TROIS FEMMES DEPUTES EUROPEENS
TRAITEES DE "PROSTITUEES" PAR UN MINISTRE TURC
Trois femmes membres du Parlement européen ont été
traitées de "prostituées" par le ministre d'Etat turc, Ayvaz Gökdemir,
après leur mission en Turquie.
Les trois parlementaires - Pauline Green, leader du
groupe socialiste, Claudia Roth, leader du groupe des verts et
Catherine Lalumière, leader de l'Alliance radicale européenne,
baptisées par la presse turque d'Euro-Amazones, ont visité la Turquie
en mai dernier pour procéder à des négociations sur les droits de
l'homme et l'union douanière.
Ce ministre aurait déclaré lors d'un meeting
électoral qu'il s'opposait à la libération des députés kurdes
emprisonnés en Turquie. Il aurait dit également: "Nous ne relâcherons
pas ces traîtres pour les beaux yeux des prostituées de l'Europe qui
sont venues nous visiter, je ne sais même pas à quel titre. Que Dieu
ait pitié de nous et nous préserve de tels partenaires de coalition".
Suite à ces déclarations les trois parlementaires
ont déposé une plainte formelle auprès de la Premier ministre Tansu
Ciller. Dans une lettre envoyée le 8 juin dernier à Ciller, elles
écrivent: "Notre visite en Turquie avait pour objet de renforcer
l'entente entre la Turquie et l'Europe. Malheureusement des remarques
aussi incendiaires et insultantes ne servent qu'à anéantir les efforts
déployés et n'ont pas leur place dans des relations démocratiques
normales".
Elles ont demandé à Ciller de condamner ces
remarques. "Nous attendons des excuses personnelles du ministre
concerné", ont-elles ajouté.
En signe de protestation elles ont refusé d'assister
à la réception donnée par le ministre des Affaires Etrangères, Erdal
Inönü, au cours de sa visite à Bruxelles.
Le Premier ministre Ciller, dans une réponse aux
trois parlementaires, a condamné les remarques, "Je suis extrêmement
attristée par tout ce qui s'est passé. Je ne pensais pas qu'un de mes
ministres ferait de telles remarques alors que j'étais très satisfaite
de notre récent échange de points de vue. En tout cas, des
manifestations aussi désobligeantes sont extrêmement désagréables et ne
représentent certainement pas l'opinion de mon gouvernement pas plus
que la mienne. Je suis vraiment attristée par ce regrettable incident
et espère que notre dialogue se renforcera".
Gökdemir, pour sa part, a continué à insulter les
trois parlementaires malgré un communiqué de presse publié le 9 juin
pour apaiser les réactions.
Dans ce communiqué de presse, Gökdemir dit ceci:
"Bien que je n'aie fait aucune déclaration portant atteinte à l'honneur
et la fierté de ces personnes, je déplore qu'elles aient été blessées
par un rapport erroné et malavisé. Si ça peut les soulager, je leur
présente mes excuses pour ce malentendu. Cependant, je voudrais
souligner la responsabilité de la presse lorsqu'elle rapporte des
faits, ainsi que la nécessité pour nos amis européens de faire preuve
de la même sensibilité dans leurs attitudes et commentaires à l'égard
de la Turquie."
Malgré le caractère réticent de ces excuses, Ciller
n'a pris aucune mesure concrète pour relever ce ministre de son poste
dans son cabinet.
Selon le quotidien Cumhuriyet du 14 juin 1995,
Gökdemir, discutant de l'incident avec Ciller, aurait dit, "Je n'ai pas
dit "orospu" (prostituée), mais "kahpe" (putain). Ciller a considéré
cette explication comme suffisante et a maintenu ce ministre à son
poste.
Le président de l'Assemblée nationale turque,
Hüsamettin Cindoruk, a défendu le ministre dans une déclaration de
presse et a accusé les parlementaires européennes de provoquer des
réactions justifiées du côté turc.
Tel une récompense, le Président Süleyman Demirel a
emmené Gökdemir avec lui lors de sa visite officielle dans le
Kazakhstan.
Gökdemir est considéré comme un des personnages les
plus belligérants du mouvement d'extrême-droite et surnommé "Commando
Ayvaz". Avant le coup-d'Etat militaire de 1980 il avait été le
Directeur général de l'enseignement secondaire et avait placé de
nombreux Loups gris dans les institutions éducatives. Après le coup il
est devenu directeur d'un collège privé appartenant au frère de
Demirel. Plus tard il a rejoint les rangs du DYP et, depuis les
dernières élections, forme partie du gouvernement.
DEMIREL ACCUSE L'EUROPE DE "LA CONSPIRATION"
Le Président Süleyman Demirel déclarait le 9 mai
dernier que la "Turquie est confrontée à une conspiration occidentale
pour empêcher que le pays ne conclue une union douanière avec l'Europe".
"Je ne dis pas que nous devrions quitter l'Europe.
Mais la Turquie ne lui doit pas son existence... Ceci est un fait...
Nous ne sommes la bosse sur le dos de personne. Pas plus que nous ne
dépendons de l'Occident... Nos citoyens doivent savoir que notre Etat
se tient la tête haute grâce à notre nation", explique-t-il.
Cette déclaration du Président contredit une autre
déclaration de son Premier ministre Tansu Ciller, qui le 5 mai
déclarait, "J'affirme que la Turquie deviendra un membre à part entière
de l'Union européenne dans les trois années à venir".
Demirel s'est exprimé en direct à la télévision dans
le célèbre programme d'actualité "32e Jour".
Demirel a précisé que l'Etat turc se doit de
protéger son drapeau et sa nation contre les tentatives déployées pour
lui soustraire une partie de ses terres afin d'y ériger un nouveau
drapeau.
"Certaines personnes pensent que les efforts
déployés par la Turquie pour combattre ceux qui tentent d'ériger un
nouveau drapeau constitue un cas d'oppression de certaines populations
et que ce sont d'autres personnes qui ont pris les armes pour les
défendre", affirme Demirel.
"Suis-je supposé applaudir ceux qui disent, `la
situation des droits de l'homme en Turquie est arrivée à un tel point
qu'on ne devrait pas lui permettre de conclure une union douanière'. Ce
ne sont là que des manoeuvres pour empêcher la Turquie de rejoindre
l'union douanière", poursuit-il.
Une semaine auparavant, Demirel avait déclaré aux
journalistes que des cercles occidentaux tentaient de soumettre la
Turquie aux conditions de Sèvres.
Sèvres est un district près de Paris où les alliés
sont arrivés à un accord à la fin de la Première Guerre mondiale pour
diviser la Turquie et qui prévoyait la création d'un Etat kurde et un
autre arménien en Anatolie.
Le Traité de Sèvres, c'est ainsi qu'on le connaît,
est devenu lettre morte après la Guerre d'indépendance turque et les
frontières de la Turquie ont été fixées plus tard par le Traité de
Lausanne.
Faisant allusion à ses remarques sur Sèvres, Demirel
a ajouté, "La Turquie a de nombreux ennemis mais reste ferme malgré
tout. L'Occident identifie la lutte turque contre le terrorisme avec la
question kurde. Le Traité de Lausanne considère les Kurdes des citoyens
turcs à part entière. Nous leur disons [à l'Occident] que ces personnes
[les Kurdes] possèdent l'entièreté de ce pays".
Demirel a également souligné que la manière dont fut
tracée la frontière entre l'Irak et la Turquie à l'époque est
incorrecte. "Cette frontière n'est pas bonne. Si quelqu'un me dit
qu'elle est bonne je lui démontrerai le contraire et lui demanderai de
la corriger. Mais pas unilatéralement ou par la force. Faisons-le avec
l'Etat concerné. Nous pouvons le faire maintenant ou dans 10 ans. On
peut parfaitement y arriver par des moyens pacifiques et raisonnables".
Demirel a reconnu que l'opération menée par la
Turquie dans le nord de l'Irak contre les militants du PKK n'avait pas
résolu le problème. "Non ce n'est pas fini. Cinq cent quatre-vingt-huit
personnes [militants du PKK] ont été retrouvées mortes, mais 2.000
autres sont parties ailleurs", a-t-il précisé.
Ciller, pour sa part, a dit, "L'adhésion de la
Turquie àl'Union européenne est possible, et n'est pas aussi difficile
que certains le croient. Il y a des signes perceptibles qui tendent à
le prouver. On ne pourrait donner priorité à un accord d'adhésion avec
les membres de l'ancien bloc de l'Est au détriment de la Turquie.
L'Europe n'oserait pas laisser la Turquie à l'écart. A ce propos
mon image [personnelle] sera un atout pour la Turquie. Personne ne me
croyait l'année dernière lorsque j'ai dit que la Turquie conclurait une
union douanière avec l'Union européenne. Je fais maintenant une
affirmation similaire. Mais celle-ci est encore plus réaliste".
LES RAPPORTS SUR LA TURQUIE SE SUCCEDENT
"Chaque jour qui passe, les relations entre la
Turquie et le monde occidental s'approchent un peu plus de l'abîme.
Nous jouons avec le feu", a déclaré un commentateur des affaires
étrangères, Mehmet Ali Birant, dans un article publié le 5 juin 1995
par le quotidien Sabah.
Nous reproduisons ci-après les principaux passages
de l'article:
"La seule chose que les pays occidentaux attendent
de nous est que nous respections nos engagements et que nous nous
soumettions aux accords internationaux que nous avons signés. En
d'autres termes, ils veulent que nous respections les droits de l'homme
et les principes démocratiques les plus élémentaires. Ils ne nous
demandent rien d'autre.
"Ils ne nous demandent pas des concessions ni
essaient de nous montrer comment gouverner notre pays. Même ceux qui
voient une conspiration derrière chaque porte commencent à s'en rendre
compte.
"Dans les relations internationales des déclarations
apparemment insignifiantes sont faites et puis leur ton et leur contenu
changent. Des rapports sont alors élaborés. Lorsque les rouages
internationaux commencent à tourner, le pays concerné réagit afin de
les empêcher de tourner ou se retrouve dans une position humiliante,
prisonnier de ces engrenages.
"La Turquie va rapidement vers cette position. Les
rapports sur le pays se succèdent. Ils annoncent d'importants
préparatifs pour l'avenir. Ces rapports servent de base aux mesures à
prendre. Le `rendez-vous' de la Turquie avec l'Occident est prévu pour
l'automne. Selon le `scénario' la Turquie fera l'objet d'un débat dans
plusieurs forums internationaux entre septembre et la fin de l'année.
"Le Parlement européen débattra dès septembre s'il
convient de ratifier l'accord d'union douanière entre la Turquie et
l'Union européenne. Une décision sera prise en novembre-décembre au
plus tard.
Le Conseil de l'Europe débattra lors de sa prochaine
session pour savoir s'il faut accepter les lettres de créance des
parlementaires turcs. On débattra également de la possibilité de
soumettre la Turquie à examen.
"L'Organisation pour la sécurité et la coopération
en Europe discutera de la nécessité de soumettre la Turquie à un
contrôle plus strict et d'y envoyer plus fréquemment des délégations.
"Le Congrès américain décidera en septembre-novembre
s'il suspend les crédits militaires à la Turquie, et même s'il impose
un embargo sur la vente d'armes à ce pays.
"Les rapports qu'utiliseront ceux qui sont pour ou
contre la Turquie au cours de ces débats sont prêts. Le
Département d'Etat américain et l'Organisation pour la sécurité et la
coopération en Europe ont déjà publié leurs rapports sur la Turquie. Le
Parlement européen et le Conseil de l'Europe préparent actuellement les
leurs. C'est ainsi que fonctionne le mécanisme.
"Seule la Turquie peut faire échouer ce plan. La
seule chose qu'elle a à faire est de compléter les réformes promises
tant de fois par le gouvernement, celles citées dans son programme. Des
réformes que le gouvernement a promises à son propre peuple et aux
représentants de tous les pays étrangers et des organisations
internationales."
LES RAPPORTS DE L'OSCE ET DE L'UEO
Récemment, les assemblées parlementaires de l'Union
de l'Europe occidentale (UEO) et de l'Organisation pour la sécurité et
la coopération en Europe (OSCE) ont produit des rapports extrêmement
critiques sur la situation des droits de l'homme en Turquie.
Le rapport de L'UEO conclut:
"La solution à la Question kurde passe par une
reconnaissance d'une sorte d'autonomie politique et administrative dans
le cadre d'une intégrité territoriale turque. Sinon, cette question
restera une menace pour la sécurité et la stabilité en Turquie et une
limitation aux possibilités turques d'appliquer des politiques
équilibrées de sécurité et de défense ainsi qu'à son intégration aux
institutions européennes.
"Le gouvernement turc, en refusant de reconnaître
les identités ethniques, aggrave la question jusqu'à mettre en péril la
sécurité de l'Etat.
"C'est un droit et un devoir pour le gouvernement
turc de défendre sa population contre le terrorisme. Cependant, la
Turquie devrait admettre que la question du nationalisme kurde ne peut
se résoudre par des opérations militaires.
"La Turquie recourt à la violence contre la
population civile et se montre discriminatoire envers elle au cours de
ses opérations contre les séparatistes kurdes dans le Sud-est. La
torture, les meurtres et autres violations des droits de l'homme
incitent les gens à rejoindre les mouvements séparatistes et même le
PKK.
"Le maintien de l'armée d'occupation turque à Chypre
constitue un des plus grands obstacles à la solution du problème
chypriote".
Le rapport de l'OSCE conclut:
"Les autorités turques abordent la Question kurde en
disant qu'il n'y a pas de question kurde, mais une question de
terrorisme.
"La Turquie endure de grandes souffrances et
d'importantes pertes économiques à cause du terrorisme du PKK. Tous les
pays membres de l'OSCE devraient donc aider Ankara dans sa lutte contre
le terrorisme et sa défense de l'intégrité territoriale turque.
"Des déclarations dénonçant l'utilisation de la
violence et la torture dans la lutte contre le terrorisme se succèdent.
Dans bon nombre d'entre elles, les forces de sécurité sont tenues pour
responsables.
"Bien que le gouvernement turc prenne des mesures
pour empêcher la torture et les mauvais traitements, il devrait
également veiller à leur application."
LA TURQUIE SANCTIONNEE A STRASBOURG
La Cour européenne des droits de l'homme, prononçant
sa première sentence à propos des plaintes contre la Turquie, ordonnait
à Ankara le 8 juin dernier de verser des dommages et des frais
judiciaires, pour une valeur totale de 6.000 dollars dans chaque cas, à
deux hommes politiques turcs.
Le président du défunt Parti Communiste Unifié de
Turquie (TBKP), Nihat Sargin, et le Secrétaire général, Nabi Yagci
(alias Haydar Kutlu) avaient été emprisonnés inutilement pendant deux
ans et demi pour être acquittés pendant leur procès.
Ils avaient été arrêtés lors de leur retour en
Turquie en novembre 1987 après des années d'exil. Au cours du procès,
très suivi à l'étranger, ils se sont plaints de mauvais traitements
pendant leur détention.
Ils étaient accusés d'une série de délits parmi
lesquels celui d'avoir préconisé le gouvernement par une classe
sociale, avoir incité le public à l'hostilité et porté préjudice à la
réputation de la Turquie.
La Cour européenne a rejeté les raison invoquées par
le gouvernement turc pour ne pas avoir libéré ces deux homme plus tôt,
à savoir qu'ils pouvaient s'enfuir.
"Le danger de fuite d'un accusé ne peut s'évaluer
uniquement sur base de la sévérité de la peine dont il est passible", a
précisé la cour dans un communiqué.
Dans un deuxième cas, la Cour européenne a ordonné
le paiement de 6.000 dollars de dommages à Sadi Mansur, un Iranien
condamné pour trafic de drogues et qui est resté en prison les neuf ans
et demi qu'a duré le procès.
Ce sont deux cas parmi d'autres impliquant la
Turquie abordés par le système européen de contrôle des droits, dont
fait partie la Commission européenne des droits de l'homme.
Au cours des premiers six mois de 1995, la
Commission a admis un total de 27 cas soumis par des citoyens turcs
grâce à l'assistance de l'Association des droits de l'homme de Turquie
(IHD) et du Projet des droits de l'homme du Kurdistan (KHRP).
Les plaintes concernent des exécutions
extra-judiciaires, des "disparitions" de détenus, des tortures et des
destructions de villages.
DEPORTATION D'UN FONCTIONNAIRE D'AMNESTY
Un représentant d'Amnesty International, Helmut
Oberdiek, était expulsé de l'aéroport d'Istanbul Atatürk le 7 juin
dernier car le gouvernement turc l'avait déclaré "persona non grata" en
décembre 1994.
Oberdiek avait été envoyé par Amnesty International
pour examiner les événements qui avaient conduit à la déportation de
Jonathan Sugden, précédent rsponsable d'Amnesty pour la Turquie,
"accusé" de venir en aide au PKK.
Oberdiek aurait mené une enquête pendant dix jours
avant d'être pris par la police à Adana le 5 juin dernier et renvoyé en
Allemagne deux jours plus tard.
Dans une interview par téléphone le 10 juin avec le
Turkish Daily News depuis l'Allemagne, Oberdiek a déclaré que trois
policiers en civil l'avaient emmené de sa chambre d'hôtel pour
l'interroger.
"Ils ne m'ont pas dit qu'ils m'arrêtaient. Ils m'ont
juste dit `vous devez venir avec nous'. Ils m'ont alors amené au
département de police chargé des étrangers", a déclaré Oberdiek.
"Là ils m'ont dit que mon entrée en Turquie était
illégale. Je leur ai demandé quelle autorité l'avait décrété. Au début
ils ne voulaient pas me le dire mais par la suite ils m'ont fait savoir
qu'il s'agissait du Ministère de l'Intérieur."
Oberdiek a précisé qu'il avait subi un traitement de
faveur pendant sa détention et qu'il n'avait pas été en prison. "On m'a
seulement fait attendre dans un pièce et ensuite j'ai été conduit au
département qui s'occupe des affaires de terrorisme. Pendant huit
heures j'y ai discuté avec des policiers. En d'autres mots, il ne
s'agissait pas d'un véritable interrogatoire. Mais ils m'ont accusé de
toutes les erreurs commises par les gouvernements européens. Mes notes
et mes affaires personnelles ont été examinées par chacun des policiers
présents. Ce qui me préoccupe vraiment c'est que ceux dont les noms
apparaissaient dans mes notes fassent l'objet d'une quelconque menace",
a-t-il déclaré.
Oberdiek, qui s'était rendu en Turquie à maintes
reprises et qui avait vécu à Ankara pendant un an, en 1991, grâce à un
permis de séjour officiel, a dit que ses nombreuses demandes pour voir
un avocat ou donner un appel téléphonique avaient été rejetées.
Il a finalement été envoyé à Istanbul sous escorte
policière. Les deux policiers qui l'ont accompagné sont restés à ses
côtés jusqu'à ce qu'il soit monté à bord de l'avion qui l'emmènerait
hors du pays.
DES HELICOPTERES AMERICAINS UTILISES CONTRE LES KURDES
Dans un rapport publié le 8 mai 1995, Amnesty
International critique le gouvernement turc pour avoir utilisé des
hélicoptères Sikorsky et Super Cobra de fabrication américaine contre
les guérillas kurdes.
"Des témoignages récents indiquent que du matériel
militaire américain fourni à la Turquie pourrait être utilisé par les
forces de sécurité turques contre des civils innocents, violant de
manière flagrante les droits de l'homme", précise le rapport.
Outre un cas d'"Ali Karaka", la personne qui aurait
été torturée par la gendarmerie locale et mise dans un hélicoptère, AI
a également "reçu d'autres rapports indiquant que des hélicoptères
étaient utilisés pour aéroporter des soldats pour l'attaque de villages
où se sont produit des `disparitions'".
La Turquie recevra en 1996 un prêt des Etats-Unis de
450 millions de dollars en vertu du Programme de financement militaire
étranger (FMF) ainsi que 100 millions de dollars du Fonds de soutien
économique et 103 autres en tant qu'octroi de surplus d'articles de
défense.
Le rapport d'AI demande à la Turquie une déclaration
publique des plus hautes autorités affirmant leur "opposition absolue à
la torture", de supprimer la détention au secret, d'éclaircir les faits
dénoncés en vertu de normes internationales, d'interdire l'utilisation
de déclarations faites sous l'emprise de la torture, de supprimer
l'article 8 de la Loi Anti-Terreur et de dédommager comme il se doit
les victimes des violations des droits de l'homme.
Le rapport, intitulé "Droits de l'homme et
assistance militaire américaine", dénonce également de "graves
violations des droits de l'homme" par le PKK. Il précise notamment
qu'en "décembre 1994 le PKK s'était engagé à respecter l'article 3 de
la Convention de Genève de 1949, qui interdit de maltraiter ou de tuer
des civils ou des prisonniers de guerre. En janvier 1995, cependant, le
PKK continue de violer les droits de l'homme".
Le gouvernement turc refuse d'admettre ou même de
discuter de l'engagement du PKK à respecter la Convention de Genève car
il ne reconnaît pas un "groupe terroriste" comme interlocuteur légitime
dans un quelconque processus légal.
UN RAPPORT AMERICAIN CONFIRME L'UTILISATION D'ARMES AMERICAINES
Le 2 juin l'administration Clinton admettait qu'il
était très probable que du matériel militaire d'origine américaine ait
été utilisé dans des opérations de soutien pour évacuer et/ou détruire
des villages dans le sud-est de l'Anatolie, mais reconnaissait à la
Turquie le droit d'utiliser ces armes pour "sa défense et le maintient
de la sécurité interne".
Dans un rapport soumis à la Commission des dotations
du Congrès, le Département d'Etat américain maintient que pour le
moment la Turquie n'a toujours pas "satisfait à son obligation reconnue
internationalement de subvenir aux besoins des personnes déplacées".
Le rapport souligne que les exécutions
extra-judiciaires, qualifiées d'"assassinats mystérieux", continuaient
de se produire en masse jusqu'à la fin de 1994 -plus de 2.000 au cours
des trois dernières années- mais ont diminué depuis.
Human Rights Watch (HRW) a immédiatement critiqué le
rapport du Département d'Etat américain sur la Turquie car celui-ci
omet de dire que brûler des villages constitue "une des politiques du
gouvernement turc".
"Human Rights Watch regrette que le Département
d'Etat ait déclaré qu'il n'avait pas une idée claire de ces évacuations
de villages", souligne un communiqué de presse de l'organisation. "Le
manque de précision du Département d'Etat à propos de la campagne
d'évacuation laisse entrevoir un désire de ne pas offenser le
gouvernement turc qui dément l'utilisation de ces pratiques."
Le HRW soutient que les circonstances précises de
ces évacuations sont très claires. "Des investigations sur le terrain
par le HRW sur les évacuations et les déclarations des fonctionnaires
du gouvernement turc concluent que la plupart des 1.400 évacuations
forcées de villages et hameaux dans le sud-est de la Turquie sont dues
à une campagne de contre-insurrection par le gouvernement", affirme
l'ONG.
Cette organisation tient également le gouvernement
turc pour responsable de la majorité des évacuations forcées et des
destructions de villages, qui généralement correspondent à des
punitions pour avoir refusé de se joindre au système des gardiens de
village ou pour avoir fourni au PKK un soutien logistique ou humain.
Le PKK a tué des civils et commis de nombreuses
violations des droits de l'homme, leurs attaques contre des zones
habitées se dirigent généralement contre des villages soumis au système
des "gardiens de village", une minorité dans la zone, poursuit HRW.
HRW demande au Département d'Etat de poursuivre ses
investigations et d'actualiser son rapport sur l'utilisation d'armes de
fabrication américaine dans toutes les opérations menées dans le
sud-est de la Turquie, notamment pendant les évacuations de villages.
LA TURQUIE PLACE L'AFRIQUE DU SUD DANS LA LISTE ROUGE
En réponse à la décision du gouvernement
sud-africain de suspendre la vente d'armes à la Turquie, le
gouvernement d'Ankara a inclu ce pays dans une "liste rouge" de
fournisseurs d'armes.
Début mai 1995, l'Afrique du Sud suspendait la vente
d'armes à la Turquie en raison de l'incursion de cette dernière dans le
nord de l'Irak.
"Nous considérons cette décision outrageante et
l'attribuons aux liens maintenus par le passé avec le Congrès national
africain (ANC)", a déclaré un diplomate turc au Turkish Daily News le
23 mai 1995.
Dans ce commentaire sur les liens du passé avec
l'ANC ont entrevoit une allusion voilée à la croyance turque selon
laquelle l'ANC, surtout pendant sa période de groupe de résistance,
maintenait des liens avec le PKK. Lorsque Nelson Mandela, avant les
élections multiraciales qui lui ont permis de devenir président, avait
refusé la distinction "Atatürk" que lui offrait la Turquie en 1992, des
cercles turcs ont attribué ce refus à l'influence qu'avait le PKK sur
l'ANC.
La "liste rouge" est une euphémisme du Ministère des
Affaires Etrangères qui signifie que le pays en question est sur la
"liste noire" des fournisseurs d'armes. Ces pays n'ont pas le droit de
vendre du matériel militaire à la Turquie et leurs adjudicataires ne
peuvent entrer dans le pays.
Bien que le commerce des armes entre ces deux pays
soit négligeable, la Turquie considérait l'Afrique du Sud comme un
possible fournisseur d'armes et a approché plusieurs fournisseurs
d'armes sud-africains pour l'achat d'hélicoptères Reoivak et de bombes
"grappe".
PRESSIONS SUR LES VILLAGES CHRETIENS
L'Organisation démocratique assyrienne (ADO)
annonçait le 6 juin dernier que quatre chrétiens assyriens du village
de Geznag (Cevizagac) à Tur Abdin, région native de cette minorité
chrétienne de Turquie, avaient été arrêtés le 9 mai dernier par l'armée
turque sous prétexte qu'ils avaient collaboré avec le PKK.
Ces Assyriens, Eprim Diril, Mesih Diril, Ishak Diril
et Metin Yaramis, sont natifs du village de Mehre (Kovankaya), détruit
par l'armée turque en juin 1994, et ont dû émigrer vers le village de
Geznag.
Les fils d'Eprim et Mesih Diril, Zeki et Ilyas sont
portés disparus depuis mai 1994. Le frère d'Ishak Diril était le maire
du village de Mehre et est en prison depuis le 16 juin 1994.
Au village de Geznak il ne reste que sept familles
assyriennes composées uniquement de femmes et d'enfants.
ADO rapporte également que le village chrétien de
Marbobo est sous la pression permanente du groupe fondamentaliste
islamique pro-gouvernemental Hezbollah. Les villageois n'ont même pas
le droit d'aller travailler dans leurs champs.
Avec ces pratiques, l'armée turque et le Hezbollah
tentent de forcer la communauté assyrienne à quitter le pays
abandonnant leurs terres aux propriétaires musulmans.
ADO et les organisations assyriennes ont demandé au
gouvernement turc de faire cesser les pratiques destructrices employées
par l'armée turque et le Hezbollah à Tur Abdin.
L'HYPOCRISIE D'ANKARA A PROPOS DES DROITS CIVIQUES DE NAZIM HIKMET
Dans le numéro précédent, nous informions que malgré
la promesse faite en 1993 devant la Commission européenne des droits de
l'homme, le gouvernement turc n'avait toujours pas reconnu
officiellement les droits civiques des deux rédacteurs d'lnfo-Türk,
Dogan Özgüden et Inci Tugsavul, privés de leur nationalité turque en
1983 suite à une décision de la junte militaire et que les missions
diplomatiques turques avaient lancé une campagne de discrédit à l'égard
de leur travail de défense des droits de l'homme en Turquie.
A ce jour nous n'avons toujours pas reçu la moindre
explication à ce sujet des autorités turques.
L'hypocrisie du gouvernement turc dans le thème des
droits civiques était une nouvelle fois confirmé ce mois à une autre
occasion.
Le 2 mai dernier, le ministre de la Culture Ercan
Karakas (CHP) demandait au Premier Ministre d'abroger un décret vieux
de 44 ans qui prive le célèbre poète Nazim Hikmet de la citoyenneté
turque. Dans une note écrite Karakas argumente que "ce décret est
devenu anachronique suite aux évolutions survenues dans le monde et
dans notre société." Le ministre a ajouté que les instances
internationales et la grande majorité du peuple turc veulent la
suppression de ce décret.
Nazim Hikmet, constamment persécuté par la police
pour ses idées communistes et emprisonné pendant plus de 12 ans,
quittait la Turquie en 1951 et s'établissait à Moscou où il vécut en
exil jusqu'à sa mort le 3 juin 1963. Il y est encore enterré.
Ce célèbre poète fut privé de sa nationalité turque
tout juste après son départ.
Karakas a souligné que le rétablissement posthume de
la citoyenneté de Nazim Hikmet serait une étape importante pour la
Turquie et a ajouté qu'elle pourrait être rétablie et sa dépouille
ramenée en Turquie pour le 3 juin 1995, date anniversaire de sa mort en
exil.
Contrairement aux espérances de son ministre de la
Culture, la Premier ministre Tansu Ciller n'a pas prêté la moindre
attention à cette demande et le 32e anniversaire de la mort d'Hikmet a
été commémoré le 3 juin en Turquie alors que sa dépouille se trouve
toujours à Moscou.
UNE LOI DE CITOYENNETE POUR CREER UN LOBBY TURC
Le 5 juin dernier le Parlement turc adoptait une loi
visant à encourager les immigrants à l'étranger à obtenir la
nationalité des pays européens où ils résident sans perdre leurs droits
civiques en Turquie, ce afin de créer un important groupe de pression
turc en Europe.
Cette loi s'adresse à ceux qui résident en
Allemagne, en Autriche, au Danemark et en Suède où près de 2,5 millions
de Turcs ont dû renoncer à leur nationalité d'origine pour obtenir
celle du pays de résidence. Les autorités de ces pays argumentent
qu'aucun étranger ne peut s'intégrer dans leur société s'il ne renonce
pas à sa nationalité.
En vertu de l'ancienne loi, ceux qui renonçaient à
la nationalité turque ne jouissaient que des droits de tout étranger
vivant sur le sol turc. De nombreux Turcs ont donc renoncé à adopter
une autre nationalité.
La nouvelle loi, visant à créer un important lobby
turc qui défende la politique d'Ankara en Europe via la naturalisation
des citoyens turcs, concède à ceux qui ont acquis la nationalité turque
par naissance mais ont dû y renoncer pour obtenir une naturalisation à
l'étranger les mêmes droits qu'aux Turcs résidant en Turquie pour tout
ce qui concerne la résidence, les voyages, l'emploi et l'acquisition de
biens mobiliers et immobiliers.
Sous la nouvelle loi ils ne devront pas avoir
accompli leur service militaire avant de pouvoir renoncer à leur
citoyenneté turque.
Cependant, la loi stipule que ces droits sont
concédés à condition que les clauses concernant la sécurité nationale
et l'ordre public n'aient pas été violées par le postulant, prétexte
hypocritement utilisé dans le cas de Nazim Hikmet et des rédacteurs
d'lnfo-Türk.
Après l'adoption de cette loi, la presse turque
s'est lancée dans une grande campagne visant à inciter les immigrants
turcs à demander la naturalisation dans leur pays de résidence,
qualifiant cet acte de devoir national en vue de défendre les droits de
l'Etat turc dans les pays européens qui ne cessent de se montrer
hostiles à l'égard de la Turquie "sous prétexte de défendre les droits
de l'homme".
188,764 PERSONNES EMPECHES DE QUITTER LA TURQUIE
Le ministre de l'Intérieur annonçait le 3 juin 1995
que 188.764 citoyens de la République turque n'avaient pas
l'autorisation de quitter la Turquie.
Parmi eux, 152.702 ne peuvent voyager à l'étranger
par décision judiciaire et 34.990 pour avoir omis de payer leurs taxes.
Selon le ministre de l'Intérieur, Nahit Mentese, on
ne délivre pas de passeport à 1.072 personnes pour des "raisons de
sécurité nationale".
UN LEADER SYNDICALISTE EN PRISON
Le 16 mai 1995, le président du Syndicat des
travailleurs de l'aviation (Hava-Is), Atilay Aycin, était emprisonné
pour purger une peine de 20 mois de prison.
Aycin avait été condamné par la CSE d'Istanbul à 20
mois de prison et à payer une amende de 21 millions de TL en vertu de
l'article 8 de la Loi anti-terreur pour avoir diffusé de la propagande
séparatiste il y a quatre ans au cours d'un meeting de protestation
contre cette même loi.
Le verdict était ratifié par la cour de cassation le
13 avril dernier et Aycin était arrêté le 16 mai.
Le Secrétaire général du Hava-Is, Mustafa Yagci a
déclaré que l'arrestation du président se produisait au moment où une
grève frappait la compagnie Havas et visait à décourager la résistance
des travailleurs.
99 INTELLECTUELS RISQUENT LA PRISON
Le 16 juin dernier, le Procureur de la CSE
d'Istanbul inculpait 99 des 1080 intellectuels qui se sont déclarés
éditeurs du livre Liberté d'expression en Turquie, une collection de 11
articles de plusieurs auteurs dont Yasar Kemal.
L'article de Kemal, publié précédemment par le
magazine allemand Der Spiegel, accusait le gouvernement de supprimer
les Kurdes dans le sud-est de la Turquie. Après la publication de son
article, il fut accusé de promouvoir le séparatisme kurde.
1080 intellectuels turcs parmi lesquels on trouve
des artistes, des écrivains, des journalistes et des leaders
syndicalistes se sont également déclarés responsables de la publication
du livre en soutien de Yasar Kemal et Erdal Oz, le véritable éditeur.
50.000 personnes ont également signé des pétitions
de soutien.
Le procureur a demandé pas moins de quatre ans de
prison pour chacun des 99 intellectuels en vertu de l'article 312 du
Code pénal turc. Ils sont accusés d'incitation à la haine raciale et à
l'hostilité dans le pays.
ATAKÜRT CONTRE ATATÜRK
Le journaliste Ahmet Altan a été renvoyé du
quotidien Milliyet après un commentaire intitulé Atakürt (Père des
Kurdes), faisant allusion à Atatürk (Père des Turcs), fondateur de la
République turque.
Dans son article, Altan dit: "la démocratie suppose
que soient acceptées les demandes des Kurdes, les mêmes que
formuleraient les Turcs si nous vivions dans un pays nommé Kurdiye
[pays des Kurdes].
"Est-ce que ça vaut la peine de verser tant de sang
et de précipiter notre pays dans une situation sans issue, juste pour
éviter de concéder des droits que nous exigerions pour nous-mêmes à des
personnes que nous considérons égales à nous?
"Tous ceux qui répondent 'non, cela ne vaut pas la
peine' sont ceux qui veulent la démocratie."
Après la publication de cet article, Altan apprit
que ses services n'étaient plus requis par le journal. L'ordre de
licenciement serait venu directement du propriétaire de Milliyet et
Hürriyet, Aydin Dogan, mais la désagréable tâche d'appliquer la mesure
est retombée sur les épaules d'Ufuk Güldemir, le tout nouveau rédacteur
en chef.
Le renvoi d'Altan a provoqué les démissions de
Güldemir et de deux autres journalistes, Can Dündar et Alev Er.
Le procureur de la CSE d'Istanbul a par ailleurs
introduit une action en justice contre Altan le 17 mai dernier et
demande une peine de prison de deux ans.
LIENS ENTRE LA FAMILLE CILLER ET LA MAFIA
La rumeur de l'implication de groupes mafieux dans
les contrats de construction illégaux dans des zones touristiques des
mers Egée et Méditerranée a surgi après l'assassinat de Lutfi Suyolcu,
ancien maire de Kusadasi réputé pour son combat contre les
constructions illégales dans la zone de sa juridiction.
Après la mort du maire le 16 mai 1995, les
insinuations sur l'implication de la mafia et de certains groupes
ultra-nationalistes sont devenues plus persistantes. Les fonctionnaires
locaux du Parti de la juste voie (DYP), au pouvoir, et du Parti
républicain du peuple (CHP) ainsi que le mari de la Premier ministre
Tansu Ciller sont soupçonnés d'être en rapport avec ces pratiques
illégales.
Lorsque le chef de police à Kusadasi, Salah Coral,
et le gouverneur régional, Ekrem Ozsoy, ont annoncé que les accusations
de corruption étaient exactes, les rumeurs ont gagné de l'ampleur. Ces
deux fonctionnaires avaient été écartés de leurs postes le 18 mai, deux
jours après le meurtre de Suyolcu .
Excédés par leur renvoi, ces deux fonctionnaires
publics ont déclaré lors d'une conférence de presse qu'il y avait une
"guerre de spéculation des terrains" dans la région. Ils ont ajouté que
les habitants de la zone soupçonnaient l'implication de deux personnes
clé dans ce trafic, Orhan Ozbas et Zeki Kucukberber, tous deux proches
d'Ozer Ciller, mari de la Premier ministre.
Après la cessation d'Ozsoy et Coral, Ozer Demirel
était aperçu à Kusadasi en compagnie d'Orhan Ozbas, accusé d'agir en
tant que gouverneur non-officiel de la ville. Ciller aurait également
rencontré le maire de Kusadasi, Engin Berberoglu.
Dans un autre célèbre cas, l'ancien administrateur
de la Marina à Kusadasi, Haydar Mengi, et le fils de Ciller, Mert, ont
été accusés de tirer à l'arme à feu depuis le yacht de Ciller en
janvier dernier. Après une enquête, plusieurs agents de police qui ont
accusé Mert Ciller auraient été transférés hors de la ville.
Après une déclaration du gouverneur d'Aydin, Kadir
Uysal, selon laquelle "la mafia est présente à Kusadasi, mais on ne
peut rien contre elle", ce cas a pris une nouvelle dimension.
Les habitants de Kusadasi sont de plus en plus à la
merci des syndicats du crime attirés vers la ville par les devises
étrangères et les rentrées du tourisme, quelque 3,5 mille milliards de
TL en 1994.
Des plaintes se sont produites non seulement à
Kusadasi, mais également dans toute la région, y compris Bodrum et
Fethiye, victimes de la collaboration entre le DYP, le CHP et des Loups
Gris ultra nationalistes dans le secteur de la construction illégale.
Le quotidien Cumhuriyet du 22 mai rapporte que les
Loups Gris ont été organisés à Kusadasi avec le soutien d'Engin
Berberoglu, actuel maire de Kusadasi élu dans les rangs du CHP.
NAISSANCE D'UNE TV KURDE MALGRE LES PROTESTATIONS D'ANKARA
Parallèlement à la fondation d'un parlement kurde en
exil, le 30 mars 1995 une chaîne de télévision kurde a commencé à
émettre une programmation internationale depuis la Grande-Bretagne.
Le gouvernement turc a échoué dans ses efforts
diplomatiques auprès des Britanniques pour qu'ils interdisent MED-TV,
très suivie non seulement par les immigrants kurdes en Europe mais
aussi par ceux qui vivent dans le Kurdistan turc.
Selon le Turkish Daily News du 16 mai 1995, la vente
d'antennes paraboliques est montée en flèche dans les provinces du
sud-est après que cette chaîne ait commencé à émettre.
Les téléspectateurs en Turquie peuvent recevoir
MED-TV, qui émet principalement en kurde, au travers du satellite
Inter-Sat, en installant une antenne parabolique au balcon, opération
qui coûte environ 11 millions de TL (250$).
Depuis sa création, MED-TV a couvert la fondation du
parlement kurde en exil et la campagne militaire turque dans le nord de
l'lrak.
L'agence de presse Reuters faisait le 15 mai dernier
ce reportage sur la chaîne kurde:
"Malgré la nature lourde -certains diraient
ennuyante- de la programmation, MED-TV a une audience très fidèle,
simplement parce qu'elle émet en kurde. 'Chaque nuit de 19 à 22 heures
tu me trouveras ici, riant alors que des enfants emmitouflés dans les
couleurs rouge, jaune et vert du nationalisme kurde dans l'écran.
Imagine que pour la première fois de l'histoire nous avons notre propre
télévision émettant pour tous les Kurdes du monde'.
"Les autorités turques ne voient pas d'un bon oeil
cette MED-TV avec licence britannique, qui utilise la technique du
satellite pour émettre en Turquie depuis le Royaume-Uni contournant
toutes les lois turques interdisant les émissions en kurde.
"La Turquie, craignant que le PKK n'utilise MED-TV
pour promouvoir ses revendications d'autonomie pour le Kurdistan, a
demandé à l'agence britannique des licences de contrôler les émissions.
'Je pense que ceci va à l'encontre des le conventions européennes sur
la télévision et les droits de l'homme, car on incite à la haine
raciale et on porte atteinte à l'intégrité territoriale de la Turquie',
a souligné un fonctionnaire du Conseil suprême turc de diffusion.
"Qu'elle maintienne ou non des liens avec le PKK
-les représentants de MED-TV affirment que différents groupes d'hommes
d'affaires financent la chaîne- les émissions offrent certainement au
PKK un autre moyen de diffuser son message.
"La tension que suscite cette nouvelle chaîne est
certainement plus profonde qu'une simple dispute à propos de la
programmation. Elle est le reflet des problèmes que rencontre la
Turquie pour effacer l'identité kurde à l'ère de la technologie et de
l'ouverture des frontières, ainsi que du rôle croissant de la diaspora
kurde la mieux instruite et la plus florissante en Europe.
"Les Kurdes d'Europe, la plupart fuyant la
répression en Turquie, deviennent un important lobby contre les
tentatives d'Ankara pour les priver des droits culturels en Turquie.
"Les Kurdes ont crée un parlement de 65 sièges à La
Haye en avril dernier comprenant des membres du PKK et du Parti de la
démocratie (DEP), formation non violente mais interdite en Turquie
l'année dernière.
"L'éducation en kurde n'est pas permise en Turquie
et les livres sur l'histoire kurde sont souvent interdits sous prétexte
qu'ils diffusent de la propagande séparatiste.
"Les représentants de MED-TV reconnaissent que les
émissions sont destinées à développer un sens de l'identité parmi les
Kurdes et pensent qu'il était temps qu'ils aient leur propre chaîne de
télévision".
L'INTERDICTION DU KURDE AGGRAVE LES PROBLEMES SANITAIRES
Le personnel sanitaire d'expression turque éprouve
des difficultés à prodiguer les soins de santé dans le Sud-est, à
prédominance kurde, c'est ce qu'affirme l'Association médicale turque
(AMT) dans un rapport publié au début du mois de mai 1995.
"Un sondage sur le thème auprès des médecins, des
sage-femmes et infirmières travaillant dans les centres sanitaires de
la province de Diyarbakir est révélateur", précise le rapport."Les
médecins pensent majoritairement qu'ils ne peuvent atteindre un degré
suffisant d'efficacité lorsque la plupart des patients ne parle pas le
turc et ne s'exprime qu'en kurde. Les sage-femmes et les infirmières
rencontrent des difficultés avec les vaccinations, la planification
familiale, les soins de santé à l'enfant et la mère et l'éducation
sanitaire en raison de la barrière de la langue".
Le rapport ajoute que les sage-femmes et les
infirmières qui parlent le kurde se montrent plus efficaces dans leurs
soins.
La AMT souligne que plus de la moitié des médecins a
dû recourir à une troisième personne pour communiquer avec les patients
et qu'une autre moitié pense qu'ils ne peuvent aider assez leurs
patients à cause du problème de communication.
A la lumière des résultats, la AMT a suggéré que les
médecins travaillant dans la région prennent conscience des conditions
socio-économiques et apprennent la langue des patients pour améliorer
la communication.
Selon cette association, dans cette région on doit
souvent recourir à une troisième personne pour communiquer avec les
patients.
LE LEADER DU PKK APPELLE A UN CESSEZ-LE-FEU
Selon une dépêche de l'agence Reuters depuis la
vallée de Bekaa, au Liban, le président du PKK, Abdullah Öcalan, a
demandé le 23 mai 1995 un cessez-le-feu dans la guerre avec la Turquie
et s'est déclaré prêt à conclure la paix si Ankara était disposée à
trouver une solution politique.
"Si l'Etat turc interrompt les opérations militaires
contre nous et s'il est disposé à trouver une solution politique, notre
organisation est prête à cesser le feu et à déposer les armes", a
déclaré Öcalan.
"Si Ankara poursuit sa campagne contre le peuple
kurde, celui-ci continuera de se battre. L'Etat turc devrait cesser
toutes les opérations militaires de destruction contre nous et opter
pour une solution politique", a-t-il ajouté.
Interpellé sur sa menace de 1993 de mener une guerre
totale en Turquie, avec des attaques contre les sites touristiques, et
si cette menace est toujours d'actualité, Öcalan a répondu:
"Etant donné que l'Etat turc nous a déclaré une
guerre totale, nous lui opposons une guerre totale... Nous visons
l'économie turque et le faisons savoir à l'étranger qu'il y a une
guerre en Turquie et que par conséquent ce n'est pas un lieu de
vacances".
Öcalan, la bannière rouge du PKK derrière lui, a dit
que les forces turques avaient détruit le potentiel économique du
Kurdistan. "Ils brûlent nos maisons.. et ne tolèrent même pas les noms
kurdes", a souligné Öcalan s'exprimant en turc.
Le leader du PKK, qui a qualifié d'échec la récente
campagne lancée par Ankara avec 35.000 soldats contre ses guérillas
dans le nord de l'Irak, a dit qu'il soupçonnait la Turquie de vouloir
répéter l'opération. "Notre présence dans le nord de l'Irak est bien
implantée... Ils [les soldats turcs] ressentent le besoin de pénétrer
dans le nord de l'lrak pour remporter un succès", poursuit Öcalan. "Ils
préparent une opération de plus grande ampleur. La présence du PKK dans
le nord de l'lrak s'est renforcée suite à l'opération. Nous avons
établi de nombreux postes stratégiques et avons réussi à attirer
l'attention sur nous".
La Turquie a qualifié de total succès la campagne
menée en Irak jusqu'au 2 mai, et a avancé les pertes suivantes: 555
combattants du PKK et 61 soldats. Selon Öcalan Ankara a inversé les
chiffres des victimes.
Le leader du PKK a également averti le Parti
démocratique du Kurdistan de Massoud Barzani que s'il se joignait aux
forces turques dans la guerre contre le PKK, il courait à sa perte.
LE PARLEMENT EUROPÉEN AVERTIT UNE NOUVELLE FOIS LA TURQUIE
Le Parlement européen, qui avait suspendu sa
commission mixte avec la Turquie, dans une résolution qu'il a adoptée
le 15 juin 1995, a menacé de ne pas ratifier l'union douanière entre la
Turquie et l'UE si les conditions n'étaient pas satisfaites.
Le Parlement, dans sa résolution qui sera soumise au
sommet de Cannes de l'Union européenne, "... réaffirme son opposition à
l'union douanière avec la Turquie tant que les membres kurdes du
parlement sont en prison et que les droits du peuple kurde ne sont pas
reconnus".
Le gouvernement turc a durement critiqué la
résolution et maintient que lier un accord lucratif à d'autres facteurs
ne bénéficierait aucune des deux parties.
"C'est triste que le Parlement européen campe sur
ses positions bien que nous lui ayons répété à maintes reprises qu'en
vertu de la séparation des pouvoirs, ni le Parlement turc ni le
gouvernement ne peuvent influencer le pouvoir judiciaire", a expliqué
le porte-parole du ministère des Affaires Étrangères, Ömer Akbel.
Cependant, tout le monde sait que les actions en
justice contre les députés du DEP sont le résultat des déclarations
provocantes de la Premier ministre Tansu Ciller, les qualifiant de
"traîtres" et influençant directement le pouvoir judiciaire.
TENSIONS AVEC LA GRECE A PROPOS DES EAUX TERRITORIALES
Après la ratification le 1er juin dernier par le
Parlement grec du Traité international de 1982 qui permet à la Grèce
d'étendre ses eaux territoriales, des tensions ont surgi entre ce pays
et la Turquie.
La Turquie n'avait pas signé ce traité, qui donne
aux pays le droit d'étendre leurs eaux territoriales jusqu'à 12 milles,
sous prétexte que le traité ne fait pas allusion au statut spécial de
la mer Égée. Mais il est entré en vigueur en novembre dernier, un an
après la ratification par les 60 signataires requis.
Ankara maintient que toute tentative de la Grèce
d'étendre ses eaux territoriales au-delà des six milles, distance en
vigueur, serait un motif de guerre. Les diplomates turcs soutiennent
que l'extension des eaux territoriales transformeraient la mer Égée en
un lac grec et les vaisseaux turcs devraient demander l'autorisation de
la Grèce pour la quasi totalité des voyages dans la zone.
Le débat entre les deux voisins de la mer Égée et
l'OTAN s'est intensifié l'année dernière lorsque la Grèce a soumis
l'accord à son parlement. La Grèce a néanmoins assuré à Ankara qu'elle
n'avait prétendu qu'elle étendrait ses eaux à partir d'une certaine
date.
Lors de la session parlementaire sur l'accord, le
vice-ministre des affaires étrangères, George Mangakis, a déclaré que
"la Grèce exercera ses droits lorsque ses intérêts le lui demanderont."
La tension est montée entre les deux pays lorsque le
gouvernement turc a annoncé ce même jour une série d'exercices
militaires qui, a-t-il précisé, étaient planifiés à l'avance.
La Grèce a trouvé ces exercices militaires turcs
dans la mer Égée "provocants".
"Il semble que la Turquie reprenne jeu habituel de
la tension artificielle et de la provocation contre la Grèce", confiait
le porte-parole du gouvernement, Evangelos Venizelos, aux reporters.
Un porte-parole du Ministère des Affaires Étrangères
turc a cependant démenti les accusations grecques, précisant que les
opérations étaient de routine et n'avaient rien a voir avec la
ratification grecque.
LE DERNIER TANGO DE L'INTERMINABLE TENSION A PROPOS DE CHYPRE
Après que l'Union européenne ait confirmé son
intention d'étudier la candidature de Chypre à devenir membre à part
entière et que le leader turc chypriote, Rauf Denktas, ait été réélu en
président de la prétendue "République turque du nord de Chypre", ce
problème chronique entre la Turquie et la Grèce a pris une nouvelle
dimension.
Dans un article publié par le quotidien Sabah le 25
avril 1995, le commentateur des affaires étrangères Mehmet Ali Birand
disait:
"Le dernier tango est sur le point d'être dansé en
Chypre. Pour la dernière fois Denktas a été élu président et le restera
jusqu'en l'an 2000. Pour cette date, le destin de l'île se sera joué,
d'une manière ou d'une autre. Nous sommes entrés dans la dernière phase
du 'jeu'.
"Curieusement, pour mettre fin à ce 'jeu' le peuple
chypriote [turc] a élu -d'une manière un peu têtue- la personne qui a
tout déclenché dans les années 50.
"Le peuple chypriote veut maintenant une solution.
Ils en ont assez de l'absence de solutions. Avec leur vote aux
dernières élections présidentielles ils ont démontré que seul Denktas
peut apporter une solution au problème chypriote indépendamment de la
rigidité de son attitude. Dans la phase finale de sa carrière
politique, Denktas se trouve à un tournant historique. Et le panorama
qui se présente à lui n'incite guère à l'optimisme.
Les États-Unis commencent soudainement à bouger pour
résoudre les différends entre la Turquie et la Grèce le plus vite
possible et dissoudre les nuages qui obscurcissent dangereusement les
relations entre ces deux pays. Washington, qui apporte toujours un
important soutien à la Turquie dans tous les domaines, veut en retour
qu'Ankara résolve au plus vite le problème de Chypre. L'administration
américaine pense que les disputes entre la Turquie et la Grèce ont une
solution facile si on progresse sur l'île.
"L'Europe veut également que le problème chypriote
soit définitivement résolu pour l'an 2000, date à laquelle Chypre
deviendra membre à part entière de l'UE. Celle-ci a lancé un
avertissement aux Grecs et aux Turcs. Son message aux Chypriotes turcs
est le suivant, 'A moins que vous ne vous réconciliez avec les
Chypriotes grecs vous resterez en dehors de l'UE tandis que eux
deviendront membres à part entière'. Aux Chypriotes grecs elle dit,
'votre totale adhésion à l'UE peut être retardée si vous ne montrez pas
davantage de flexibilité pour la conclusion d'un accord avec les
Chypriotes turcs.
"Les États-Unis et l'Europe ne cachent donc pas
qu'ils feront pression pour qu'une solution au problème chypriote soit
trouvé avant la fin du siècle. La carte la plus importante est celle de
l'adhésion à l'Union européenne. Les rouages se mettront en route au
cours des prochaines semaines.
"Denktas semble lui-même dans une impasse. Jamais
dans l'histoire du problème de Chypre les négociations n'ont traversé
une situation aussi difficile. La moindre erreur pourrait signifier la
défaite de la communauté turco-chypriote.
"Tout doit être prêt pour le moment où Chypre
deviendra membre à part entière, au début du siècle prochain. Les
Chypriotes grecs tenteront d'assurer la poursuite des négociations et
tenteront de dépeindre les Chypriotes turcs comme la 'partie
intransigeante pleine de mauvaises intentions'. Leurs intérêts les
poussent à agir de la sorte.
"Le côté turc prendra des initiatives pour rendre la
tactique des Chypriotes grecs inefficace et tenir la partie grecque
pour responsable de l'absence de solution. Ce sera un processus de
négociation qui requiert du tact, de la flexibilité et de l'adresse.
"La coopération entre Lefkosa (Nicosie) et Ankara
sera nécessaire ainsi que des leaders capables de résoudre des crises
et de faire des concessions lorsque cela s'avère nécessaire. Quelle en
sera l'issue? La partie turque peut arriver à ce que la partie grecque
accepte un État de structure fédérative et adhérer à l'UE comme faisant
partie de Chypre. Tout le monde en sortirait gagnant.
"Une autre possibilité est que l'UE accepte
l'adhésion de la partie grecque en attendant que la partie turque ne
fasse accepter aux Chypriotes grecs le statut qu'ils veulent. Dans ce
cas les Chypriotes turcs seront réduits à une minorité et subiront
l'érosion du temps.
"Si l'UE prend une telle décision il existe aussi la
possibilité que la Turquie, en dernier recours, annexe le nord de
Chypre".
ACTE DE PROTESTATION DE GREENPEACE EN TURQUIE
Des activistes de Greenpeace ont dressé le 16 mai
1995 un barrage sur un cours d'eau charriant des déchets industriels et
humains vers une baie polluée de la côte turque de la mer Égée. "Pour
le moment nous bloquons le Meles -il est tellement pollué qu'il produit
des bulles. Il pue", a déclaré le porte-parole Adam Woolf à Reuters.
Quelque 20 activistes du Royaume-Uni, d'Australie,
d'Israël, du Portugal, des Pays-Bas et de Turquie ont bloqué le courant
au niveau de la ville occidentale d'Izmir grâce à un barrage de poteaux
métalliques et de bois.
Les Nations Unies disaient dans un rapport de 1993
que la baie "atteindrait un point critique" en deux ans et entraînerait
l'effondrement de l'écosystème local.
Le scientifique de Greenpeace David Santillo a
déclaré que c'était une des baies les plus polluées de la Méditerranée
orientale, et que la situation risquait de s'aggraver suite à une
augmentation inattendue de 50% de la population d'Izmir (trois millions
d'habitants) d'ici l'an 2000.
Des experts de l'environnement affirment que
l'augmentation alarmante de la pollution de la partie interne de la
baie pourrait bientôt s'étendre vers l'extérieur -où est capturé 50% du
poisson pêché par la Turquie dans la mer Égée- et finalement contaminer
encore un peu plus la Méditerranée.
Greenpeace exige l'application immédiate du projet
de traitement des égouts d'Izmir, introduit en 1969 mais dont les
progrès ne sont guère perceptibles.
Plus de 300 industries et compagnies cataloguées
déversent des produits toxiques dans le Meles, dénonce Greenpeace dans
une déclaration. Les déchets des égouts sont déversés dans la mer
pratiquement sans aucun traitement.
DES CONTRATS TURCS A L'ÉTRANGER POUR UNE VALEUR DE 15 MILLIARDS $
Selon un rapport officiel publié le 17 avril 1995,
les contractants turcs ont obtenu des contrats pour une valeur de
33.130 millions de dollars dont 15.095 millions correspondent à des
contrats actuellement en cours.
Le rapport, publié par la Premier ministre, révèle
que les projets de construction en Libye supposent 4.256 millions de
dollars, 28,1 pour cent de tous les projets actuellement en cours à
l'étranger. Le deuxième plus grand marché est la Fédération russe, avec
des contrats en cours pour une valeur de 3.897 millions de dollars.
Les autres pays où les contractants turcs sont
actuellement opérationnels sont repris ci-après avec indication de la
valeur des contrats en millions de dollars:
Biélorussie 32,6, Ukraine 260, Estonie 43,6,
Azerbaïdjan 348,4, Kazakhstan 1.184,1, Kirghizistan 99,2, Ouzbékistan
699,4, Tadjikistan 53,5, Turkménistan 1.166,8, Arménie 7,2, Géorgie
56,9, Allemagne 132,8, Irak 788,4, Israël 12,6, République turque du
nord de Chypre 35,7, Koweït 387,9, Liban 100, Malaisie 53,1, Égypte
24,7, Pakistan 324,1, Roumanie 163,7, Syrie 3,2, Arabie Saoudite 958,6,
autres 5 millions de dollars.
COMMERCE EXTÉRIEUR TURC DANS LE DOMAINE DE L'ARMEMENT
La Turquie s'est récemment révélée comme un des plus
grands commerçants d'armes du monde.
Selon les chiffres officiels américains fournis par
l'Agence d'assistance de sécurité de la défense (DSAA), la Turquie
était le deuxième plus grand acheteur d'"articles et services de
défense" américains pour l'année fiscale 1994, qui prenait fin le 30
septembre 1994.
Selon la DSAA, la Turquie a acquis des articles des
Ventes militaires étrangères (FMS) pour une valeur de 2,194 milliards
de dollars et se classe derrière Israël, qui a acheté pour 2,447
milliards de dollars en armes américaines en 1994.
La Turquie a également augmenté ses ventes d'armes
au cours des dernières années.
Outre la vente à l'Egypte de 40 chasseurs F-16
produits par l'industrie de guerre turque et des pièces de rechange de
ces mêmes avions au Koweit, au Qatar et au Pakistan, la Compagnie de
machinerie et produits chimiques (MKE), appartenant à l'État, a
fortement accru les ventes d'une large gamme d'armes allant de pièces
d'artillerie et de mortiers, à des mitraillettes, des fusils
d'infanterie et des munitions à 38 pays différents. Les exportations de
MKE ont dépassé les 15 millions de dollars en 1994, et les
représentants de la compagnie ont déclaré que l'objectif pour cette
année est d'exporter des armes et de l'équipement militaire pour une
valeur de 20 millions de dollars.
Le Pérou et l'Équateur auraient utilisé des armes
légères importées de Turquie dans les affrontements qui se sont
produits à la frontière entre les deux pays au début de l'année.
Le plus grand contrat de vente de MKE, pour une
valeur de 13 millions de dollars, en quatre ans, a été conclu avec la
Norvège et comprend la vente de 5.250 mitraillettes MG 3.
Pour protester contre l'incursion des Turcs en Irak,
la Norvège avait décrété un embargo sur la vente d'armes à la Turquie.
Ankara avait réagi en inscrivant la Norvège sur la "liste rouge",
excluant les compagnies norvégiennes des futurs contrats de vente
d'armes.
Un porte-parole de MKE a cependant déclaré le 23 mai
dernier: "L'embargo que la Norvège a décrété récemment contre la
Turquie ne concerne pas nos ventes. Nous n'avons reçu aucun ordre des
autorités turques concernées pour interrompre les ventes".
DEUX MILITANTS DISPARUS RETROUVES MORTS SOUS LA TORTURE
La découverte de deux cas de décès sous la torture à
Istanbul a déclenché une protestation publique dans cette ville.
Les deux militants de gauche, Hasan Ocak et Ridvan
Karakoc, qui figuraient parmi les personnes qui ont mené la résistance
alévi contre la police dans le district de Gazi en mars 1995, avaient
disparu après leur arrestation le 21 mars dernier.
Les corps d'Hasan Ocak et de Karakoc furent
retrouvés fin mai 1995. Ils étaient enterrés aux cimetières
d'Altinsehir et de Karakoc respectivement.
L'exhumation du corps d'Hasan Ocak le 19 mai a
rassemble plusieurs milliers de personnes pour protester contre ce
meurtre. Parmi ce cortège figuraient des représentants de toutes les
organisations de gauche, des associations de défense des droits de
l'homme ainsi que les familles d'autres personnes disparues ou de
victimes de meurtres non encore élucidés. Il a été enterré au cimetière
du quartier de Gazi.
Les avocats de Karakoc ont fait savoir qu'ils
avaient commencé le processus légal pour exhumer le corps du cimetière
d'Ikitelli et l'enterrer selon les traditions.
Dans une conférence de presse le 31 mai dernier
l'Association des droits de l'homme (IHD) a accusé le gouverneur d'être
responsable des morts sous la torture.
Le 6 juin, I'IHD lançait une campagne contre les
meurtres par torture et les disparitions et révélait que 412 personnes
avaient disparu depuis le coup d'État du 12 septembre 1980 alors
qu'elles étaient en détention. 328 de ces cas se sont produits en 1994
et 77 au cours des trois premiers mois de 1995.
UNE DELEGATION TURQUE DANS LA 'FOIRE DE LA TORTURE"
Le 8 juin 1995 le président du Parti des
travailleurs (IP), Dogu Perincek, a montré au ministre d'État pour les
Droits de l'Homme, Algan Hacaloglu, quelques cassettes vidéo d'agents
de police turcs parcourant une "Exposition d'objets pour opérations
secrètes" en Grande-Bretagne - surnommée "foire de la torture" par la
presse turque.
Perincek a demandé au ministre si le gouvernement
était au courant de l'envoi d'agents à cette foire, si la Turquie y
avait fait l'acquisition d'appareils de torture et si c'était le cas à
quel prix.
Le leader de gauche a également critiqué la Grande
Bretagne pour avoir permis l'exposition.
SOMBRES CELEBRATIONS DES MESURES ECONOMIQUES DU 5 AVRIL
"Les Turcs commémorent aujourd'hui une longue année
de douleur, souffrance, mensonges, cupidité politique et indécence. Une
main invisible —certainement pas celle d'Adam Smith— puise dans leur
bien-être économique depuis un an. Et il semble qu'il continuera d'en
être ainsi pendant au moins les 12 prochains mois".
L'analyste des affaires économiques du Turkish Daily
News, Murat Bekdik, dans un article publié le 5 avril dernier, qualifie
en ces termes les résultats après un an des mesures économiques
adoptées le 5 avril 1994 par la Premier ministre.
L'article poursuit:
Le 5 avril 1994 il y avait un dynamisme économique,
l'inflation était élevée, la distribution des revenus était injuste,
l'endettement (interne et externe) était excessif et les marchés
financiers instables.
Le 5 avril 1995 on observe une décompression
économique, une hyperinflation, une distribution des revenus encore
plus injuste, un plus grand endettement interne et une réduction forcée
des emprunts externes, davantage de chômage mais des marchés financiers
apparemment stables.
Seul quelques personnes pensent que tant de douleur
en termes de bien-être économique valent la peine juste pour accumuler
quelques devises, qui peuvent disparaître en quinze jours s'il se
produit une autre tempête monétaire. Est-ce qu'on peut se vanter d'un
surplus record sur le compte courant quand il ne sert pratiquement à
rien pour soulager la souffrance des masses.
A la fin de la première année du programme de
récupération économique global de Tansu Ciller, l'économie nationale se
trouve coincée dans la pire combinaison possible de déséquilibres
économiques: inflation à trois chiffres et rapide effondrement de
l'activité économique. Les derniers chiffres de l'inflation
inter-annuelle (mars) sont de 144,3%, le produit national brut a baissé
de 6% (1994) et le revenu par habitant a chuté de 27% (1994).
Le 5 avril 1994, la Premier ministre, elle-même
professeur d'économie, lançait aux 60 millions de Turcs que le
programme exposé par sa coalition était un fortifiant miracle qui
mettrait fin aux déséquilibres macro-économiques de la Turquie "dès la
seconde moitié de 1994". Pour y arriver, disait elle, il faudra
consentir quelques sacrifices mais le futur vous appartient et la vie
deviendra finalement rose.
Parmi l'ensemble des décisions présentées le 5
avril, il y avait un programme de récupération dont l'objectif final
était, aux dires du professeur, la stabilisation des prix et la
croissance économique. Objectif non atteint à ce jour. Il apparaît que
ce "paquet" n'a apporté qu'une vague de hausses des prix contrée par
une série de décisions politiques apparemment sérieuses, mais qui
n'étaient en fait qu'une option politique sans application pratique. Il
reste alors l'aspect "éthique" de toute cette controverse. La
présentation par la Premier ministre le 5 avril du plan de sauvetage
révèle que ses véritables intentions n'étaient pas de corriger les
déséquilibres macro-économiques mais de "présenter une fausse situation
pour accroître au maximum ses chances d'être réélue aux élections".
"... L'amélioration de l'économie turque sera visible lors de la
deuxième moitié de 1994. L'inflation baissera rapidement et l'équilibre
économique sera rétabli", déclarait-elle lors d'une conférence de
presse le 5 avril 1994. Ce qui s'est produit dans la seconde moitié de
1994 est pure et simplement une stagflation.
Lors de la présentation du programme elle a
également dit, "Nous n'arrêterons pas l'économie. Une croissance basée
sur les exportations se poursuivra". Non, "ils" n'ont pas arrêté
l'économie, c'était sans doute les "provocateurs grecs" qui ont
provoqué une récession de six pour cent dans l'économie turque…
Elle a expliqué ce qui arriverait s'ils ne prenaient
pas ces mesures. "... Si nous ne prenons pas ces mesures, l'inflation
dépassera les 100% et nous connaîtrons l'expérience de l'Amérique
latine avec un effondrement de l'économie et des milliers de
chômeurs..."
Quelle précision! Non pas au début de la
phrase mais dans la partie qui suit "si nous ne prenons pas ces
mesures". Oui, la Premier ministre a frappé dans le mille... Rappelant
ce que disaient ses livres aux États Unis, Ciller avait dit que le
déclin attendu dans la demande interne des biens de consommation suite
aux mesures adoptées dissuaderait les producteurs d'augmenter leurs
prix.
Elle a également promis de geler les hausses des
prix du secteur privé, au moins jusqu'à la fin de l'année (1994).
On pouvait donc en conclure que si ni le secteur
public ni le privé n'augmentaient leurs prix, l'inflation diminuerait
rapidement. Mais ce ne fut pas le cas. On se demande alors si c'est le
PKK, l'ERNK, ou les provocateurs d'un État hostile qui ont augmenté le
niveau général des prix en Turquie.
Ciller arborait un sourire confiant lorsqu'elle
annonçait, le 5 avril, que la Banque centrale jouirait d'une autonomie
totale et qu'elle serait progressivement libérée de la charge de
financer le déficit budgétaire.
"La Banque centrale totalement autonome de Turquie"
a récemment fait l'objet de dures négociations entre les deux
partenaires de la coalition pour son contrôle. La conception de Ciller
de l'autonomie diffère probablement du critère utilisé par le reste du
monde. Peut-être qu'elle a raison, peut-être qu'une banque centrale
autonome peut parfois être "partagée" par des partis politiques et que
la vision mondiale est incorrecte. Après tout, elle a été formée dans
une respectable université de la superpuissance...
Les Turcs doivent se sentir inquiets du bien-être
économique qu'ils ont perdu mais également de celui qu'ils vont
certainement perdre dans un futur proche. La plus grande traîtrise est
sans doute pour eux la cupidité politique et même le charmant sourire
de leur Premier ministre ne peut le dissimuler au public.
DEUX MOIS DE TERRORISME D'ETAT
Le 1.5, le président de l'HADEP à Elbistan, Hüseyin
Koku, enlevé le 20 octobre 1994 par des inconnus, est retrouvé
assassiné dans le district de Pötürge, province de Malatya.
Le 2.5, des parents de prisonniers faisant une grève
sur le tas dans les locaux du CHP à Ankara en solidarité avec les
grévistes de la faim de la prison de Yozgat sont arrêtés par la police.
Le 2.5, les villages de Gevrik, Gazikusagi et
Nanikusagi, dans la province de Tunceli, évacués déjà le 17 septembre
1994, sont détruits par les forces de sécurité qui mettent le feu aux
maisons.
Le 3.5, les villages d'Aydinlik, Yeni Cakmak et
Cagli, dans la province de Batman, auraient été évacués par les forces
de sécurité et de nombreuses maisons incendiées.
Le 3.5, à Istanbul, le membre de l'HADEP Muzaffer
Kizilgedik se plaint d'avoir été torturé pendant huit jours dans un
poste de police après avoir été arrêté le 17 avril dernier. Les traces
de torture ont été certifiées par un rapport médical de l'Hôpital
universitaire de Capa.
Le 3.5, la CSE d'Ankara condamne 17 défendeurs du
Dev-Sol à différentes peines de prison allant jusqu'à 36 ans.
Le 3.5, à Pasinler, le jeune de neuf ans Ercan Görme
est victime d'une explosion alors qu'il jouait avec une grenade trouvée
près d'un baraquement militaire.
Le 3.5, à la prison d'Elbistan, des gendarmes et des
gardiens font une descente dans les pavillons des prisonniers
politiques et blessent dix détenus. 180 prisonniers politiques ont
commencé une grève de la faim pour protester contre cette brutalité.
Le 4.5, les forces de sécurité arrêtent les
vice-présidents de l'HADEP, Hikmet Fidan et Sahabettin Özaslaner, ainsi
que quatre autres membres du parti à Ankara. Tous sont accusés d'être
membres d'une organisation illégale.
Le 5.5, à Samsun, une cour pénale condamne 13
fonctionnaires syndicaux à 18 mois de prison et à payer une amende de
780.000 TL chacun pour avoir organisé un meeting le 13 novembre 1994.
Le 5.5, à Diyarbakir, Vehbi Deniz est assassiné par
des tireurs inconnus.
Le 6.5, les forces de sécurité font une descente
dans le village de Büyükyurt, province de Tunceli, et mettent le feu à
toutes les maisons. Les habitants de ce village avaient reçu un
ultimatum de 15 jours pour quitter leur village.
Le 7.5, le fondateur de l'HADEP, Tahir Tan, se
plaint d'avoir été torturé par la police après sa détention le 29 avril
dernier à Ankara.
Le 9.5, à Diyarbakir, Hasan Ezer est abattu par des
inconnus.
Le 10.5, le président de l'IHD d'Adana, Metin Celik,
accuse les forces de sécurité de procéder à des arrestations et des
descentes arbitraires dans les maisons des familles kurdes.
Le 11.5, les militants du parti néo-fasciste MHP
poignardent à mort Muharrem Saritepe et blessent son fils Ünal Saritepe.
Le 11.5, à Bingöl, l'enfant de huit ans Ercan
Bingöllü est victime de l'explosion d'une mine posée par les forces de
sécurité. Le même jour, à Hozat, quatre enfants sont sérieusement
blessés par l'explosion d'une autre mine.
Le 14.5, des tireurs inconnus abattent Haci
Semsettin à Nusaybin.
Le 15.5, à Mardin, Abdülkerim Kaya, un homme de 60
ans enlevé le 13 mai dernier, est retrouvé assassiné près du village
d'Isikdere.
Le 15.5, la CSE de Malatya condamne un membre du
Parti/Front de libération du peuple révolutionnaire (DHKP/C), Mustafa
Karaagac, à la prison à vie et 11 autres membres à différentes peines
de prison allant jusqu'à 18 ans. Le même jour, la CSE d'Istanbul
condamne deux membres de l'Union des communistes révolutionnaires de
Turquie (TIKB) à 12 ans et six mois de prison chacun.
Le 16.5, à Dargecit, un conducteur de tracteur,
Yusuf Celik, est victime de l'explosion d'une mine posée par les forces
de sécurité.
Le 18.5, la Cour de cassation ratifie une sentence
contre le vice-président de l'IHD, Sedat Aslantas, pour un discours
prononcé lors d'un meeting de l'association le 24 octobre 1992.
Aslantas avait été condamné par la CSE d'Ankara à trois ans de prison
et à payer une amende de 150 millions de TL. Arrêté le 5 décembre 1994,
il est déjà à la prison centrale d'Ankara.
Le 18.5, à Silvan, le village de Kurucayir subit
l'intervention des forces de sécurité et ses habitants sont forcés de
quitter les lieux en une semaine. A Cukurca, les villages de Caglayan
et Cinarli sont évacués de force.
Le 21.5, à Adana, une femme enceinte, Saniye Özkaya,
affirme avoir été torturée et harcelée sexuellement au poste de police.
Elle a également été témoin des tortures infligées à un garçon de onze
ans, R.Ü., par la police.
Le 21.5, on rapporte que les villages de Dogus,
Yandere, Kuskaya, Kuru, Tandir et Kücükkardes, à Nusaybin, ont été
évacués par les forces de sécurité en l'espace de dix jours. Au cours
de l'opération deux maisons ont été brûlées. En outre, les habitants
des villages d'Acik, Yavru et Ilkadim, dans le même district, ainsi que
ceux du village de Yaprak, dans le district de Lice, reçoivent l'ordre
de quitter leur village en l'espace de deux semaines.
Le 22.5, une équipe de police fait une descente dans
une maison d'Adana et abat deux jeunes accusés de préparer un acte
politique.
Le 23.5, le président de l'IHD à Bursa, Muhammed
Aydin, et six autres fonctionnaires de l'association sont jugés par une
cour militaire de l'état-major à Ankara pour avoir organisé un meeting
le 10 janvier 1993. Chacun d'eux risque pas moins de trois mois de
prison.
Le 23.5, à Elazig, le fonctionnaire de l'IHD Fevzi
Kazim Sökmen et ses deux amis sont arrêtés par la police.
Le 23.5, dans la prison d'Elazig, 95 prisonniers
politiques commencent une grève de la faim pour protester contre les
conditions de vie dans les prisons et les pressions qu'ils subissent.
Le 24.5, deux hauts fonctionnaires de l'IHD, Günseli
Kaya et Dervis Altun, sont inculpés par le procureur public d'Izmir
pour avoir organisé une conférence de presse à Izmir le 11 mars 1995.
Chacun d'eux risque une peine de prison de trois ans.
Le 24.5, à Istanbul, une bombe placée par des
inconnus détruit un bâtiment occupé par la section locale du Parti du
peuple républicain (CHP), du Parti de la juste voie (DYP) et du Parti
d'action nationaliste (MHP).
Le 25.5, les forces de sécurité arrêtent 12 membres
de Parti communiste révolutionnaire de Turquie (TDKP) à Adana et 17
membre du Parti/Fondation communiste marxiste léniniste (MLKP/K) à
Istanbul.
Le 25.5, dans le village d'Özdemir à Igdir, la
maison de Mehmet Aras, défendeur du PKK prisonnier à Erzurum, est
fouillée par six hommes armés. Les assaillants tuent sa femme, Songül
Aras, et ses quatre enfants.
Le 27.5, le procureur de la CSE de Diyarbakir
inculpe 26 membres présumés de l'Hezbollah pour avoir participé à 88
attentats donnant la mort à 54 personnes. Onze des défendeurs risquent
la peine capitale.
Le 28.5, à Antalya, le membre de l'HADEP Nevzat
Sagnic affirme avoir été torturé après sa détention le 14 mai dernier.
A Ankara, le vice-président de l'HADEP, Sahabettin Özaslaner, arrêté le
4 mai, se plaint d'avoir subi des tortures au centre de police.
Le 28.5, à Bursa, 740 employés de l'Administration
des postes sont jugés par une cour pénale pour avoir participé à un
acte de protestation les 24 et 25 novembre 1994. Chacun d'eux risque
une peine de prison allant jusqu'à un an.
Le 28.5, à Midyat, Süleyman Kaplan, arrêté deux
jours auparavant par des inconnus, est retrouvé assassiné.
Le 28.5, à Bismil, les forces de sécurité évacuent
le hameau d'Horozlu et incendient la moitié des maisons.
Le 29.5, à Sivas, 24 personnes dont les membres de
l'IHD Musa Demir, Cevdet Aktas et Fahri Sener, sont arrêtés et accusés
d'appartenir à une organisation illégale.
Le 29.5, à Diyarbakir, des tireurs inconnus abattent
Firat Acar et Hakki Akbalik.
Le 29.5, à Nusaybin, Süleyman Yalcin était enlevé
dans le village de Bakacak par des inconnus et retrouvé mort non loin
de là.
Le 29.5, la CSE d'Ankara condamne six membres du
Parti communiste révolutionnaire de Turquie (TDKP) à des peines de
prison allant jusqu'à 12 ans et six mois.
Le 30.5, à Istanbul, Recep Coban se plaint d'avoir
été torturé au poste de police d'Üsküdar où il avait été emmené
suspecté de vol.
Le 30.5, commence à la cour pénale N˚5 de Beyoglu le
procès du président de l'IHD d'Istanbul, Ercan Canar, et de six autres
fonctionnaires de l'association, Seref Turgut, Salahattin Okcuoglu,
Zeynep Baran, Kamber Erkocak, Tonguc Aslan et Cevriye Aydin. Chacun des
défendeurs risque une peine de prison allant jusqu'à trois ans pour
activités séparatistes. Le procureur demande également la fermeture de
la section d'Istanbul de l'IHD pour une période indéfinie.
Le 30.5, des assaillants inconnus lancent des
cocktails molotof contre le bureau d'Izmir de l'HADEP. Les
fonctionnaires de l'HADEP accusent les Loups Gris de l'attaque.
Le 31.5, à Ankara, Ali Yilmaz, de 52 ans, est
hospitalisé après trois jours de détention dans un poste de police et
meurt à l'hôpital de Numune. Sa famille accuse le commissaire de
l'avoir torturé à mort.
Le 31.5, à Söke, onze personnes sont arrêtées par la
police pour avoir mené des activités en faveur du MLKP-K.
Le 1.6, à Adana, deux tireurs inconnus blessent le
membre de l'HADEP Izzettin Görnü. Son fils Ekrem Görnü avait été
assassiné le 24 août 1992 au cours d'une autre attaque armée.
Le 1.6, à Siirt, des gendarmes tirent sur un bus et
blessent le chauffeur, Metin Cetin. Celui-ci perd le contrôle du bus
qui se renverse, cause la mort à trois femmes et en blesse dix autres.
Le 2.6, à Istanbul, Ridvan Karakoc, disparu depuis
sa détention le 20 février 1995, est retrouvé mort et enterré dans un
cimetière. Sa famille accuse la police de l'avoir tué en le torturant.
Plus de 5.000 personnes participent aux funérailles de Ridvan mais
après la cérémonie la police arrête plus de 20 personnes.
Le 3.6, le procureur de la CSE de Diyarbakir inculpe
six personnes pour avoir participé aux activités du PKK. Chacun d'eux
risque une peine de prison allant jusqu'à 15 ans.
Le 4.6, trois fonctionnaires de l'HADEP, Mehmet
Zeynettin Ünay, Melik Aygül et Abdullah Akin, sont arrêtés par la
police au cours d'une descente dans une maison à Diyarbakir.
Le 4.6, à Elbistan, l'arrestation de deux femmes
mariées par la police provoque une réaction populaire et plus de 1.000
personnes lancent des pierres contre le quartier général de la police
et incendient des voitures de patrouille.
Le 5.6, à Mersin, Abdullah Önen est abattu par des
tireurs inconnus.
Le 5.6, des forces de sécurité arrêtent plus de 40
membres de l'HADEP au cours d'une série d'opérations de répression à
Izmir.
Le 6.6, le président du Parti des travailleurs (IP),
Dogu Perincek, est condamné par la CSE d'Ankara à deux ans et quatre
mois de prison et à payer une amende de 58 millions de TL pour les
discours électoraux prononcés avant les élections législatives.
Perincek avait été condamné par ce tribunal à 2 ans de prison et à
payer une amende de 50 millions de TL mais la cour de cassation a
considéré cette peine insuffisante et a ordonné un nouveau procès.
Le 7.6, les forces de sécurité mènent une opération
dans le village de Dedeagac à Tunceli et mettent le feu à de nombreuses
maisons.
Le 7.6, la CSE d'Istanbul condamne cinq personnes à
la prison à vie pour avoir participé aux activités du Dev-Sol.
Le 7.6, à Kozluk, le fermier Hadi Baran, enlevé par
des inconnus, est retrouvé mort, les yeux hors des orbites.
Le 9.6, un convoi de 100 voitures dans lesquelles
voyageaient le président de l'HADEP, Murat Bozlak, et des centaines de
membres du parti se rendant à Batman pour un meeting est arrêté deux
fois par les forces de sécurité. Les gendarmes ont tiré en l'air,
fouillé toutes les voitures et interrogé tous les passagers.
Le 9.6, à Kiziltepe, une équipe spéciale des forces
de sécurité fait une descente dans une maison, tue deux sympathisants
présumés du PKK et blesse plusieurs personnes.
Le 10.6, le ministre de l'Intérieur, Nahit Mentese,
répondant à une question posée au Parlement, affirme que les forces de
sécurité ont complètement évacué 213 villages et hameaux et 42 autres
partiellement à Diyarbakir.
Le 11.6, à Siverek, le berger Haci Ali Kemik est
abattu par des tireurs inconnus.
Le 12.6, le procureur militaire du tribunal de
l'état-major inculpe deux représentants de l'Association anti-guerre
(SKD) pour une conférence de presse prononcée à Izmir le 16 janvier
1993. Ayse Tosuner et Nazmiye Zencir seront jugés par la cour
militaire. Ils sont accusés d'avoir mené une campagne contre le service
militaire.
Le 12.6, la CSE d'Ankara condamne sept personnes à
différentes peines de prison allant jusqu'à 28 ans pour activités en
faveur du PKK.
Le 13.6, le président de l'IHD d'Adana, Metin Celik,
et 11 autres membre de cette association sont arrêtés pour avoir
affiché des posters sur les personnes disparues.
Le 13.6, à Siirt, une femme, Meclise Tegen, est tuée
par l'explosion d'une mine posée par les forces de sécurité.
Le 15.6, un tribunal militaire d'Istanbul ouvre un
procès contre les avocats Aysegül Sentürk, Mukaddes Alatas, Kerime
Gökdemir et Ali Kaplan, tous membres de l'IHD, pour avoir donné une
conférence de presse sur les mauvaises conditions de détention devant
la prison de Bayrampasa à Istanbul. Accusés d'avoir organisé un meeting
non autorisé, chacun d'eux risque une peine de prison allant jusqu'à
trois ans.
Le 16.6, à Batman, Mahmut Yildiz et Hasan Ilter sont
assassinés par des inconnus.
Le 17.6, à Bitlis, Enver Ozcan est victime de
l'explosion d'une bombe posée par les forces de sécurité.
Le 18.6, à Adana, Süleyman Ciftci, qui avait subi
une descente de police chez lui le 16 juin dernier, se plaint d'avoir
été torturé pendant sa détention.
Le 18.6, l'ancien maire d'Hakkari, Sükrü Calli, et
le membre du DEP, Hüseyin Umit, sont arrêtés par la police.
Le 19.6, le procureur de la CSE d'Ankara ouvre une
action en justice contre deux vice-présidents de l'HADEP, Hikmet Fidan
et Sahabettin Ozaslaner, ainsi que deux autres fonctionnaires, Sehmuz
et Ferhan Türk. Accusés d'être membres du PKK, ils risquent des peines
de prison allant jusqu'à 15 ans.
Le 19.6, avant que ne se produise un acte des
travailleurs pour une constitution démocratique et des droits
syndicaux, la police arrête, sur ordre du ministre de l'intérieur
Mentese, sept fonctionnaires syndicaux, Yildirim Kaya (président
d'Egitim Sen), Selami Cicek (président de Turizm Sen), Cengiz Baydali
(président de Yapi Yol Sen), Aziz Yildirim, Alper Ozturk, Kemal Unal et
Hasan Haydar.
JOURNEE D'ACTION SUR LA TURQUIE
Le 5 mai le Comité des écrivains en prison (WIPC) de
PEN International a convoqué une journée d'action internationale sur la
Turquie et mis en évidence le cas de l'écrivain Yasar Kemal, jugé ce
jour-là.
Les centres de PEN partout dans le monde ont envoyé
des lettres au gouvernement turc, ont fait pression sur les ambassades
turques et dénoncé publiquement la situation des écrivains en Turquie.
Kemal était accusé de "disséminer de la propagande
séparatiste" dans un article, "campagne de mensonges", publié par le
magazine allemand Der Spiegel en janvier dernier.
Kemal risque également des poursuites pour la
réimpression de l'article dans une anthologie intitulée La Turquie et
la liberté d'expression, et pour un autre article, Nuage noir sur la
Turquie, qui figure également dans l'anthologie ainsi que dans la revue
britanniqueIndex on Censorship. Dans ce dernier cas il est accusé
d'incitation au racisme.
DEUX MOIS DE PRESSION SUR LES MEDIAS
Le 3.5, on rapporte que le correspondant à Tunceli
des quotidiens Cumhuriyet et Milliyet, Ferit Demir, avait été enlevé
par des militants du PKK le 30 avril dernier sur la route
Tunceli-Pertek. [Il a été libéré le 12 mai].
Le 3.5, la cour de cassation ratifie les sentences
infligées à l'écrivain Yalcin Kücük et l'éditeur Hikmet Kocak par la
CSE d'Istanbul. Cette dernière avait condamné Kücük à deux ans de
prison et à payer une amende de 250 millions de TL pour son livre
Conversations dans le jardin kurde, et Kocak, directeur de la maison
d'édition Basak, à six mois de prison et à payer une amende de 50
millions de TL.
Le 4.5, la cour de cassation ratifie une peine de
prison de deux ans et une amende de 400 millions de TL infligées au
rédacteur de Medya Günesi, Nurettin Yüksekkaya. Cette cour ratifie
également une suspension de 30 jours imposée au périodique.
Le 4.5, la publication du périodique Jiyana Nû est
interdite par décision d'une cour pénale d'Istanbul.
Le 6.5, le président de l'IHD de Gaziantep, Imam
Özharat, est inculpé par le procureur public pour un déclaration
publiée dans un journal local, Özgür Gaziantep. Jugé par une cour
pénale, Özharat risque une peine de prison d'un an pour avoir critiqué
les opérations de l'armée turque dans le nord de l'Irak.
Le 10.5, à Adana, deux enfants de 12 ans, S.A. et
E.P., se plaignent d'avoir été torturés par la police après leur
arrestation le 6 mai dernier pour avoir distribué la revue kurde Walate
Me.
Le 12.5, le bureau d'Elazig du quotidien Yeni
Politika est fouillé par la police. Celle-ci arrête également deux
correspondants, Songül Zengin et Nurcan Turgut.
Le 15.5, le N˚ 30 du périodique Devrimci Emek est
confisqué par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
Le 15.5, le dessinateur Ertan Aydin est incarcéré à
Salihli pour purger une peine de prison de dix mois. Il avait été
condamné par un cour pénale pour une caricature publiée par le
quotidien Özgür Gündem le 15 décembre 1992.
Le 16.5, l'éditeur du quotidien disparu Özgür Ülke,
Hasan Kücükoba, est condamné par une cour pénale d'Istanbul à un an de
prison en vertu de l'article 159 du Code pénal.
Le 17.5, les autorités policières refusent de
délivrer un passeport à l'écrivain Edip Polat, invité par International
PEN à assister à un meeting à Londres sur les poètes et les écrivains
en prison. Polat était libéré le 20 janvier 1995 après avoir purgé une
peine de prison de 18 mois pour son livre Au Newroz avons-nous
transformé l'aube. Il est devenu membre d'honneur de PEN alors qu'il
était en prison.
Le 17.5, la CSE d'Istanbul condamne deux
journalistes, Hidir Göktas et Metin Gülbay, à 20 mois de prison et à
payer des amendes de 33 millions de TL pour avoir publié l'année
dernière le livre Le nouvel ordre mondial et la Turquie. L'éditeur du
livre, Hasan Basri Ciplak, écope également de 5 mois de prison et d'une
amende de 42 millions de TL. Le livre contient une série d'interviews
aux leaders des partis politiques.
Le 18.5, trois périodiques, le N˚ 17 de Partizan
Sesi, le N˚ 55 d'Özgür Halk et le N˚43 d'Hedef sont confisqués par la
CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste. Un livre intitulé La
Résistance de Gazi: Pierre, Coeur et Barricade est également confisqué
par la cour.
Le 21.5, le rédacteur responsable du périodique
disparu Özgür Ülke, Murat Sarac, est arrêté par la police à Adana.
Le 23.5, l'éditeur des quotidiens Yeni Günaydin,
Süper Tan et Ekonomik Bülten, Bekir Kutmangil est abattu par trois
tireurs.
Le 26.5, les dernières éditions des périodiques
Atilim, Dayanisma et Sosyalist Kadin sont confisqués par la CSE
d'Istanbul en vertu des articles 6 et 8 de la LAT et de l'article 312
du Code pénal.
Le 27.5, la cour de cassation ratifie un sentence
contre le président de la Maison populaire Bandirma, Mehmet Özdemir. Il
avait été condamné à 20 mois de prison et à payer une amende de 208
millions de TL pour une interview de lui publiée par le quotidien Özgür
Gündem en juin 1993. Après la ratification de la sentence, Özdemir a
été emmené à la prison de Bandirma.
Le 27.5, la première édition d'une nouvelle revue
kurde, Ronahi, publiée à la place du périodique interdit Denge Azadi,
est confisquée par la CSE d'Istanbul.
Le 28.5, à Istanbul, une nouvelle maison culturelle
populaire ouverte dans le quartier de Gazi, subit une descente de
police et quatre membres du groupe musical Yorum, Kemal Sahir Gürel,
Ufuk Lüker, Hakan Atak et Özcan Sahver, sont arrêtés par la police.
Le 31.5, le N˚ 2 du périodique Ronahi est confisqué
par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
Le 1.6, à Istanbul, l'ancien secrétaire de la
section de l'IHD d'Istanbul, l'avocat Eren Keskin, est incarcéré pour
purger une peine de deux ans de prison ratifiée par la cour de
cassation. Eran a été condamné par la CSE d'Istanbul à une peine de
prison de deux ans et à payer une amende de 250 millions de TL pour un
article publié le 14 janvier 1993 par Özgür Gündem.
Le 2.6, le rédacteur de Yeni Politika, Mehmet Sanli
Ekin, est arrêté par la police alors qu'elle faisait une descente chez
lui. Le même jour, quatre correspondants de ce même journal, Mustafa
Sav, Adil Denk, Bahattin Yildiz et Metin Dag, ainsi que le
correspondant à Mardin du quotidien disparu Özgür Gündem, Nezahat Özen,
sont arrêtés à Diyarbakir.
Le 3.6, le N˚ 18 du périodique Partizan Sesi et le
N˚ 34 d'Atilim sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande
séparatiste et apologie d'organisations illégales.
Le 4.6, la CSE d'Istanbul confisque le N˚ 3 du
périodique Ronahi en vertu de l'article 312 du Code pénal.
Le 6.6, deux journalistes de la revue kurde Welate
Me, le rédacteur Mehmet Gemsiz et l'éditeur Aynur Bozkurt, sont jugés
par la CSE d'Istanbul en vertu de l'article 8 de la LAT. Au cours de la
première session, Mehmet Gemsiz refuse de répondre en turc aux
questions du juge en turc et s'est exprimé en kurde. Le tribunal décide
alors de le placer en détention.
Le 6.6, le rédacteur du périodique Atilim, Aslihan
Yücesan, est placé en détention par la CSE d'Istanbul pour des articles
et photos publiés le 27 mai 1995.
Le 8.6, un ancien rédacteur du périodique Kizil
Bayrak, Ayse Öztürk, est condamné par la CSE d'Istanbul à six mois de
prison et à payer une amende de 50 millions de TL. Le tribunal interdit
également la publication du journal pendant un mois.
Le 8.6, le bureau d'Izmir du Centre culturel
Mésopotamien subit une descente de police et est fermé par celle-ci. Au
cours de l'opération, 25 personnes sont interrogées et trois d'entre
elles sont arrêtées.
Le 9.6, le rédacteur de l'hebdomadaire Express,
Yücel Göktürk, est inculpé par le procureur de la CSE d'Istanbul pour
un rapport sur la torture publié le 22 avril 1995. Il est accusé
d'avoir enfreint l'article 6 de la LAT.
Le 10.6, la première édition du nouveau journal
kurde Roj est confisqué par la CSE d'Istanbul pour propagande
séparatiste.
Le 12.6, deux périodiques, le N˚ 4 de Ronahi et
Hedef sont confisqués par la CSE d'Istanbul pour propagande séparatiste.
Le 13.6, on rapporte que depuis le début de sa
publication, le 13 avril dernier, 54 des 61 éditions du nouveau
quotidien Yeni Politika ont été confisquées par la CSE d'Istanbul en
vertu des articles 6 et 8 de la LAT et de l'article 312 du Code pénal
turc.
Le 14.6, le professeur assistant Fikret Baskaya est
remis en liberté après avoir purgé une peine de prison de 15 mois pour
son livre la Faillite du paradigme - Introduction à la critique de
l'idéologie officielle.
Le 14.6, la CSE d'Istanbul ouvre le procès de deux
journalistes du périodique Cagdas Zülfikar, l'éditeur Gülnur Aslan et
le rédacteur Ali Yegin, en vertu de l'article 8 de la LAT. Chacun d'eux
risque une peine de prison allant jusqu'à cinq ans.
Le 15.6, le quotidien Evrensel est confisqué par la
CSE d'Istanbul pour avoir réimprimé un article sur le PKK publié
précédemment par The Military Review aux États-Unis.
Le 16.6, le directeur des programmes d'Interstar TV,
Ardan Zenturk, et trois producteurs de programmes, Nafiz Akyüz, Bahri
Kayaoglu et Seyda Acikkol sont arrêtés par la police pour avoir diffusé
des révélations sur les assassinats politiques par des inconnus.
Le 19.6, le N° 7 du périodique Ates Hirsizi est
confisqué par une cour pénale d'Istanbul pour avoir insulté la
République turque. Le N° 5 de Ronahi a été confisqué par la CSE
d'Istanbul pour propagande séparatiste.
CILLER: ENNEMIE DE LA PRESSE
Le Premier ministre Tansu Ciller fait partie des 10
"ennemis de la presse" révélés par le Comité de protection des
journalistes (CPJ) à l'occasion de la Journée mondiale de la liberté de
la presse, le 3 mai 1995.
Les autres neuf "ennemis de la presse" seraient Abu
Abdal Rahman Amin, leader du GIA en Algérie; Radovan Karadzic,
Président des Serbes de Bosnie; Emomali Rakhmanov, Président du
Tajikistan; Sani Abacha, Président du Nigeria; Than Shwe, premier
ministre de Myanmar (Burma); Mobutu Sese Seko, président du Zaïre;
Hafez al-Assad, président de Syrie; Fidel Castro, président de Cuba et
Lee Kuan Vew, ancien Premier ministre de Singapour.
Dans un communiqué de presse, le CPJ souligne qu'à
eux dix ils sont responsables de la mort de près de 100 journalistes et
maintiennent 100 autres en prison. "Certaines de ces
personnalités sont célèbres pour leur caractère impitoyable et violent,
tandis que d'autres sont des champions des restrictions à la liberté de
la presse", a déclaré le directeur en fonctions du CPJ Bill Orme.
A propos de Tansu Ciller, le CPJ dit: "La Turquie a
plus de journalistes en prison qu'aucun autre pays dans le monde. Le
CPJ exposait 74 autres cas fin 1994. Dans la plupart d'entre eux des
personnes étaient emprisonnées parce qu'elles auraient exprimé des
sympathies pour la cause séparatiste kurde. Le premier ministre Ciller
n'a pas encore tenu son engagement de réformer les statuts vagues mais
draconiens qui empêchent une information libre sur le conflit et la
culture kurdes".
OBJECTEURS DE CONSCIENCE TURCS EN PROCES
Quatre objecteurs de conscience turcs seront en
procès le mardi 20 juin à la cour militaire d'Ankara. Après avoir tenu
une conférence de presse à Istanbul le 17 mai 1994 en critiquant la
guerre au Kurdistan, M. Ülke, M Iyidogan, M. Demirkan et M. Fersal ont
été accusés d'"éloigner le peuple de l'armée" sur bas de l'article 155
du Code pénal turc.
Leurs avocats estiment que cette persécution est une
violation de la liberté d'expression garantie par les articles 24 et 25
de la Constitution turque.
Dès le 17 mai 1994 les quatre objecteurs ont été
emprisonnés et cités plusieurs fois à la cour militaire. Le verdict
final est attendu le 20 juin.
La Turquie ne reconnaît pas le droit à l'objection
de conscience. Cependant, plutôt que persécuter les objecteurs de
conscience en raison de leur objection au service militaire, l'Etat
turc les traîne en justice pour des autres raisons comme d'avoir
critiqué les forces armées. L'objectif est de ne pas donner trop de
publicité à l'objection de conscience en général. La Turquie a déjà des
problèmes sérieux à recruter assez citoyens pour son armée, puisque les
jeunes cherchent très souvent à éviter leur service militaire en ne
répondant pas à l'appel. On estime qu'environ 200.000 appelés échappent
actuellement au recrutement.
Le Bureau européen de l'objection de conscience
signale que le cas de quatre objecteurs est suivi avec beaucoup
d'intérêt par plusieurs organisations pour les droits de l'homme en
Europe. Une délégation internationale composée des observateurs
provenant de six pays européen sera présente au procès.
(Pour avoir plus d'information: BEOC à
Bruxelles, Tél: 32-2-648 52 20, Fax: 640 07 74).