier d'Iskenderun et de Karakuk ont décidé de commencer un mouvement de grève le 23 mars. Mais le gouvernement a annoncé à la dernière minute, la suspension de cette action pendant deux mois.
        Le quotidien Milliyet  du 19 février 1989 a publié certains ??? pour donner une idée du niveau de vie d'un travailleur turc. Pour payer 1 kg de pain, un ouvrier travaille 45 minutes en Turquie et 12 minutes en RFA. Pour un kg de viande, l'ouvrier turc travaille 7H58 min., alors que l'allemand ne travaille que 1H6 min. Pour une paire de chaussure, le rapport est de 71H22 min. pour la Turquie et 6H30 min. pour la RFA, pour un poste de télévision, il est de 1.593H contre 98H.



Des investissements régionaux injustes
        Alors que la structure du Projet de l'Anatolie du Sud-est a rapporté 1.361 billions de LT à cette région en 1988, les secteurs publics et privés préfèrent continuer à investir dans les régions de la mer du Marmara et de la mer Egée.
        En 1988, on a investi 11.636 billions de LT dans l'ensemble des projets sur toute la Turquie.
        Mais la région de Marmara reste la plus favorisée quant aux investissements. L'année dernière, 43,1% des investissements encouragés par le gouvernement soient 5,19 billions de LT, sont allés à cette région. La région égéenne vient en 2ème place avec 1,687 billions de LT.
        Quant à la proportion d'investissements encouragés par le gouvernement dans les régions d'Anatolie centrale, méditerranéenne, de la mer noire et d'Anatolie orientale, elle se monte respectivement à 1,335 billions de LT, 1,225 billions LT, 443 milliards de LT et 310 milliards de LT. L'investissement principal couvrant plus d'une ville a totalisé 284 milliards de LT.

Distribution des aides selon les régions
REGIONS
Marmara
Anatolie centrale
Egée
Méditerranée
Mer noire
Anatolie orientale
Anatolie sud-orientale

INVESTISSEMENTS
(Milliards de LT)
5.018,7
1.335,0
1.687,3
1.224,8
432,7
310,4
1.360,8

PART
(en %)
43,1
11,5
14,5
10,5
3,7
2,7
11,7

EMPLOI
83.338
21.692
40.246
85.643
12.503
7.711

Les exportateurs remboursés
        Un remboursement de taxe de 5,7 billions de LT basé sur les prix de janvier 1989 a été accordé aux exportateurs pour la période de 1984 à 1988.
        Les chiffres de l'institut statistique de l'Etat (DIE) indiquent que les 329,1 milliards de LT de remboursement payés en 1984, seront actuellement de 1,8 billions de LT.
        En 1988, ces chiffres se montent respectivement à 674,8 et 904,3 milliards de LT.
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çerçeve

Le rapport du Parlement Européen sur les relations économiques turco-européennes

        Le Parlement européen a adopté lors de sa session du 15 mars 1989, un rapport sur les relations économiques et commerciales entre la Turquie et la CE. Il a été établi par Carlos Pimenta pour le compte du Comité des relations économiques extérieures.
        En égard de l'avenir de ces relations, le Parlements Européen:
        "souligne la nécessité de la garantie des deux Parties que leur développement économique est compatible avec le but à atteindre, à savoir la convergence de leurs économies respectives réalisée par le stade final de l'accord d'association;
        "insiste sur le fait que la convergence économique et la libre circulation des biens et des services ne sont rendues possibles qu'une fois la restauration des droits des organisations syndicales turques entièrement réalisées ainsi que l'alignement des conditions de travail en Turquie sur les standards de l'OIT totalement effectué;
        "remarque que certains des investissements les plus importants effectués en Turquie, dans des secteurs comme l'agriculture et l'acier, ne font qu'augmenter le problème de complémentarités entre ces deux économies;
        "note que pour atteindre la convergence économique et remplir les objectifs de l'Accord d'Association à savoir la libre circulation des personnes, biens et services, la Turquie devra être tenue informée de l'évolution de l'espace économique européen, une coordination adéquate devra donc être garantie et ce des deux côtés, en particulier dans les secteurs suivants:
        "normes et standards ainsi que la procédure à suivre pour les examens et l'approbation d'espèce,
        "règlements d'origine et procédures douanières,
        "contrats publics et subsides,
        "propriétés intellectuelles et produits de contre-façon;
        "note, en outre, l'augmentation des activités de contre-façon ainsi que la violation des biens intellectuels en Turquie, et demande une action vigoureuse des autorités turque dans ces domaines;
        "considère, en outre, que ces efforts devraient exercés de sorte que la CE puisse signer des accords structurels avec la Turquie sur des programmes d'échange scientifiques, technologique et d'étudiants;
        "croit que la convergence économique implique l'approximation de standards de protection de l'environnement entre la CE et la Turquie, et ce dans le but d'éviter toute distorsion de la concurrence et de garantir la qualité de la vie: estime que la protection de la zone méditerranéenne est crucial pour une possible coopération entre la CE et la Turquie dans le domaine de la protection de l'environnement, en particulier dans le cadre de la Convention de Barcelone (+ protocoles) relative à la lutte contre la pollution en Méditerranée;
        "salue l'accroissement des investissements dans le secteur des services et notamment le tourisme considérant le nombre croissant de touristes de la CE qui visitent la Turquie et espère que ces investissements tiendront compte de l'environnements et de la protection de l'environnement;
        "considère que la convergence économique n'est pas possible que si la Turquie réduit son taux très élevé d'inflation en adoptant les mesures adéquates;
        "note l'augmentation d'investissements en provenance de la CE en Turquie et demande la mise sur pied d'un système de garantie unifié pour les investissements CE directs;   
        "considère que l'utilisation de l'ECU, dans les transactions officielles et commerciales entre la CE et la Turquie devrait augmenter et souhaite l'établissement d'une parité stable entre l'ECU européen et la LT;
        "demande, à nouveau, la conclusion du 4ème Protocole Financier, arrêté en 1981.



Concertations OTAN-Turquie

        Le 8 mars dernier, le ministre turc des affaires étrangères, Mesut Yilmaz, de retour de Vienne où il avait assisté aux négociations de réduction de l'armement conventionnel entre les Etats membres de l'OTAN et du Pacte de Varsovie a déclaré être satisfait par la position adoptée par l'Alliance Atlantique qui, selon lui, "prend les intérêts politiques et militaires de la Turquie largement en considération".
        Le différend opposant la Turquie et la majorité des alliés de l'OTAN avait repris juste avant le 2ème tour de la conférence de Vienne.
        La Turquie s'opposait au projet de l'OTAN de donner la priorité au désarmement de l'Europe centrale sur celui des Etats-flancs. La solution de compromis, proposée par la GB, a finalement été optée la semaine dernière par tous les Etats membres de l'OTAN, y compris la Turquie.
        La presse turque avait déjà fait état de l'opposition des militaires turcs à la division des alliés en catégories d'importance décroissante.
        A Vienne, Yilmaz a déclaré: "Maintenant toutes les zones adhérent à l'Alliance sont considérées comme un tout. C'est ce que nous demandions depuis longtemps. Toutes les exigences de chaque zone, quant à sa défense, sont considérées comme une partie de ce tout".
        Bien que les militaires turcs ne se soient pas prononcés ouvertement sur le projet de l'OTAN, des sources proches du ministère de la défense ont affirmé qu'une telle division au sein de l'Alliance aurait provoqué un changement radical de la structure du Pacte de défense commune.


LE LOBBY JUIF SOUTIENT ANKARA

        Le 13 février dernier, Maynard Vishner, leader du Congrès juif américain, en visite en Turquie, a rencontré le ministre des affaires étrangères turc: Mesut Yilmaz auquel il a promis le soutien de son groupe à Washington.
        Un groupe de 13 représentant d'organisations juives américaines s'est rendu en Turquie pour s'entretenir avec des membres de la communauté juive qui fête actuellement le 500e anniversaire de son établissement en Turquie qui a eu lieu en 1492, alors qu'ils fuyaient l'Inquisition espagnole.
        Après son entrevue avec Yilmaz, Vishner  a déclaré: "Nous avons rapporté au ministre des affaires étrangères que la communauté juive américaine est désireuse d'apporter son aide à la Turquie dans son explication de certains faits historiques aux EU".
        Le ministre aurait alors assuré aux représentants juifs que la Turquie n'accordera pas le statut de mission diplomatique au bureau représentant l'OLP à Ankara, et ce avant que la démarcation des frontières de l'Etat palestinien ne soit clairement effectué.
        Il a également qualifié les liens entre la Turquie et Israël de "positifs et constructifs".
        La presse islamique turque a critiqué la visite du groupe de la communauté juive américaine. Le journal Zaman  a rapporté que cette communauté a alloué 1,5 million de dollars à la communauté juive de Turquie pour financer le 500ème anniversaire de son établissement. Malgré l'aide apporté au 15e S. par les ottomans aux juifs d'Espagne, aujourd'hui les juifs affichent des tendances anti-ottomanes et anti-musulmanes.
        Le journal a également critiqué sévèrement les Turcs musulmans, qui se sont joints au comité de célébration, mis sur pied par la communauté juive.

DONNEES SUR L'IMMIGRATION TURQUE

        En 1988, le nombre d'immigrants trucs à travers le monde, a augmenté de 1,9% par rapport à 1987: 1.056.014 de ces 2.349.070 citoyens turcs sont salariés. Le nombre d'immigrants turcs fixés dans les pays européens s'élève à 2.110.210 dont 780.000 sont âgés de moins de 18 ans (Hurriyet,  1/2/89 -Tercüman,  31/10/88). Ci-dessous figure leur répartition entre les différents pays d'accueil:

PAYS

RFA
Pays-Bas
France
Belgique
Danemark
RU
Autriche
Suisse
Suède
Norvège
Libye
Arabie Saoudite
Irak
Koweit
Autres

IMMIGRANTS

1.481.396
160.637
185.000
79.671
23.000
17.000
85.000
52.768
21.875
3.866
22.500
112.000
10.660

SALAIRE

609.515
78.000
78.000
32.500
11.000
33.438
27.074
10.000
22.000
105.000
9.697

JEUNES DE MOINS DE 18 ANS

544.100
71.407
74.935
29.579
25.000
20.535
---
600
---
---
        Au début de l'année 1989, le nombre de nationaux turcs fixés en Belgique a été estimé à 83.000. En un an, 1.100 enfants turcs sont nés en Belgique. Le taux de croissance de la population belge atteint à peine O,10%. Des 32.000 salariés trucs en Belgique, 21% sont sans travail et perçoivent des allocations de chômage.

1,2 MILLIONS DE TURCS RAPATRIES

        Sur une période de 10 ans: de 1974 à 1984, le nombre d'immigrants turcs qui sont retournés en Turquie atteint 1.199.718 dont 512.770 sont âgés de moins de 18 ans, 143.765 ont de 18 à 25 ans, 475.013 ont de 25 à 50 ans, 52.552 ont entre 50 et 65 ans et 13.720 sont âgés de plus de 65 ans (Tercuman,  4/11/88).
        Bien que les travailleurs turcs de RFA ont le droit de prendre leur retraite à 65 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes, très peu d'entre eux bénéficient de ce droit social en raison de l'espérance de vie très basse des nationaux trucs qui est de 57 ans. Jusqu'à maintenant, 31.856 travailleurs turcs ont pris leur pension, mais seulement 707 d'entre eux perçoivent actuellement une pension car ce sont les seuls survivants (Milliyet, 6/11/88).
        Au cours de ces dernières années, le nombre de ceux qui retournent en Turquie a accusé une forte chute. En dépit des allocations de rapatriement seulement 6.662 travailleurs turcs ont été rapatriés en 1987 (Cumhuriyet,  28/1/89). En Belgique, le nombre de travailleurs immigrants ayant bénéficiés de l'allocation de rapatriement et qui sont retournés chez eux s'élevaient à 410 en juin 1988. Parmi eux, on trouve: 235 Turcs, 62 Marocains et 35 Tunisiens (Le Soir,  24/8.88).

BUSINESS TURC EN ALLEMAGNE

        En 1987, le chiffre d'affaire total des hommes d'affaires et des commerçants se montait à 23.400 millions de DM (13.294 millions de dollars). Chiffre plus élevé que le revenu annuel des exportation de la Turquie (Hurriyet, 30/11/88). Le nombre d'hommes d'affaires et de commerçants turcs aux Pays-Bas s'élève à 2.100.
        Le majorité d'entre eux sont des travailleurs immigrants qui craignant le chômage, ont investi leurs économies dans les affaires pour assurer leur avenir.
        De plus, les immigrants turcs d'Allemagne ont envoyé 13.618 millions de dollars en Turquie e 1980 à 1986, ce qui fait une moyenne de 1.964 million de dollars par an. Actuellement, le solde des comptes des immigrants dans les banques turques s'élève à un total de 7.535 millions de dollars.
        Près de 170.000 immigrants ont placé leurs économies dans les soi-disant "compagnies de travailleurs qui fonctionnent en Turquie. Bien que le but déclaré de ces compagnies était d'offrir aux travailleurs immigrés la possibilité de travailler dans leurs propres entreprises et ce dans le cas d'un rapatriement, plusieurs d'entre elles sont déjà sous l'influence de gros holdings financiers ou de banques (Milliyet, 24/11/88).
        Ayant désormais perdu tout espoir de travailler dans leurs propres entreprises, les travailleurs immigrés placent maintenant leurs économies en achetant des biens réels en Allemagne. C'est pour cette raison que l'envoi annuel vers la Turquie est tombé de 2,5 milliards de dollars en 1981 à 1,6 milliards en 1986. (Cumhuriyet,  3/8/88).

MONTEE DE L'EXTREME-DROITE EN ALLEMAGNE   

        La défaite du centre et la montée extraordinairement forte du Parti républicain d'extrême-droite xénophobe à Berlin-ouest lors des élections municipales de 29 janvier dernier a fortement choqué la ville de Berlin et le reste du pays.
        Le résultat était tellement inattendu que le RP n'avait pas assez de candidats pour occuper les 11 sièges qu'il a remporté. Selon le système électoral ouest-allemand, les sièges sont répartis selon la part de voix acquise mais seulement entre les candidats qui se sont présentés.
        Le RP avait axé sa campagne électorale sur les stéréotypes turcs au plus de 150.000 immigrés turcs vivent actuellement à Berlin. Son leader, Schonhuber, est un ancien Waffen-SS.
        Lorsqu'il a été dévoilé qu'il passe ses vacances d'été dans une villa qu'il possède à Bodrum, en Turquie, il a déclaré qu'il était contre la présence des Turcs en Allemagne mais qu'il a de nombreux amis turcs en Turquie!
        Après le succès électoral inattendu du RP, près de 100.000 personnes ont manifesté dans les rues de Berlin pour exprimer leur opposition à ce parti.
        Le RP n'est pas le seul groupe politique qui mène une campagne contre les Turcs.
        Le ministère de l'intérieur a déjà interdit le Front National pour ses actions racistes et xénophobes.
        Le 3 août 1988, dans la ville Langen (Hesse), 5.000 personnes ont manifesté conter une organisation d'extrême-droite: le Parti des Travailleurs pour la Liberté (FAP) qui incitaient les écoliers allemands à réagir de façon raciste contre leurs condisciples immigrés.
        Un autre parti néo-fasciste, Deutsche Volksunion, distribue souvent des tracts contre les travailleurs immigrés dans plusieurs villes allemandes.

AGRESSION XENOPHOBES EN ALLEMAGNE

        Le 19 décembre, dans la ville de Schwandorf, Josep Saller, âgé de 19 ans et membre du Front National, a mis le feu à une maison habitée par des immigrants. Trois Turcs et un Allemand ont péri.
        Le 2éme décembre, à Hambourg, un groupe de Skin Heads a attaqué des étrangers et en a blessé 5.
        Le 10 janvier, dans la ville de Lundau, une maison habitée par des familles turques a été incendiée.
        Le 18 janvier, à Berlin, un local turc a été pillé par un groupe raciste.
        Le 27 janvier, des inconnus ont détruit le cimetière turc de Berlin, vieux de 125 ans. Le fait que cet incident a eu lieu la veille du vendredi, jour où les Turcs de Berlin, vont prier à la mosquée de ce cimetière prouve que les auteurs de cette profanation avait pour put la provocation.
        Le 31 janvier, dans la ville de Oberusel, près de Francfort, un local turc a été pillé par un group de Skin Heads.
        Le 17 février, dans la ville de Schluchtern, un groupe de Skin Heads a attaqué une discothèque turque et a blessé deux turcs ainsi que deux autres étrangers. La police a arrêté 16 Skin Heads.
        Le 26 février, un groupe de 30 Cockers a attaqué des jeunes criant "les étrangers dehors", "l'Allemagne aux Allemands", deux jeunes gens ont été blessés.